Maire-info
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Édition du mardi 21 septembre 2021
Gestion locale

Bail emphytéotique : le Conseil d'État précise certaines modalités de cession de bâtiments

Afin d'éviter de réaliser une vente à vil prix, le conseil municipal doit être suffisamment informé afin de prendre en compte la valeur des éventuelles renonciations, estime le Conseil d'État.

Par A.W.

Dans une décision rendue la semaine passée, le Conseil d'Etat confirme qu’une commune ne peut pas vendre un bien immobilier lui appartenant pour un prix inférieur à sa valeur, en apportant des précisions sur les modalités de cession dans le cas d’un bail emphytéotique.

En 2010, la société Dourdan Vacances a souhaité acquérir, dans le cadre d’un projet de rénovation, les parcelles de terrain mises à sa disposition depuis 1962 - et pour une durée de 60 ans - par la commune de Dourdan (Essonne). Cette dernière a ainsi approuvé la vente de ces parcelles sur lesquelles l’entreprise a construit un village de vacances dont elle a encore la gestion, et ceci avant la fin du bail emphytéotique conclu dans les années 1960. Un bail qui stipulait, toutefois, « qu'à son expiration, la commune acquerrait la propriété des constructions édifiées par l'emphytéote sans avoir à lui verser d'indemnité ».

Information précise et complète

Une délibération jugée illégale par « Monsieur B. », conseiller municipal, qui a donc attaqué la commune et obtenu son annulation auprès de la cour administrative d’appel de Versailles en janvier 2020. Une décision confirmée par les troisième et huitième chambres réunies du Conseil d’Etat le 13 septembre dernier, après les pourvois de la commune et de la société. 

Le Conseil d’Etat estime ainsi que s'il était « loisible »  à la commune de renoncer à la propriété des constructions édifiées par Dourdan Vacances sans avoir à lui verser d'indemnité, « le conseil municipal - auquel il incombait d'apprécier si le projet de vente respectait le principe selon lequel une collectivité publique ne peut pas céder un élément de son patrimoine à un prix inférieur à sa valeur à une personne poursuivant des fins d'intérêt privé - ne pouvait délibérer sans prendre en compte la valeur d'une telle renonciation ». 

En effet, le prix de cession retenu pour les terrains en cause (1 million d’euros) rejoignant « sensiblement l’estimation retenue par le service des domaines pour les seuls terrains sans les constructions existantes »  (994 000 euros), la question était de savoir si la valeur des constructions devant initialement devenir la propriété de la commune, à l'issue du bail emphytéotique, était suffisamment prise en compte. 

Or, selon le Conseil d’Etat, la note explicative de synthèse adressée aux membres du conseil municipal, conformément au Code général des collectivités territoriales (CGCT), ne comportait « aucun élément permettant d'apprécier la valeur de la renonciation à ce droit », d’autant que « les avis émis par le service des domaines ne comport[ait] par ailleurs aucun élément à cet égard et se born[ait] à évaluer les terrains d'assiette ».

Dans ces conditions, explique le Conseil d’Etat, « les membres du conseil municipal n'ont pas été mis à même d'apprécier si la différence [6 000 euros] entre le prix envisagé [1 million d’euros] et l'évaluation fournie par le service des domaines [994 000 euros] pouvait être regardée comme représentative de l'indemnité due à la commune pour sa renonciation au droit d'accession, et par suite si un élément de son patrimoine ne serait pas cédé à un prix inférieur à sa valeur ». 

Avec cette décision, le Conseil d’Etat rappelle que les délibérations liées à la gestion du patrimoine doivent être assorties d’une information particulièrement précise en direction des membres du conseil municipal afin que ceux-ci puissent apprécier correctement la valeur des éventuelles renonciations lors d’une cession.

Télécharger la décision.

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