Maire-info
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Édition du mardi 5 octobre 2021
Finances

Délais de paiement : les communes plutôt bonnes élèves

La Banque de France vient de publier son rapport annuel sur les délais de paiement. Ce rapport était particulièrement attendu dans le contexte actuel, permettant de savoir si la crise épidémique a modifié, ou pas, les comportements de paiement notamment des donneurs d'ordres publics. 

Par Franck Lemarc

Bien que finalisé en avril 2021, le rapport de l’Observatoire des délais de paiement n’a été rendu public que fin septembre. Et les nouvelles ne semblent pas trop mauvaises : « Malgré la crise sanitaire », écrivent les rapporteurs, la dégradation des délais de paiement sur l’année 2020 a été « limitée ».

L’enjeu était d’importance : en effet, il avait été constaté en 2019, après plusieurs années de stagnation, une baisse assez nette des délais de paiement, dans tous les secteurs, que la Banque de France attribue pour partie à « la dématérialisation et la facturation électronique ». La crise sanitaire allait-elle interrompre cette évolution vertueuse ? C’est la question à laquelle devait répondre ce rapport.

Délais en baisse

Pour ce qui est des acheteurs publics, la réponse est claire : malgré la crise, les délais de paiement ont continué à diminuer en 2020. En moyenne, pour ce qui est de l’État, le délai global de paiement s’est établi à 17,3 jours en 2020, soit 2,1 jours de moins qu’en 2019. Quant aux collectivités locales, le rapport note également « une amélioration générale » : « on observe une réduction des délais de paiement pour toutes les catégories de collectivités, y compris les collectivités de grande taille. »  Pour les communes, le délai global de paiement « se réduit d’un jour pour atteindre 19,2 jours en moyenne ». Le rapport souligne cependant que « des délais de plus de 30 jours persistent », en particulier chez les 10 % de collectivités les plus grandes. Rappelons que ce délai de 30 jours est le maximum fixé par le Code de la commande publique (à compter de la date de réception de la facture par l’ordonnateur public et non de la date d’émission de la facture), sous peine de pénalités. Ces règles n’ont pas été assouplies pendant l’épidémie. 

Les petites communes meilleures payeuses

« Le délai de paiement de l’ensemble des collectivités et établissements publics locaux s’améliore en 2020 », notent les rapporteurs. La baisse est particulièrement importante dans les régions (où le délai moyen est passé en un an de 29,4 à 23,9 jours) et dans les communes de plus de 100 000 habitants (passage de 29,1 à 25,8). La seule strate de collectivités qui restait, en 2019, au-delà du délai légal de 30 jours (les communes de 50 000 à 100 000 habitants), est revenue dans les clous en 2020, en passant de 30,5 à 27,4 jours en moyenne. 

Les petites communes sont, de très loin, les meilleures payeuses : le délai global de paiement moyen dans les communes de moins de 500 habitants s’établit à 12,6 jours, et 15,5 jours dans celles de 500 à 4000 habitants.

Si l’on regarde le dernier décile, c’est-à-dire les 10 % de factures qui sont payées le plus tard, on constate que là encore ce sont les communes qui s’en sortent le mieux puisque, globalement, le délai reste très en-deçà des 30 jours. Néanmoins, plus la taille de la commune augmente, plus ce délai s’allonge : dans les communes de 50 000 à 100 000 habitants, par exemple, les 10 % de factures payées le plus tard mettent 43,6 jours à être réglées. 

Les EPCI se montrent également assez bons élèves, avec, selon les tailles, des délais de paiement moyens qui s’échelonnent entre 18,8 jours (communautés de communes) et 29,9 jours (communautés d’agglomération). 

Autre donnée intéressante livrée par la Banque de France : le taux de collectivités dépassant le délai de paiement réglementaire. Il est lui aussi en baisse. Pour les communes, ce taux s’établit à 4,6 % seulement, avec là encore de fortes disparités selon la taille des communes : seulement 2,9 % des communes de moins de 500 habitants ont dépassé les délais en 2020, contre 17,5 % pour les communes de plus de 100 000 habitants. 

Il est enfin à noter que si la situation est plutôt bonne en métropole, elle l’est beaucoup moins outre-mer, où les chiffres, déjà mauvais en 2019, se dégradent. Le délai global de paiement est en moyenne de 62,1 jours outre-mer (contre 28,1 en métropole). Le dernier décile, outre-mer, fait apparaître des factures payées en moyenne au bout de 155 jours !

Les auteurs du rapport rappellent, en incise, que les membres de l’Observatoire des délais de paiement sont « favorables à l’ouverture de l’ensemble des données relatives aux délais de paiement des collectivités locales. Cette évolution permettrait aux entreprises de disposer d’une information fiable et objectivée sur les conditions de paiement de leurs clients publics ».

Les entreprises dénoncent des « délais cachés » 

On notera enfin dans le rapport quelques réactions des fédérations professionnelles qui nuancent ces bons chiffres. Ainsi, la Capeb (Confédération de l’artisanat et des professionnels du bâtiment) appelle les donneurs d’ordre publics « à plus de diligence » : « Le réseau des Capeb a eu des retours réguliers concernant la plateforme Chorus Pro de la part des entreprises qui l’ont adopté. Les entreprises artisanales du bâtiment déposent leur projet de décompte mensuel sur Chorus Pro mais dans de nombreux cas, la dématérialisation de la facture n’améliore pas le délai de paiement puisqu’il reste uniquement lié à la diligence des personnes qui interviennent sur Chorus Pro soit pour valider la facture, soit pour la payer. »  La Capeb plaide pour une évolution de Chorus pro, afin qu’il ne soit « pas uniquement une boîte aux lettres »  mais que « l’application soit dotée de fonctions pour améliorer les délais de paiement, comme un versement automatique des intérêts moratoires à l’expiration du délai de 30 jours ». 

Quant à la Fédération nationale des travaux publics (FNTP), elle dit « regretter la persistance de délais cachés ». Par exemple, le cas où le rejet d’une facture oblige l’entreprise à en émettre une autre « qui va faire courir un nouveau délai de paiement »  sans qu’il soit possible de réclamer des intérêts moratoires. La FNTP demande que « le principe du paiement des sommes admises soit réellement valorisé auprès des acheteurs publics afin de lutter efficacement contre les délais cachés ».

Télécharger le rapport.

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