Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mercredi 15 janvier 2025
Gouvernement

François Bayrou veut « rendre du pouvoir au terrain »

Lors de sa déclaration de politique générale, hier, le Premier ministre a affirmé sa volonté d'alléger le poids de la bureaucratie. Il a promis de faire avancer des chantiers législatifs importants pour les collectivités (eau et assainissement, statut de l'élu…). L'effort budgétaire qui leur sera demandé cette année sera réduit par rapport au projet de Michel Barnier. . 

Par Xavier Brivet

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© Ass. nationale

[Article initialement paru sur le site de Maires de France.]

« Notre bureaucratie est trop lourde et nuisible au développement de notre pays (…). Le gouvernement s’engagera dans un puissant mouvement de débureaucratisation », a annoncé le Premier ministre, le 14 janvier, lors de sa déclaration de politique générale. Devant les députés, François Bayrou a indiqué que cette politique de simplification doit permettre de « rendre du pouvoir au terrain »  et de lutter contre le poids des normes, « qui paralyse la croissance du pays ». « Les acteurs de terrain devront redéfinir eux-mêmes, en partenariat avec l’État, les simplifications, suppressions et allégements d’obligations utiles », a-t-il expliqué en citant les collectivités. 

Parallèlement, le chef du gouvernement a annoncé la création d’un fonds spécial « entièrement dédié à la réforme de l’État », estimant que les « 1 000 agences ou organes de l’État constituent un labyrinthe dont un pays rigoureux peut difficilement se satisfaire ». Ce fonds sera financé par des actifs « en particulier immobiliers, qui appartiennent à la puissance publique, de façon à pouvoir investir, par exemple, dans le déploiement de l’intelligence artificielle dans nos services publics », a-t-il précisé.

Compétence eau et assainissement, statut de l’élu…

François Bayrou estime que « les collectivités locales doivent avoir (…) une place centrale ». Il veut donc « conforter les avancées très attendues sur des sujets comme l’eau, l’assainissement, le statut et la protection des élus », des sujets sur lesquels « les initiatives parlementaires prises en ce sens devront aboutir ». Ces engagements avaient déjà été pris par son prédécesseur à Matignon, Michel Barnier, avant la censure de son gouvernement début décembre. Pour mémoire, ce dernier s’était prononcé pour la suppression du transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux communautés de communes au 1er janvier 2026. Une promesse que devait entériner la proposition de loi déjà votée en première lecture par le Sénat, le 29 avril 2024, en instance d’examen à l’Assemblée nationale. 

Concernant le renforcement du statut de l’élu – déterminante à un an des prochaines élections municipales –, là encore, le Sénat avait adopté, le 7 mars 2024, une proposition de loi portée par Françoise Gatel, actuelle ministre déléguée chargée de la Ruralité dans le gouvernement de François Bayrou. Les députés pourraient donc repartir de ce texte et y intégrer les mesures contenues dans une autre proposition de loi portée les députés Violette Spillbout et Stéphane Delautrette, déposée le 17 septembre dernier.  

Budget : réduction de l’effort demandé aux collectivités

Le Premier ministre a rappelé que les collectivités locales « portent 70 % de l’investissement de notre pays », en soulignant leur « effort précieux ». Dans ce contexte, « l’effort demandé aux collectivités [dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025] sera ramené de 5 milliards prévu initialement à 2,2 milliards d’euros en 2025 ». Pour mémoire, dans le cadre de l’examen du PLF pour 2025 interrompu par la censure du gouvernement Barnier, les sénateurs avaient abaissé l'effort des collectivités à ce même niveau (2,2 milliards d'euros) en réduisant notamment de trois à un milliard d’euros le montant du fonds de réserve (lire article ci-contre). 

Soulignant l’urgence d’adopter les textes budgétaires pour 2025, François Bayrou a précisé que le gouvernement ambitionne de ramener cette année le déficit public à « 5,4 % du PIB », avec l’objectif de le réduire « à 3 % en 2029 ». 

Corse et Outre-mer

Le Premier ministre veut tenir compte des « spécificités »  de certaines collectivités au premier rang desquelles la Corse et les Outre-mer. Pour la Corse, « un calendrier a été fixé (…) pour aboutir à une évolution constitutionnelle fin 2025 ». S’agissant des Outre-mer, parallèlement au plan « Mayotte debout », François Bayrou a souhaité qu’en Nouvelle-Calédonie, marquée par des violences depuis le printemps 2024, « le processus politique reprenne avec des négociations qui devront aboutir à la fin de ce trimestre ». 

Il a promis la définition, « pour chaque territoire d’Outre-mer », d’un « plan de développement et de financement dans le cadre d’un nouveau comité interministériel des Outre-mer », sans préciser de date.  

Réforme du scrutin législatif et cumul des mandats 

François Bayrou a proposé d'avancer « sur la réforme du mode de scrutin législatif », avec « un principe de proportionnelle », soulignant qu'il devra « être enraciné dans les territoires ». Cette réforme, « probablement », « nous obligera à reposer en même temps la question de l'exercice simultané d'une responsabilité locale et nationale », a ajouté le Premier ministre, plus de dix ans après la suppression du cumul des mandats. 

Sécurité et logement

François Bayrou a abordé de très nombreux autres sujets parmi lesquels la sécurité et le logement. Sur le premier sujet, il a souligné la nécessaire « restauration de l’autorité de l’État »  en renforçant notamment « la présence des forces de sécurité sur le terrain à travers de nouvelles brigades de gendarmerie, par exemple ». Sur le second, le Premier ministre s’est prononcé pour « une politique du logement repensée et de grande ampleur ». « Nous pouvons aller plus loin encore en réduisant les délais, en allégeant les demandes d’autorisation, en favorisant la densification, en facilitant les changements d’usage », a-t-il estimé, ajoutant que « cela suppose de relancer l’investissement locatif et l’accession à la propriété, de soutenir les élus bâtisseurs par un système d’encouragement à l’investissement ». 

Retraite : la réforme remise sur le métier

S’agissant des retraites, le Premier ministre a indiqué remettre la réforme « en chantier », en assurant qu'il n'y a « aucun tabou, même pas l'âge de départ »  à condition de préserver l’équilibre financier du système. Le chef du gouvernement va « demander à la Cour des comptes une mission flash de quelques semaines »  en vue d'établir « un constat »  fondé sur « des chiffres indiscutables ». Une « délégation permanente »  réunissant notamment les partenaires sociaux, disposera alors « de trois mois »  pour formuler des propositions. En cas d’accord sur de nouvelles pistes de réforme, « nous l’adopterons, le Parlement en sera saisi lors du prochain projet de loi de financement [de la Sécurité sociale] ou avant et, si nécessaire, par une loi ». En cas de désaccord, « c’est la réforme actuelle qui continuerait à s’appliquer ». 

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