Des pistes pour améliorer l'attractivité de la fonction publique territoriale
Par Emmanuelle Quémard
27 pistes pour rendre plus attractive la fonction publique territoriale. C'est ce qui est proposé dans un rapport remis le 3 février à la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Amélie de Montchalin. Cosigné par Philippe Laurent, maire de Sceaux et président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), Mathilde Icard, présidente de l'Association nationale des DRH des grandes collectivités (ADRHGCT) et Corinne Desforges, inspectrice générale de l'administration, ce document s'appuie notamment sur 150 auditions menées auprès d'acteurs et observateurs de la sphère territoriale (ministères, administrations centrales, organisations syndicales, associations d’élus, institutions de la fonction publique territoriale, associations de professionnels, experts, chercheurs…) et sur deux enquêtes d'opinion réalisées en direction des employeurs territoriaux et d'un panel de jeunes interrogés par la Direction interministérielle de la transformation publique (DITP).
La synthèse de ces travaux montre d'abord que si les collectivités disposent, sur le papier, de nombreux atouts pour attirer des candidats, elles éprouvent en réalité de plus en plus de difficultés pour recruter de nouveaux talents et rajeunir une pyramide des âges plus élevée (45,5 ans) que dans les deux autres versants (43 ans pour la fonction publique de l'État et 42 ans pour la fonction publique hospitalière). Le rapport pointe en particulier le fait que certains métiers territoriaux « n'attirent plus » , citant notamment les emplois de secrétaire de mairie, ceux de la filière médico-sociale (auxiliaire de puériculture, infirmier, travailleur social), de la filière technique (agent technique, agent de voirie, cuisinier, peintre) ou encore les métiers de la filière administrative (gestionnaire de ressources humaines ou comptable). Pour ces métiers, c'est la concurrence avec le secteur privé – où les rémunérations sont sensiblement plus élevées – qui s'avère la plus pénalisante pour les employeurs territoriaux.
Concurrence accrue entre les collectivités
Autre constat : les collectivités se livrent à une concurrence de plus en plus vive pour séduire de potentiels candidats. Le rapport cite l'exemple des postes de policiers municipaux qui font l'objet « d'avantages annexes » proposés par les collectivités les plus riches, ce qui accentue les difficultés de recrutement des structures territoriales financièrement plus fragiles.
D'autres facteurs plus structurels expliquent que certains territoires connaissent aujourd'hui une baisse d'attractivité. Ainsi, les petites communes rurales semblent pâtir du risque d'isolement souligné par de nombreux candidats. À l'inverse, les grandes agglomérations se trouvent également pénalisées par un coût de la vie élevé – et notamment par la cherté du logement et des transports – qui découragerait certains candidats, principalement ceux qui sont susceptibles de postuler à un emploi de catégorie C.
La géographie exerce, par ailleurs, une influence réelle sur l'attractivité de la territoriale. Le rapport remis à Amélie de Montchalin souligne notamment le plus grand attrait des postulants à un emploi territorial dans les collectivités de l’ouest de la France par rapport à celles de l’est et du sud-est. Enfin, le rapport fait ressortir le déficit d'image du monde territorial auprès des jeunes. « Il y a une réelle méconnaissance de la fonction publique territoriale et de la diversité de vie professionnelle qu’elle offre, ne permettant pas aux lycéens et aux étudiants de se projeter dans cette voie, à la différence de la fonction publique d’'État ou de la fonction publique hospitalière, bien mieux ''imagées'' » , indiquent notamment les rapporteurs.
Actionner les leviers des rémunérations et du logement
Parallèlement à cet état des lieux, le document déposé sur le bureau de la ministre avance une série de préconisations articulées autour de trois axes : « Le renforcement de la place des élus et des executifs territoriaux au travers de la coordination des employeurs territoriaux ; le développement de la coopération et des initiatives y compris inter-fonctions publiques en faveur de l’attractivité à l’échelon local ; des mesures variées, souvent plus techniques, visant à supprimer les différents freins à l’attractivité de la fonction publique territoriale. »
La question la plus sensible, à savoir celle des rémunérations, n'est pas éludée. Alors que le salaire net moyen des agents territoriaux s'élevait à 2 004 euros mensuels en 2019, le rapport propose en particulier de « revoir les grilles indiciaires et surtout les progressions des carrières » et de permettre aux employeurs territoriaux d'actionner plus facilement le levier du régime indemnitaire. Dans la même logique, le document suggère que les collectivités pourraient être autorisées à mettre en place une « prime d'attractivité » , voire « un avancement a minima » afin de récompenser les agents faisant preuve de stabilité dans l'emploi public local. Les rapporteurs se prononcent également en faveur de la création d'un fonds spécifique destiné à aider les collectivités, situées dans les secteurs les moins attractifs, à recruter des agents et des étudiants sur les postes en tension.
Parmi les préconisations de la mission, certaines concernent directement le cadre de vie des personnels. Ainsi, il est proposé aux collectivités de flécher une partie du parc de logements intermédiaires en faveur des agents territoriaux pour leur permettre de se loger plus facilement dans les territoires où les loyers sont particulièrement élevés.
Une autre série de propositions porte sur la revalorisation des métiers les plus en tension. Trois axes sont privilégiés : une campagne de communication sur « les valeurs positives » des missions incarnées par les personnels des collectivités, une action ciblant la qualité de vie au travail et l'amélioration des conditions de travail des agents assurant les tâches les plus pénibles et une réflexion sur l’évolution de certains concours (expérimentation de concours sur titres pour les apprentis ; réexamen périodique de la nature des épreuves ; organisation plus fréquente de certains concours en fonction des besoins).
La ministre de la Transformation et de la Fonction publiques a salué les propositions de la mission « qui vont dans le sens d’une plus grande responsabilisation et d’une autonomie renforcée des employeurs territoriaux dans la gouvernance nationale de leurs effectifs et de leur politique de remuneration » et souhaite que souhaite que le contenu du rapport « fasse l'objet d'un échange lors d'un prochain CSFPT informel, en présence des associations d'élus et des organisations syndicales » . En outre, Amélie de Montchalin doit lancer aujourd’hui choisirleservicepublic.fr, première plateforme de marque employeur du service public destinée à pallier le manque d’attractivité de la fonction publique, notamment auprès des jeunes.
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