Réforme des retraites : les employeurs territoriaux très inquiets sur la retraite des agents
Quelques jours après l’annonce, par le gouvernement, de la décision de supprimer progressivement la « catégorie active » des fonctionnaires – qui ouvre le droit à un départ anticipé en retraite – les employeurs territoriaux se sont adressés aux ministres concernés, Olivier Dussopt et Laurent Pietraszewki, pour faire part de leurs inquiétudes.
Le 8 janvier, cette annonce avait provoqué la colère des organisations syndicales, qui avaient claqué la porte de la réunion (lire Maire info du 9 janvier). Olivier Dussopt avait annoncé que le nombre de fonctionnaires concernés par cette possibilité de départ anticipé allait passer de 900 000 à 300 000 – essentiellement des « métiers en uniforme » (policiers, pompiers, douaniers…).
Hier, le porte-parole de la coordination des employeurs publics territoriaux (1), Philippe Laurent, a adressé un courrier aux ministres pour leur faire part de la « réelle inquiétude » de ceux-ci « face à l’absence d’information précise et de considération des spécificités de la fonction publique territoriale » (FPT). Les employeurs veulent relayer les interrogations des agents, qui ignorent à ce jour à quelle sauce ils vont être mangés. L'envoi de ce courrier a été décidé lors d'une réunion de la coordination des employeurs territoriaux qui s'est tenue dès le 8 janvier après-midi.
Espérance de vie réduite
Trois interrogations sont soulevées par Philippe Laurent : d’abord, la prise en compte des droits acquis et des primes dans le calcul des futures pensions de retraites, une fois mis en place le système à points. Les futurs taux de cotisation, que ce soit du côté des agents ou du côté des employeurs, sont à ce jour inconnus.
Deuxièmement, les employeurs souhaitent attirer l’attention du gouvernement sur le fait que « plus de 75 % des agents territoriaux appartiennent à la catégorie C », avec de ce fait « des salaires modestes, des carrières lentes, des primes d’un montant très faible » – voire inexistantes. Ils rappellent que les femmes appartenant à cette catégorie occupent « très majoritairement » des emplois à temps partiel, ce qui implique des pensions de retraite « très faibles ».
Enfin, les employeurs rappellent que de très nombreux agents de la FPT sont concernés par la pénibilité. Entretien des routes ou des locaux, assainissement, animation, accueil de la petite enfance, aide à la personne, sont autant de métiers pénibles, avec des contraintes de charges lourdes, de proximité avec des produits dangereux, des horaires parfois atypiques, etc. « Les collectivités locales emploient de nombreux agents dont l’espérance de vie est réduite du fait de leur métier », rappelle Philippe Laurent, qui demande donc, au nom des employeurs territoriaux, que la pénibilité soit « traitée de manière spécifique, en tenant compte des agents reconnus inaptes qui bénéficient actuellement d’une retraite pour invalidité ». Les employeurs demandent donc instamment que soient connus « le périmètre choisi et les agents concernés par l’extinction progressive de la catégorie active et son remplacement par le compte professionnel de prévention ».
Par ailleurs, les employeurs demandent des précisions sur « la situation et le rôle de la CNRACL dans la gouvernance du futur régime universel ». Ils « s’interrogent » aussi sur « le devenir de l’ERAFP » (établissement de retraite additionnelle de la fonction publique) « et des réserves actuellement gérées paritairement par les organisations syndicales et les employeurs publics ». Ces réserves s’élèvent à plusieurs milliards d’euros.
Front unique
Les employeurs territoriaux déplorent un manque total de concertation : « Pas une seule fois ils n’ont été associés de près ou de loin à la concertation menée depuis de longs mois, malgré leurs demandes réitérées ». Ils estiment « légitime et opportun » d’être conviés à la « conférence de financement » dont le principe vient d’être arrêté par le Premier ministre. Autrement dit, les employeurs territoriaux demandent à être « enfin » considérés comme des employeurs à part entière. La proposition du gouvernement d’associer un unique membre du Conseil supérieur de la fonction publique (CCFP) aux concertations ne leur convient pas, « sachant que les trois fonctions publiques ont des situations très différentes ».
Il est notable que ces interrogations et prises de position des employeurs sont très proches de celles des organisations syndicales, ce qui n’est pas fréquent. Le gouvernement, sur ce sujet, va devoir faire face à un inhabituel front unique des employeurs et des syndicats.
F.L.
(1) AMF, ADF, Régions de France AdCF, France urbaine, Villes de France, APVF, AMRF, CNFPT, FNCDG et collège employeur du CSFPT.
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