L'affichage électoral sur des véhicules est illégal, rappelle le Conseil d'ÉtatÂ
Par Franck Lemarc
Cela fait des années que les tribunaux statuent sur cette question, et leur réponse est relativement constante : il est interdit de faire circuler un véhicule recouvert de publicités électorales. La technique, très utilisée aux États-Unis, consistant à floquer un véhicule (souvent des autocars) aux couleurs d’un candidat, ou d’y apposer des slogans et/ou photos, n’est pas licite en France, puisqu’elle constitue un affichage en dehors des panneaux réservés à cet effet. Un candidat vient encore d’en faire les frais, au titre de la campagne des régionales de 2022.
Jurisprudence claire
La jurisprudence sur ce point s’appuie sur l’articler L51 du Code électoral, qui dispose que les communes doivent mettre à disposition, pendant la période électorale, des « emplacements spéciaux pour l’apposition d’affiches électorales ». Et surtout : « Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, tout affichage relatif à l'élection (…) est interdit en dehors de cet emplacement ».
Dans de nombreux cas ces dernières années, des tribunaux administratifs ont dû se prononcer sur le cas de candidats qui étaient passés outre cette interdiction, en faisant circuler dans des communes des « véhicules de campagne » décorés ou floqués avec des slogans électoraux.
Toutefois, comme l’a par exemple rappelé le tribunal administratif de Nantes en 2021, le constat d’une telle infraction ne conduit pas mécaniquement à l’annulation d’une élection. Le tribunal jugeait du cas d’une élection municipale lors de laquelle un candidat a utilisé pendant la campagne « un véhicule utilitaire (…) sur lequel étaient apposés des adhésifs de propagande électorale ». Le tribunal a constaté que cette pratique était contraire à l’article L51 du Code électoral, mais n’a pas pu établir « la fréquence de circulation du véhicule » et donc le « caractère massif » de la faute. Il a donc jugé que cette pratique, « pour regrettable qu’elle soit », n’avait pas altéré la sincérité du scrutin. Il s’agit bien néanmoins d’un « abus » et « d’affichage sauvage ».
Mais attention, dans le cas d’une victoire d’une très courte tête, à quelques voix près, dans une élection locale, un tribunal pourrait très bien s’appuyer sur un tel « abus » pour annuler une élection, relève l’avocat Éric Landot, qui récapitule toute la jurisprudence sur son blog.
Remboursement de dépenses électorales
Autant qu’il fallait une certaine audace – ou une grande méconnaissance du Code électoral – pour réclamer le remboursement des frais occasionnés par cette pratique. C’est ce qu’a fait un candidat à l’occasion des élections régionales de 2022, dans le Grand est. Ce candidat, pendant toute la campagne, a fait circuler « un bus » floqué avec « sa photographie et celle de la présidente de son parti ». Mais non content de commettre une infraction au Code électoral, ce candidat a inscrit dans ses comptes de campagne une somme de 12 880 euros correspondant aux frais de flocage du bus.
La Commission des comptes de campagne a, assez logiquement, considéré qu’il s’agissait d’une dépense irrégulière, et retiré cette somme du montant remboursable au candidat, puisqu’il avait obtenu plus de 5 % des suffrages). Cette décision a été contestée par le candidat devant un tribunal administratif qui, moins logiquement, a donné raison au candidat. La Commission des comptes de campagne a fait appel, et l’affaire est montée jusqu’au Conseil d’État, qui a tranché définitivement le 19 septembre dernier : il a donné raison à la Commission des comptes de campagne, et clairement établi que l’État ne peut pas rembourser une dépense de campagne irrégulière.
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