Temps de travail des agents, Rifseep, vacataires : le gouvernement durcit le ton vis-Ã -vis des employeurs territoriaux
Par Franck Lemarc
L’instruction est signée de Jacqueline Gourault et Amélie de Montchalin, ministres des Relations avec les collectivités, pour l’une, et de la Transformation et de la Fonction publiques, pour l’autre. Chose pas si fréquente, les ministres demandent aux préfets de se tenir prêts à dégainer la procédure leur permettant « d’abroger une délibération » si celle-ci n’est plus en conformité avec la loi.
Temps de travail
C’est d’abord sur le temps de travail des agents que les ministres mettent l’accent : elles rappellent que l’article 47 de la loi de transformation de la fonction publique donne aux communes et EPCI jusqu’au 1er janvier prochain pour délibérer sur le temps de travail – avec en ligne de mire le passage, dans le plus grand nombre de cas possible, aux 1607 heures de travail. Il reste possible de déroger à la règle des 1607 heures annuelles en cas de « sujétions particulières propres à certaines catégories de personnel », comme la pénibilité, mais le gouvernement a clairement choisi de serrer la vis sur le temps de travail des agents. Avec, à la clé, des conflits qui se durcissent, comme celui qui est actuellement en cours chez les agents de la métropole Aix-Marseille -Provence.
Les ministres admettent que les négociations sur ce sujet aient pu prendre du retard du fait de la crise sanitaire, mais exigent qu’elles se concluent « à une date permettant une mise en œuvre effective des nouvelles règles au plus tard le 1er janvier 2022 ». Elles donnent donc instruction aux préfets de demander aux collectivités « la transmission des délibérations en vigueur portant sur le temps de travail » et, le cas échéant, de mettre en œuvre la procédure leur permettant d’abroger ces délibérations.
Ce contrôle va être mené par les préfets pendant tout le mois d’octobre, avec un « point d’étape » déjà programmé le 29 octobre.
Le Rifseep
Le deuxième sujet de mécontentement des deux ministres est le déploiement du Rifseep (régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel). Il s’agit, rappelons-le, du nouvel outil de référence, mis en place en 2016 dans la fonction publique territoriale, qui remplace les primes et indemnités existant auparavant.
Or, soulignent les deux ministres dans leur instruction, trop de collectivités (elles seraient environ 13 %) n’ont pas encore délibéré sur le Rifseep. Elles rappellent qu’il existe un principe de parité entre la fonction publique territoriale et celle de l’État, « selon lequel les collectivités territoriales sont liées par le plafond du régime indemnitaire applicable aux corps homologues de l’État ». En conséquence, « les collectivités territoriales et leurs établissements ayant institué un régime indemnitaire sont tenus d’instituer par délibération le Rifseep pour l’ensemble des cadres d’emplois dès lors que leurs corps équivalents de l’État bénéficient de ce régime indemnitaire ».
Elles doivent donc, « dans les meilleurs délais », délibérer sur les plafonds des deux parts du Rifseep (indemnité de fonction, de sujétion et d’expertise et complément indemnitaire annuel). L'AMF, toutefois, indique ce matin à Maire info que selon ce qui lui remonte, l'essentiel des collectivités qui n'ont pas encore délibéré sont en train de travailler sur le sujet.
Vacataires, égalité professionnelle et télétravail
Les deux ministres demandent par ailleurs aux préfets de surveiller l’utilisation « abusive » de vacataires par les employeurs territoriaux. Alors que la loi de transformation de la fonction publique a « très largement ouvert les possibilités de recours aux agents contractuels (….) pour les emplois à temps non complet », il est rappelé que « seuls les agents vacataires peuvent être rémunérés sur la base de vacations horaires ». Les agents vacataires ne peuvent être que « des agents engagés pour une tâche précise, ponctuelle et limitée à l’exécution d’actes déterminés ».
Les ministres visent ici le cas de collectivités qui emploieraient des vacataires en lieu et place de contractuels. Mais attention, la jurisprudence est parfaitement claire sur ce sujet, et caractérise la qualité de vacataire par trois conditions cumulatives : spécificité, discontinuité dans le temps et rémunération attachée à l’acte. Si une seule de ces trois conditions n’est pas remplie, la personne ne peut être considérée comme vacataire mais comme agent contractuel – et le juge administratif peut parfaitement requalifier rétroactivement leur contrat, ce qui, soulignent les ministres, emporte des « conséquences financières » non négligeables.
Parmi les autres sujets évoqués dans l’instruction, on retiendra notamment les plans d’actions égalité professionnelle, concernant les collectivités de plus de 20 000 habitants. Celles-ci devaient transmettre le plan d’action aux préfets avant le 1er mars dernier. Or il apparaît « qu’un certain nombre » d’entre elles ne l’a pas fait. Les ministres rappellent que dans ce cas, les collectivités doivent être sanctionnées par une pénalité et demandent aux préfets d’être prêts à mettre cette procédure en œuvre.
Enfin, il est rappelé que les collectivités doivent initier avant le 31 décembre prochain des négociations « en vue de la conclusion d’un accord sur le télétravail », comme l’exige l’accord-cadre signé le 13 juillet dernier par le gouvernement, les organisations syndicales et les représentants des employeurs territoriaux. Les ministres demandent aux préfets de « rappeler » cette échéance aux employeurs, et précisent que ces négociations « pourront utilement » – on notera que cela n’est pas obligatoire – « définir les modalités d’indemnisation des frais engagés par les agents au titre du télétravail ».
Télécharger l’instruction (source La Gazette des communes).
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