Prime pouvoir d'achat dans les collectivités territoriales : le décret est paru
Par Franck Lemarc
Malgré le rejet unanime de ce texte par les organisations syndicales, le gouvernement a publié, au Journal officiel d’hier, le décret « portant création d'une prime de pouvoir d'achat exceptionnelle pour certains agents publics de la fonction publique territoriale » .
Ce texte fait suite aux annonces faite début juin dernier par le gouvernement pour soutenir le pouvoir d’achat des fonctionnaires : hausse du point d’indice de 1,5 %, rehaussement progressif des plus bas salaires (« bas de grille » ), attribution de 5 points d’indice supplémentaires pour tous les agents de la fonction publique au 1er janvier 2024, reconduction de la Gipa (garantie individuelle de pouvoir d’achat) pour 2023. Et enfin, une « prime exceptionnelle de pouvoir d’achat » d’un montant maximum de 800 euros brut, pour les agents touchant moins de 3 250 euros brut par mois (39 000 euros brut annuels).
Si cette prime est obligatoire pour les agents des versants État et hospitalier, elle est facultative pour les agents de la fonction publique territoriale, principe de libre administration oblige. Les organes délibérants des collectivités et EPCI sont donc libres de voter, ou pas, cette prime pour leurs agents.
Modalités
Le décret paru hier donne les modalités pour ceux qui choisissent de verser cette prime.
Les agents susceptibles de la recevoir sont « les agents publics de la fonction publique territoriale et les assistants maternels et assistants familiaux » employés par les collectivités et leurs groupements. Sont en revanche exclus du bénéfice de cette prime les (rares) agents qui touchent déjà la prime de partage de la valeur (dite prime Macron) et les élèves et étudiants en stage.
La prime est accessible aux agents recrutés avant le 1er janvier 2023, et étant encore en emploi au 30 juin. Le plafond de 39 000 euros annuels s’entend sur la période courant du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023.
Dans le cas des agents employés par plusieurs collectivités, la prime sera versée par chaque employeur, au prorata de la rémunération versée, sous réserve bien sûr d’une délibération dans ce sens.
Les montants s’échelonnent de 300 à 800 euros bruts, en fonction de la rémunération brute perçue par les agents, selon le tableau suivant :
Il s’agit, répétons-le, de plafonds. Les employeurs sont donc libres de verser des primes inférieures.
Le montant de la prime est « réduit à proportion de la quotité de travail et de la durée d'emploi sur la période mentionnée ».
La prime devra être versée, « en une ou plusieurs fractions », avant le 30 juin 2024 – cette précision ayant été ajoutée en dernière minute par le gouvernement.
Enfin, une précision importante figure dans la foire aux questions que la DGAFP a publiée l’été dernier : cette prime est « soumise aux cotisations et contributions de Sécurité sociale ainsi qu’à l’impôt sur le revenu ». Contrairement à la « prime Macron », elle n’est donc pas exonérée de cotisations et d’impôts, ni pour l’employeur ni pour l’agent.
Les syndicats vent debout, les employeurs publics satisfaits
Le dispositif a été unanimement décrié par les organisations syndicales, qui dénoncent le fait que la prime ne soit pas obligatoire comme dans les deux autres versants de la fonction publique. Le 20 septembre d’abord, puis le 4 octobre, les syndicats ont boycotté le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, devant lequel était présenté le projet de décret, pour dire leur colère. Dans un communiqué commun, le 4 octobre, les six organisations représentatives expliquent qu’elles refusent de participer au vote sur ce texte « dans la mesure où aucune de (leurs) demandes amendements n’ont été prises en compte » . « L’absence de montants fixes et l’absence d’obligation de versement » conduisent, estiment les organisations syndicales, à faire de la fonction publique territoriale « une sous-catégorie » de la fonction publique, car « l’inflation (…) ne fait aucune différence entre les différents versants de la fonction publique ».
Du côté des employeurs publics, en revanche, on se montre plutôt satisfait. Lors de la séance du Conseil national d’évaluation des normes (Cnen) du 5 octobre, les représentants des élus se sont « réjouis que la décision soit laissée aux collectivités » et que les « besoins des employeurs territoriaux aient été pris en compte », notamment sur le fait que la prime puisse être versée en deux fois, « pour faire face aux contraintes budgétaires des collectivités ».
Les élus ont néanmoins fait remarquer que « la mise en place de cette prime ne pallie pas le problème structurel de la rémunération des agents territoriaux », et a rappelé la nécessité de discussions plus générales sur la refonte des grilles.
Maintenant que le décret est paru, les organes délibérants vont pouvoir délibérer sur l’attribution, ou non, de cette prime à leurs agents. À noter qu’avant la délibération, il est nécessaire de consulter le Comité social territorial pour avis.
Prochaine étape à préparer, ensuite : l’augmentation de cinq points d’indice du traitement de tous les agents, au 1er janvier prochain. Cette mesure sera, en revanche, obligatoire y compris dans la fonction publique territoriale.
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