Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 23 mars 2021
Sports

La proposition de loi visant à démocratiser le sport en France adoptée à l'Assemblée nationale

Largement inspiré du programme présidentiel d'Emmanuel Macron, le texte, moins fourni qu'espéré par l'opposition, se substitue au projet de loi « Sport et société » promis depuis le début du quinquennat. Pour dynamiser la pratique sportive et lutter contre la sédentarité, il propose notamment d'ouvrir les équipements sportifs scolaires aux utilisateurs extérieurs.

L’Assemblée nationale a adopté, vendredi, la proposition de loi visant à démocratiser le sport en France (31 voix pour, 2 contre et 5 abstentions). Un texte moins ambitieux qu’attendu, à en lire les déclarations des principaux groupes parlementaires. Régis Juanico (Loire, Génération.s) a dit « regretter qu’un texte visant à démocratiser le sport arrive si tard dans la législature, comme une session de rattrapage ». « Nous partions d’un projet de loi “sport et société” [l’intitulé du projet de loi que devait porter initialement le gouvernement a été transformé en proposition de loi, lire Maire info du 27 janvier 2021], mais la proposition de loi actuelle oublie la société », regrette la députée Aude Amadou (Loire-Atlantique), pourtant issue des rangs de la majorité. L'ancienne handballeuse a toutefois voté pour.
La proposition de loi contient seulement onze articles, répartis en trois chapitres : développement de la pratique, gouvernance des fédérations, économie du sport. Le premier chapitre de la proposition de loi « représente justement une relance pour notre secteur, [car] il aidera nos associations à aller chercher de nouveaux adhérents », a répondu, aux détracteurs du texte, la ministre chargée des Sports, Roxana Maracineanu. Il y a urgence en la matière : « comme l’a montré une enquête du CNOSF à l’automne dernier, 74 % des clubs ont déclaré, en moyenne, une perte de 26 % de leurs licenciés en raison de l’épidémie. Pourtant, les collectivités territoriales ont été au rendez-vous : 90 % d’entre elles ont fait le choix de maintenir ou de relever leur soutien financier aux associations sportives », souligne Régis Juanico.

19 000 équipements sportifs situés dans les établissements scolaires accessibles aux associations

Porté par la députée La République en marche des Hauts-de-Seine, Céline Calvez, le texte élargit le champ de la prescription du sport sur ordonnance (*) aux maladies chroniques (au lieu des seules affections de longue durée) et « encourage notamment, dans son article 2, l’utilisation des équipements sportifs des établissements scolaires par des associations, en rendant obligatoire la création d’accès indépendants pour tout nouvel établissement ». « Alors que le texte ne prévoyait à l’origine la création d’un accès séparé qu’en cas de construction de nouveaux collèges et lycées, nous avons élargi le dispositif aux cas de réhabilitation lourde et de construction de nouvelles écoles primaires », se réjouit le député Buon Tan (Paris, La République en marche).
En France, environ 19 000 équipements sportifs sont situés dans les établissements scolaires mais « nous avons tous fait l’expérience de terrains et d’équipements inutilisés le week-end ou pendant les vacances scolaires, quand de l’autre côté du grillage, des associations ou même des jeunes se dépensaient dans des lieux peut-être moins adéquats », justifie Céline Calvez. Cette mise à disposition, précision importante, « n’est possible qu’en dehors des heures d’enseignement ».

« Un accès sécurisé »  mais des questions en suspens

Plusieurs amendements à l’article 2 ont été adoptés en commission. L’un d’eux « prévoit que l’accès des personnes extérieures aux équipements sportifs sera sécurisé », se réjouit Maxime Minot, député Les Républicains de l'Oise. En revanche, « on est également en droit de s’interroger sur les problèmes de responsabilité. En dehors des horaires scolaires, si une personne pratiquant le sport dans un établissement se blesse ou a un accident, ou si les équipements sportifs sont abîmés, à qui reviendra la responsabilité ? », intervient Emmanuelle Ménard (Hérault, non inscrite). J’aimerais donc avoir plus d’informations sur ce que vous entendez faire pour aider les communes, y compris financièrement, toutes n’étant pas logées à la même enseigne. » 
« Toutes les réponses ne sont pas dans la loi, en a convenu Céline Calvez. Elles pourront figurer dans les conventions qui seront passées par les établissements. La loi elle-même ne va pas modifier le régime de responsabilité, les établissements étant toujours invités à le définir par convention. » 

« Un plus grand nombre de bénéficiaires » 

L’accès aux équipements sportifs dans les établissements scolaires pourra, par ailleurs, être autorisé « pour les besoins de l’éducation populaire, de la vie citoyenne, des pratiques sportives, culturelles et artistiques, non seulement par des associations, mais aussi par des entreprises, ajoute Céline Calvez. Cela autorisera en effet le passage de conventions avec un plus grand nombre de bénéficiaires ». La convention précisera aussi la tarification.
La mise à disposition des équipements sportifs existants dans l’enceinte de l’établissement scolaire aux associations sportives et entreprises locales est, pour rappel, l’un des quatre volets constitutifs du dossier de candidature à la labellisation des écoles et des établissements scolaires. Depuis janvier 2018, le déploiement de la labellisation « Génération 2024 »  à pour objectif de valoriser et renforcer les passerelles entre l’institution scolaire et le mouvement sportif.

Des plans sportifs locaux dans les communes et intercommunalités

L’article 3 « ouvre aux communes et aux intercommunalités la possibilité d’élaborer des plans sportifs locaux. L’idée est d’associer toutes les parties prenantes pour établir un parcours sportif global tout au long de la vie des citoyens qui fréquentent ces territoires. Ce niveau local viendra alimenter les diagnostics territoriaux des conférences régionales du sport, qui sont en ce moment même en train de s’installer. » « L’article a été réécrit en commission, explique la députée Laurence Trastour-Isnart (Alpes-Maritimes, Les Républicains), afin de décliner à l’échelle infrarégionale la gouvernance territoriale du sport, en associant, pour l’élaboration du plan sportif local, les acteurs du mouvement sportif, les associations œuvrant au développement de l’activité physique et sportive, les représentants des services déconcentrés de l’État, les personnes intéressées par le développement du sport, les représentants des associations sportives scolaires, les représentants des services et établissements médico-sociaux, ainsi que les représentants des établissements publics de santé. »  Se pose quand même la question de l’articulation de ces plans sportifs territoriaux avec ceux des conférences régionales du sport (CRS). La démultiplication d’instances outils pourrait nuire à la lisibilité des dispositifs.
L’article 4 complète, enfin, le champ des thématiques dont ces conférences doivent se saisir, en ajoutant aux contenus les savoirs sportifs fondamentaux ou encore le sport santé. En commission, l’objectif de lutte contre les discriminations a été précisé avec l’ajout de la thématique de l’intégration sociale et professionnelle par le sport.
Charge maintenant au Sénat de programmer l’examen de cette proposition de loi avant la fin de la législature.

Ludovic Galtier

*Malgré la création d’un réseau de communes engagées en faveur du sport sur ordonnance, l’AMF regrette que les collectivités ayant mis en œuvre ce dispositif ne soient pas accompagnées par les ministères et les ARS. Elle note également le besoin des collectivités de disposer d’outils leur permettant de développer une offre d’équipements de sport santé.

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