Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 21 février 2020
Fonction publique

Réforme des retraites : décryptage du « mémorandum » adressé par les employeurs territoriaux au Premier ministre

Les employeurs territoriaux sont inquiets. Ils redoutent que la réforme des retraites ait un impact négatif sur les pensions versées à leurs agents et qu’elle affecte durablement les finances, déjà très tendues, des collectivités locales. Dans un « mémorandum »  adressé le 13 février 2020 au Premier ministre et aux parlementaires, la Coordination des employeurs publics territoriaux, qui rassemble onze associations d’élus et institutions représentatives des collectivités (1), recense, point par point, toutes les menaces que le futur système universel de retraite (SUR) fait peser sur la sphère territoriale.


« Exigences majeures » 
Le mémorandum adressé à Édouard Philippe pointe « deux exigences majeures (qui) constituent le socle des demandes de la Coordination ». Les employeurs refusent par avance de voir la réforme des retraites « alourdir la charge de fonctionnement des collectivités »  et ils déclarent s’opposer à toute mesure « qui porterait atteinte au niveau des pensions des agents territoriaux et à la prise en charge des risques inhérents à leurs pratiques professionnelles ». Le document, qui accompagne une lettre très argumentée, met par ailleurs en exergue cinq thèmes que la Coordination souhaite aborder à l’occasion des débats parlementaires.
Il s’agit d’abord de rendre plus visibles les conséquences de la réforme pour les finances publiques locales. Les employeurs territoriaux s’inquiètent notamment des conséquences que pourrait avoir l’élargissement de l’assiette des cotisations. Aujourd’hui de 30,65 %, le taux de cotisation passerait à 28,12 % mais sur une assiette élargie intégrant notamment le régime indemnitaire, et répartie à 60 % pour les employeurs et 40 % pour les agents. Par ailleurs, les employeurs redoutent que la réforme leur fasse « prendre transitoirement en charge une part plus importante des cotisations que celle prévue en cible, afin d’éviter des baisses de salaire net des fonctionnaires ».
Autre motif d’inquiétude : le recul de l’âge effectif de départ à la retraite appliqué aux personnels territoriaux (qui constituent déjà la catégorie de fonctionnaires ayant un âge de départ à la retraite le plus élevé en moyenne) pourrait entraîner les employeurs des collectivités à territoriaux à « assumer une charge salariale de fin carrière supplémentaire par rapport au système actuel ».  Enfin, la Coordination estime ne pas avoir suffisamment de visibilité sur les conséquences financières des nouvelles mesures en matière de pénibilité, invalidité, sur-cotisations, etc, ni sur l’évaluation du « gain »  attendu du fait de la baisse progressive annoncée du taux de cotisation vers le « taux cible ».

 
Manque de lisibilité
Le mémorandum pointe également le manque de lisibilité des conséquences de la réforme pour les fonctionnaires peu ou pas primés (notamment ceux de la catégorie C), dont la carrière était ascendante, et qui verront leur pension baisser. En effet, le gain de l’intégration des primes dans l’assiette de cotisation ne sera pas proportionné à la perte prévisible entre le nouveau dispositif proposé (prenant en compte la totalité de la carrière) par rapport au dispositif actuel (75 % du traitement brut indiciaire des 6 derniers mois). Une évolution qui pourrait également porter un coup à « l’ascenseur social », dans la mesure où la logique de progression des carrières par la voie du concours et de la promotion interne serait pénalisée par le changement de système. 
De nombreux autres questions préoccupent la Coordination (modalités de calcul des droits acquis pour les agents nés après 1975 et avant 2004, manière dont seront prises en compte les spécificités de la pénibilité et de l’usure professionnelle dans les métiers de la FPT, élargissement du régime de retraite anticipée des sapeurs-pompiers à d’autres métiers dangereux…). En conclusion, les employeurs territoriaux déplorent avoir été « trop tard et insuffisamment associés au débat »  et s’interrogent sur le devenir de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) et sa place dans le futur dispositif.

Emmanuelle Quémard

Télécharger le mémorandum

(1) AMF, ADF, Régions de France, ADCF, France Urbaine, Villes de France, APVF, AMRF, CNFPT, FNCDG, Collège employeurs du CSFPT.

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