Le Parlement adopte définitivement le projet de loi antigaspillage
Le Parlement a adopté définitivement jeudi, par un ultime vote du Sénat, le projet de loi antigaspillage dont la mesure phare, la consigne pour les bouteilles en plastique, a été repoussée jusqu'en 2023 pour répondre aux inquiétudes des collectivités. Le texte, qui a fait l'objet d'un accord voté à l'unanimité entre députés et sénateurs, avait déjà été approuvé par l'Assemblée nationale la semaine dernière.
Présenté comme un marqueur environnemental de l'acte II du quinquennat, il prévoit une série de mesures concrètes pour lutter contre le gaspillage : parmi elles, l'interdiction, pour les grandes surfaces ou les plateformes en ligne, de détruire leurs invendus non alimentaires notamment les produits d'hygiène et de textile, dès 2022. Contre l'obsolescence programmée, en particulier dans l'électronique, il crée un « indice de réparabilité » qui précisera si un produit est aisé à réparer et veut faciliter l'accès aux pièces détachées.
Développement du « vrac » dans les supermarchés ou suppression des contenants en plastique dans les fast-food pour les repas sur place à l'horizon 2023 : ce texte « va changer la vie des Français », s'est félicitée la secrétaire d'État Brune Poirson. Il crée aussi de nouvelles filières pollueur-payeur, notamment dans le bâtiment pour éviter les dépôts sauvages. La rapporteure Marta de Cidrac (LR) a salué « la véritable envergure » donnée par les deux chambres à un « projet de loi qui n'était peut-être pas à la hauteur des enjeux ». Il comporte « tous les outils nécessaires pour revenir sur le modèle linéaire ‘produire, consommer, jeter’ », a jugé Frédéric Marchand (LREM).
Mais l'image de ce projet de loi a été brouillée par le conflit opposant le gouvernement aux professionnels du recyclage et aux associations de collectivités, sur la consigne pour recyclage des bouteilles en plastique. Le gouvernement voulait l'instaurer dès 2022 pour atteindre les objectifs européens de collecte de 77 % des bouteilles plastique en 2025 et 90 % en 2029, alors que la France plafonne à moins de 60 %. Le Sénat a mené la charge, rejetant purement et simplement le dispositif en première lecture, non sans quelques vives passes d'armes avec la secrétaire d'Etat. « Notre collaboration n'a pas été qu'un long fleuve tranquille », a d'ailleurs glissé Brune Poirson jeudi.
« Position d'équilibre »
Le ministère de la Transition écologique a été contraint à un « compromis » . Collectivités et recycleurs ont obtenu un délai supplémentaire, jusqu'en 2023, pour tenter d'atteindre les objectifs intermédiaires de collecte, faute de quoi, après « concertation », le dispositif de consigne pour recyclage pourra être « mis en œuvre ». Concrètement, un bilan sera « réalisé en 2023 » sur la base des résultats obtenus en 2022.
Brune Poirson a souligné « une position d'équilibre », mais des critiques persistent. « Au final, on renvoie à plus tard la mise en place de la fausse consigne », a déclaré la présidente du groupe CRCE à majorité communiste Eliane Assassi, pour qui « la seule consigne qui vaille » est celle du réemploi, donc du verre.
Pour Joël Bigot (PS), le compromis est « de nature à apaiser les tensions, mais pas optimal », tandis que Anne-Catherine Loisier (centriste) pointait un dispositif « à double tranchant qui cautionne » la poursuite de l'utilisation des bouteilles plastique. « Le dialogue devra être poursuivi avec les collectivités », a pour sa part souligné Marta de Cidrac (LR), souhaitant que le Sénat puisse être associé au travail d'évaluation.
Les sénateurs ont d'ores et déjà prévu de suivre la mise en œuvre de la loi dans le cadre du groupe d'études sur les déchets. Le texte vise encore la fin des emballages en plastique à usage unique en 2040. Colette Mélot (Indépendants) a salué « une avancée », mais aurait préféré que ce soit « plus rapide ». Cet objectif est jugé « irréaliste » par les industriels, mais « trop tardif » par l'ONG WWF qui décrit le projet de loi comme une « occasion manquée de sortir de la société du tout jetable » . Il « ne doit pas nous faire oublier l'urgence climatique, les niveaux de pollution de notre planète et la nécessaire évolution de notre mode de vie », a pour sa part souligné Éric Gold (RDSE à majorité radicale). (Véronique Martinache, AFP)
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