Guadeloupe : ce qui ressort de la rencontre entre les élus guadeloupéens et Jean Castex
Par Lucile Bonnin
La situation est extrêmement tendue en Guadeloupe. Comme le relatait Maire info hier, voilà plusieurs jours maintenant que le territoire connaît des manifestations violentes, animées par une colère des habitants contre les règles sanitaires et contre la précarité qui perdure en Guadeloupe.
À la demande des élus de l’archipel, le Premier ministre, Jean Castex, accompagné du ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu et du ministre de la Santé Olivier Véran, a organisé une réunion afin de leur permettre « d’exposer leur analyse de la situation sur place » .
« L’objectif que nous nous sommes fixé était de trouver des solutions qui conviennent à tous, c’est-à-dire sans contrevenir à l’application de la loi et sans non plus arriver à des frustrations ou encore à des sanctions pécuniaires vis-à-vis des publics concernés » , explique ce matin à Maire info Jocelyn Sapotille, maire de Lamentin et président de l'association des maires de Guadeloupe, qui a participé à la réunion.
Des actes violents condamnés unanimement
« Je le dis clairement, rien ne peut justifier de tels actes qui se servent de la crise sanitaire comme d’un prétexte, a insisté Jean Castex avec grande fermeté. Il ne s’agit pas seulement d’exprimer une opposition à l’obligation vaccinale des soignants et aux mesures de suspension que nous avons prises pour les 1400 professionnels qui se sont soustraits à ce jour à cette mesure sanitaire. Il s’agit surtout désormais d’agresser et de piller. »
Un avis évidemment largement partagé par les élus présents à Matignon ce lundi soir. « Nous ne pouvons pas cautionner les barrages, les feux, ou le pillage des magasins, déclare Jocelyn Sapotille. Il faut arrêter cela immédiatement ! Mais la seule réponse face à cela ne peut pas être uniquement sécuritaire. Il faut apporter des solutions et nous avons proposé des idées concrètes notamment pour les personnels de santé. »
Quelles solutions ?
Les élus guadeloupéens ont formulé trois propositions au gouvernement. Entre 1 300 et 1 400 personnes soumises à l’obligation vaccinale ont été suspendues à ce jour en Guadeloupe. « Il y a un premier public qui dit qu’il ne veut pas du vaccin ARN messager mais qui ne refuse pas la vaccination. Il faut qu’on puisse leur proposer un autre vaccin. Sur ce point-là nous avons été entendus et écoutés. » Le Premier ministre a indiqué son accord pour envisager le fait de rendre accessible le vaccin AstraZeneca ou Janssen.
Selon les élus, certains souhaitent encore attendre avant de se faire vacciner. « Nous avons voulu fixer un délai supplémentaire pour que le personnel soignant puisse continuer à travailler en présentant toutes les 72 heures un test PCR négatif. Sur cette solution nous avons eu une réponse négative de la part du gouvernement. »
D’autres refusent catégoriquement le vaccin. Les élus ont alors proposé un délai jusqu’à fin décembre « pour leur permettre une reconversion professionnelle. Malheureusement, sur ces points nous n’avons pas été entendus et nous le regrettons. »
L’exécutif reconnaît la nécessité de créer un dialogue avec « nos concitoyens qui s’interrogent de bonne foi » . Jean Castex a annoncé la création d’une « instance de dialogue » afin de « convaincre et d’accompagner individuellement, humainement » les professionnels concernés par l’obligation vaccinale.
Autre annonce, concernant les sapeurs-pompiers : leurs tests PCR seront pris en charge par le conseil départemental, leur autorité de tutelle. « Ils ne seront pas suspendus et pourront continuer à travailler en présentant un test PCR négatif » , explique Jocelyn Sapotille.
Un problème avant tout économique et social
La colère qui s’exprime actuellement en Guadeloupe n’est pas simplement liée aux décisions sanitaires prises par le gouvernement. De nombreuses problématiques nécessitent un dialogue entre le gouvernement et les autorités locales pour « gérer les conséquences de la crise mais aussi pour favoriser la relance de l'emploi et de l'activité en Guadeloupe. »
« Nous avons demandé au gouvernement, tout comme cela a été fait pour Marseille, qu’il travaille sur un plan de relance rapide et immédiat, raconte le président des maires de Guadeloupe. C’est ce que nous avons demandé pour la population. »
Autre problème remonté plusieurs fois lors des échanges : le chômage. « Nous avons demandé au gouvernement, pour la jeunesse guadeloupéenne qui demande du travail, de donner la main aux maires, au président du conseil régional, au président du conseil départemental, pour pouvoir écouter notre jeunesse et présenter des solutions contre la grande difficulté du chômage. »
C’est dans ce cadre que Sébastien Lecornu se voit confier la mission « de poursuivre le dialogue avec les élus et les forces vives du territoire qui sont pleinement engagés pour le retour au calme. » Pour Jocelyn Sapotille, « le dialogue et la négociation doivent se poursuivre avec l’État. Sur la question économique et sociétale, il faut travailler ensemble et rapidement pour offrir des perspectives à la jeunesse. Si nous ouvrons ces chantiers-là, et si la méthode de travail implique profondément le niveau local, nous allons pouvoir proposer des solutions pour améliorer la situation. »
« Nous avons eu en face de nous un ministre des Outre-mer dont nous saluons la volonté d’approfondir la question, rapporte Jocelyn Sapotille. Nous aurions souhaité que tous les services de l’État soient dans ce même état d’esprit car nous n’avons pas senti cet engagement de la part de tous. »
On ignore en particulier, ce matin, quelles solutions le gouvernement envisage d’apporter à des problèmes qui exaspèrent au quotidien les habitants de l’île, en particulier celui de l’approvisionnement en eau. Les réponses viendront, peut-être, de la mission confiée à Sébastien Lecornu.
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