Intégration des étrangers primo-arrivants : le gouvernement mise sur les collectivités locales
Par Franck Lemarc
« Le gouvernement fait de l’intégration effective des étrangers résidant en situation régulière sur le territoire une priorité contribuant à la cohésion de notre société. » , peut-on lire dans cette circulaire. On parle ici des bénéficiaires de la protection internationale, donc les réfugiés, ainsi que les étrangers venant s'installer en France dans le cadre de l'immigration familiale et de l'immigration économique.
Contrat d’intégration républicaine
Ces étrangers primo-arrivants doivent maintenant signer un Contrat d’intégration républicaine (CIR). Ce dispositif, créé en 2016 et modifié par ordonnance en 2020, est un contrat signé entre la personne et l’État, au travers duquel celle-ci s’engage à « respecter les principes et les valeurs de la société française et de la République » et à suivre les formations qui lui seront proposées.
Le ministère de l’Intérieur souligne que le nombre de CIR a frôlé les 100 000 en 2021 (94 464), ce qui représente une hausse de 54,3 % par rapport à 2020, année où la crise sanitaire a largement freiné le dispositif. Les signataires sont issus de 158 pays différents, mais un tiers d’entre eux viennent de quatre pays (Algérie, Maroc, Tunisie et Afghanistan). La moitié d’entre eux viennent en France au titre du regroupement familial, et environ un tiers au titre de l’asile.
Les crédits dédiés aux CIR sont de 80 millions d’euros – ce qui est moins considérable qu’il n’y paraît, puisque, ramené aux quelques 100 000 personnes concernées, cela ne représente qu’une somme d’environ 850 euros par personne.
Intégration par l’emploi
Le gouvernement souhaite que la « priorité absolue » soit donnée à « l’intégration par l’emploi » . « Le travail et la formation professionnelle constituent un axe essentiel de l'intégration » , écrit le ministère, qui demande aux préfets de veiller à ce que Pôle emploi « accompagne les étrangers éligibles vers l’emploi » , et en consacrant au minimum 60 % des crédits dédiés à ces actions d’accompagnement vers l’emploi. Il leur demande aussi de traiter « les difficultés périphériques rendant plus difficile l'insertion professionnelle des étrangers éligibles, qu'il s'agisse de l'accès aux droits, de la santé ou de la mobilité », et de veiller à ce que les délais d’obtention des titres de séjour ne provoquent pas « des ruptures dans les parcours d’intégration » .
La situation des femmes étrangères doit « faire l’objet d’une attention particulière » de la part des préfets, soulignent les services du ministère, qui rappellent que 30 % d’entre elle restent au chômage. Il est demandé aux préfets d’encourager « systématiquement, en lien avec les collectivités compétentes, des actions en faveur de la garde d’enfants. »
Territoires d’intégration
Enfin, le ministère souhaite impliquer davantage les collectivités locales dans ce processus, au travers du dispositif Territoires d’intégration.
Territoires d’intégration regroupe plusieurs dispositifs. D’abord les CTAI (contrats territoriaux d’accueil et d’intégration), qui lient les préfectures et les collectivités volontaires pour mener des actions d’intégration dans des domaines tels que le logement, l’accès aux soins, l’accès à la formation, etc. Onze métropoles ont signé en 2019 et 2020 ces CTAI (Brest, Dijon, Lyon, Grenoble, Nantes, Toulouse, Rennes, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Nancy et Strasbourg) ; et sept collectivités en 2021 (les villes de Marseille, Tours, Besançon, Poitiers et le Havre et les métropoles de Rouen et de Montpellier). Les CTAI sont essentiellement dirigés vers un public spécifique : les étrangers bénéficiaires de la protection internationale (BPI).
Autre type de contrat, très proche, le CTAI-R (R pour réfugiés), est spécifiquement orienté vers ce public. Huit CTAI se sont transformés l’an dernier en CTAIR, s’ouvrant ainsi aux réfugiés.
Enfin, le troisième dispositif de Territoires d’intégration et le Projet territorial d’accueil et d’intégration (PTAI), destiné aux collectivités « désireuses de s’engager plus ponctuellement dans des actions en faveur de l’intégration » , comme l’explique un document du ministère de l’Intérieur élaboré en mai dernier.
Dans la circulaire de janvier, il est rappelé que si la compétence de l’admission au séjour régulier des étrangers relève de l’État, « les compétences clef pour réussir l’intégration reposent sur les collectivités locales, que ce soit en matière d’action sociale, d’insertion, de développement économique et de formation professionnelle, de mobilité, de santé, d’appui à la parentalité et à la garde d’enfant ou encore de logement » . La démarche Territoires d’intégration vise donc à « faciliter la mobilisation des compétences des collectivités locales pour réussir l’intégration des étrangers en situation régulière résidant sur leur territoire ».
Évolutions en 2022
Le gouvernement souhaite donner « un nouvel élan » au dispositif en 2022, en augmentant les moyens financiers dédiés et en simplifiant le dispositif, par le regroupement des CTAI et des PTAI « en un seul instrument » .
Par ailleurs, il est demandé aux préfets de veiller « à la mobilisation directe par les collectivités de leurs compétences » . En effet, « la contractualisation a pour objectif non de financer un projet qui pourrait être mis en œuvre par une association sans avoir recours à une collectivité locale, mais de favoriser la mobilisation des compétences des intercommunalités, des conseils départementaux et des conseils régionaux, et la clause de compétence générale des communes, pour l’intégration des étrangers éligibles sur le territoire de ces collectivités » . Les projets retenus devront couvrir « au moins deux domaines de l’intégration, dont le logement » . Les préfets sont également invités à « proposer à des collectivités de catégories différentes de mettre en synergie leurs compétences autour de l’intégration des étrangers. Par exemple, un conseil régional pourra mettre en place des actions de formation professionnelle à destination des femmes, à qui des solutions de garde d’enfants seront proposées au niveau du bloc communal ».
Le ministère annonce enfin la « mise en réseau » des collectivités parties prenantes pour « changer les bonnes pratiques » , sans donner plus de détails, pour l’instant, sur ce que sera ce réseau.
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