Inflation : les modalités d'application du « filet de sécurité » détaillées par décret
Par A.W.
Les derniers détails du « filet de sécurité » destiné aux collectivités pour l’année 2023 ont été publiés dans un décret paru en fin de semaine dernière. Il vient ainsi préciser les modalités de calcul et de versement de la dotation octroyée pour compenser les hausses de dépenses que subiront, cette année, les collectivités « du fait de l'augmentation des prix de l'énergie, de l'électricité et du chauffage urbain ».
Perte d’épargne brute de « plus de 15 % »
Reconduit cette année pour les communes et leurs groupements, et étendu aux départements et aux régions (mais concernant aussi la Ville de Paris, la métropole de Lyon, la collectivité de Corse, le département de Mayotte, la collectivité territoriale de Guyane et la collectivité territoriale de Martinique), ce filet de sécurité ne bénéficiera qu’à ceux qui répondront aux deux critères inscrits dans la loi de finances pour 2023 afin de faire face à la flambée des prix de l’énergie.
D’abord, les collectivités devront avoir subi, en 2023, une perte d’épargne brute (la différence entre leurs recettes réelles et leurs dépenses réelles de fonctionnement) de « plus de 15 % » par rapport à l’année 2022.
Ensuite, certains seuils de richesse ne devront pas être dépassés. Dans le détail, les communes devront, pour être éligibles à ce dispositif, avoir un potentiel financier par habitant « inférieur à deux fois le potentiel financier moyen par habitant de l’ensemble des communes appartenant au même groupe démographique ». S’agissant des EPCI, leur potentiel fiscal par habitant devra être « inférieur, l’année de répartition, à deux fois le potentiel fiscal par habitant moyen des établissements appartenant à la même catégorie ».
Le montant de la dotation correspondra, dès lors, à « 50 % de la différence entre l’augmentation des dépenses d’approvisionnement en énergie, électricité et chauffage urbain entre 2023 et 2022 et 50 % de celle des recettes réelles de fonctionnement » sur la même période.
Le décret précise qu’elle devra être versée « au plus tard le 31 juillet 2024 ».
À noter que les dépenses énergétiques à comptabiliser sont celles « du budget principal et des budgets annexes », ainsi que celles consenties « au titre des subventions consenties aux fermiers et aux concessionnaires ».
Acompte : jusqu’à 50 % du montant de la dotation
Pour ne pas attendre cette échéance lointaine, les collectivités qui s’estiment éligibles peuvent demander le versement d’un acompte, « avant le 15 octobre » 2023 (et non jusqu’au 30 novembre comme l’indiquait initialement la loi de finances 2023), auprès du « représentant de l'État dans le département » et du « directeur départemental des finances publiques ».
Son montant correspondra à « 30 % de la dotation prévisionnelle », mais pourra être porté « jusqu'à 50 % sur demande de la collectivité ». Quoi qu’il en soit, il ne pourra être inférieur à 1 000 euros et sera notifié « au plus tard » le 15 novembre.
Cependant, dans le cas où le montant définitif de la dotation serait inférieur à celui estimé pour le calcul du versement de l'acompte, la différence fera « l'objet d'un reversement au plus tard le 30 juillet 2024 ». Lorsque l'acompte sera supérieur au montant de la dotation définitive, le reversement de l’excédent s'effectuera via « un prélèvement sur les avances mensuelles de fiscalité ».
« Insuffisant » et « inadapté »
Après avoir simplifié ce dispositif tout au long de la discussion budgétaire, le gouvernement avait suspendu, en février, la parution du décret devant la contestation des associations d’élus et du Comité des finances locales (CFL) qui considéraient ce « filet de sécurité » comme « insuffisant » au regard de l’inflation, et « trop complexe » s’agissant de ses règles d’application.
« L’AMF conteste ce filet dont les mailles sont bien trop larges et qui, de plus, n’intègre pas les services publics industriels et commerciaux (Spic) dans le dispositif », expliquait notamment le président du CFL et premier vice-président délégué de l’AMF, André Laignel.
Peine perdue. Lors de la présentation de la nouvelle mouture du projet de décret, mi-avril, le CFL avait émis un avis consultatif défavorable, à l’unanimité de ses membres. Toujours pas convaincus, les élus locaux faisaient les mêmes reproches au gouvernement que deux mois auparavant. À savoir, un projet de décret « bien plus restrictif que ce que prévoit la loi ».
« Dans la nouvelle version soumise au CFL, seules les dépenses liées aux transports ferroviaires ont été ajoutées au périmètre des dépenses éligibles. Ainsi, ni les autres dépenses de transport, ni l’impact de l’inflation sur les prix de l’énergie dans les lycées [mais aussi dans les collèges, NDLR] ne relèvent de ce filet de sécurité, dont la mise en œuvre technique sera inadaptée », déplorait ainsi, en avril dernier, Régions de France.
On peut également rappeler que, lors de la discussion budgétaire, les sénateurs avaient également estimé que le critère portant sur la perte d’épargne brute était « non pertinent », le jugeant « très fortement excluant » et « générateur de forts effets de seuil ».
Ce filet de sécurité est l’un des trois dispositifs mis en place par le gouvernement pour atténuer la hausse des prix de l’énergie, avec le bouclier tarifaire et l’amortisseur électricité.
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