Le Conseil national de la sécurité routière souhaite que les trottoirs soient « réservés » aux piétons
Par Franck Lemarc
Le Conseil national de la sécurité routière (CNSR) est souvent appelé le « Parlement » de la sécurité routière. Composé de 67 membres, il rassemble tous les acteurs concernés : représentants de l’État, élus locaux, gestionnaires de voirie, entreprises, associations d’usagers, services de secours. Le CNSR est présidé par un maire, actuellement celui de Flers (Orne), Yves Goasdoué. C'est Frédéric Cuillerier, co-président de la commission Transports de l'AMF, qui y représente l'association.
Le CNSR se réunit en plénière deux fois par an et élabore, lors de ces réunions, des recommandations au gouvernement.
Parmi les neuf recommandations émises après la plénière du 28 novembre, deux intéresseront particulièrement les maires. Elles concernent les usagers vulnérables des infrastructures urbaines et routières.
Définir légalement les trottoirs
En matière d’infrastructures urbaines, le CNSR rappelle les difficultés de voir cohabiter « toutes les catégories d’usagers dans un espace par nature dense et contraint ». Il constate une « forte hétérogénéité » dans les réalisations des infrastructures, due notamment « au partage des compétences entre plusieurs niveaux de collectivités ».
Par ailleurs, bien dotées des compétences nécessaires, « trop souvent les collectivités locales ne disposent pas des moyens financiers et des qualifications d’ingénierie techniques nécessaires pour engager les plans d’actions en faveur de l’amélioration des infrastructures dévolues à la mobilité ».
Le CNSR pose clairement la question des conflits d’usages entre piétons, cyclistes et utilisateurs des EDPM (trottinettes, hoverboards, gyropodes, etc.), notamment sur les trottoirs. Sa principale recommandation est de donner une définition légale aux trottoirs (ils n’en ont pas aujourd’hui), et de les définir comme « une partie de la voie publique réservée à la circulation et à l’usage du piéton » . Cette définition aura comme conséquence d’interdire, par exemple, de circuler en trottinette sur les trottoirs. Actuellement, comme l'avait souhaité l'AMF pendant la discussion de la loi d'orientation des mobilités, l'accès des EDP aux trottoirs relève de la libre administration des collectivités locales, puisque c'est le maire qui en décide.
Par ailleurs, le CNSR demande que les gestionnaires de voirie soient incités à « élaborer une charte locale d’aménagement de la voirie » . « Cette charte pourra donner lieu à des contrats d’objectifs pluriannuels aux fins de faciliter la mise en œuvre des schémas de transports ou de mobilités dont sont dotés, soit au titre de la loi, soit à raison de leur politique locale les différentes collectivités sur la maille territoriale considérée. »
Le Conseil souhaite également que les collectivités soient incitées à définir « des objectifs chiffrés » de sécurité routière et à « présenter annuellement devant leur instance délibérante une cartographie des accidents corporels survenus sur leur territoire ».
Afin d’inciter les collectivités à emprunter ce chemin vertueux, le CNSR propose que l’État leur donne un bonus de dotation si elles s’y engagent. Une recommandation qui a fait tiquer l'AMF, dans la mesure où les recommandations du Cerema n'ont pas de valeur réglementaire.
Respecter les règles
Concernant les infrastructures routières, le CNSR redonne les chiffres de la mortalité chez les usagers dits vulnérables (deux roues motorisées, piétons, cyclistes et EDPM). Il rappelle que les préconisations du Cerema, en la matière, s’imposent « sur l’ensemble du réseau routier national mais pas sur celui des collectivités territoriales ».
De surcroît, les règles ne sont pas toujours respectées : alors que toutes les agglomérations de plus de 100 000 habitants doivent assurer un suivi de l’accidentalité sur leur territoire, « seul un tiers » des agglos concernées le fait réellement.
Le Conseil se livre donc à un certain nombre de recommandations pour améliorer la sécurité des usagers vulnérables. Parmi celles-ci : « Engager les concertations avec les associations d’élus pour justifier l’absence de prise en compte des recommandations présentes dans les guides du Cerema, lorsque celles-ci peuvent s’appliquer pour toute réalisation de nouveaux réseaux routiers par les collectivités territoriales » . Avec à la clé, la proposition d’une « évolution législative » pour « définir la responsabilité de chacun ». À terme, le CNSR veut faire en sorte que les agglomérations concernées qui n’ont pas d’observatoire de l’accidentalité « se mettent en conformité avec la loi ».
Le CNSR propose également d’améliorer la compétence des acteurs locaux, avec la mise en place de formations dispensées par le Cerema, d’identifier des « collectivités référentes » et de davantage « mutualiser les connaissances ».
Enfin, le Conseil souhaite que les collectivités compétentes soient « incitées (…) à mener des démarches de sécurité routière sur leur réseau structurant le plus circulé et prenant la forme d’inspections de sécurité, d’audit de sécurité pour les nouvelles infrastructures et d’études de sécurité pour les infrastructures existantes, en intégrant la problématique des usagers vulnérables ».
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