Maire-info
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Édition du jeudi 7 juillet 2022
Finances

Certification des comptes des collectivités : un premier bilan positif de l'expérimentation

Alors que l'expérimentation de la certification des comptes, menée dans plus d'une vingtaine de collectivités, arrive à son terme, la Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC) a organisé, hier, une conférence de presse pour faire part de son retour d'expérience. 

Par Franck Lemarc

C’est la loi Notre de 2015 qui a lancé cette expérimentation, consistant à proposer à des collectivités, au volontariat, de se lancer dans la certification de leurs comptes sous l’égide d’un commissaire aux comptes. Très engagée dans la démarche, l’AMF avait à l’époque obtenu que l’expérimentation ne soit pas seulement ouverte aux collectivités ayant un budget supérieur à 200 millions d’euros mais soit bien plus large : des collectivités de toute taille (dix communes allant de Cuers, 10 600 habitants, à Paris, quatre communautés d’agglomération, une communauté de communes, une métropole, six conseils départementaux, deux conseils régionaux et un syndicat départemental d’énergie) ont finalement composé le panel d’expérimentateurs. 

La certification, expliquait en 2016 à Maire info le maire de Sceaux, Philippe Laurent, alors secrétaire général de l’AMF, « permettra de progresser en termes d’image sur la qualité des comptes des collectivités pour que l’on puisse dire que l’on a les comptes les plus transparents possibles. Mais cela permettra aussi de progresser techniquement et d’apporter une aide auprès des personnels comptables et financiers. Ce n’est pas une note financière qui, elle, définit la capacité à rembourser la dette. La certification permet uniquement de garantir la sincérité des comptes, qu’ils soient bons ou mauvais. » 

« Investissement important »  des collectivités engagées

Six ans plus tard, la question va bientôt se poser des modalités d'extension de la mesure. La CNCC a publié, hier, un document synthétisant son retour d’expérience. Elle estime que « la qualité des comptes des administrations publiques constitue un enjeu majeur de transparence de l’action locale, d’optimisation de leur gestion financière et de maitrise de leurs risques », et que la présence d’un commissaire aux comptes auprès d’elle « constitue un facteur incontestable de progrès », puisqu’elle offre « un gage de transparence précieux de la fiabilité de l’information financière des collectivités à l’ensemble de leurs parties prenantes : partenaires, sous-traitants, citoyens, élus, etc. ».

La CNCC note avec satisfaction que sur les 25 collectivités engagées, 22 ont fait le choix « le plus exigeant », celui de l’audit de leurs comptes – alors qu’elles avaient la possibilité de choisir un mode moins contraignant (examen limité, attestation particulière ou mission de présentation des comptes). Elle se félicite d’un « investissement important »  des collectivités impliquées : « Les collectivités expérimentatrices se sont engagées dans la démarche de certification car elles y ont vu, loin d’un exercice d’esthétique comptable, une occasion de mobiliser l’ensemble des équipes et des directions dans une dynamique d’amélioration continue du contrôle interne », a détaillé, lors de la conférence de presse, Bruno Gérard, président du secteur « Public »  de la CNCC.

Généralisation « progressive » 

Les commissaires aux comptes ont identifié plusieurs « points d’attention »  et de mesures nouvelles à envisager avant une éventuelle généralisation, notamment « la mise en place d’une instance intermédiaire entre l’ordonnateur, le comptable public et l’organe délibérant, afin de fluidifier et d’enrichir la communication avec les commissaires aux comptes au cours de leur mission »  et « l’adaptation du calendrier de la gouvernance des comptes ». Ils s’interrogent sur la pertinence d’une certification étendue à toutes les collectivités, estimant qu’elle prend surtout son sens dans celles qui dépassent un certain seuil : « Le montant du budget de certaines collectivités, leur degré de complexité, constituent des critères justifiant la présence d’un commissaire aux comptes de manière obligatoire. » 

La CNCC estime donc, pour sa part, que la généralisation du dispositif est possible et souhaitable, de façon « progressive », en commençant par les régions, puis les départements, « dans les trois ans à venir ». Quant aux collectivités qui seraient en dessous des seuils envisagés, et donc non soumises à obligation, il pourrait leur être proposé « des services sur mesures d’audit et de diagnostic », et leur proposer « à terme »  la certification, au volontariat. 

Cet avis de la CNCC est évidemment intéressant, mais l’association est, en la matière, juge et partie. Il faudra également attendre à présent le retour des collectivités engagées, celui de la Cour des comptes et de la DGFIP, sous l’égide de qui se déroule cette expérimentation, et qui devrait rendre un rapport sur cette expérimentation à la rentrée de septembre. 

Quant à l’AMF, auditionnée en amont de la rédaction de ce rapport et représentée par Pierre BRETEAU, maire de Saint-Grégoire (35) et co-président de la commission des finances de l’AMF, elle propose que l’extension de la certification soit réalisée sur la base du volontariat. L’AMF propose aussi de ne pas réserver la certification aux seuls commissaires aux comptes, les comptables publics pouvant effectivement attester de la fiabilité des comptes des collectivités qui choisiraient de s’engager dans une procédure de certification allégée compte tenu de leur taille. Enfin, concernant la présentation du bilan de la certification ou de l’attestation de fiabilité des comptes, l’AMF propose une présentation devant la commission des finances des collectivités ou devant un comité d’audit, émanation du conseil municipal. L’AMF s’oppose en effet à une présentation du bilan de la certification devant le conseil municipal, car cela risquerait de donner une tournure politique à un dispositif qui ne juge pas de la gestion financière de la collectivité mais de la lisibilité de ses comptes. L’AMF a fait valoir ce risque de confusion qui en outre pourrait nuire à l’extension de la certification. 

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