Fibre : les acteurs de la filière annoncent le lancement d'un plan d'action ambitieux
Par Lucile Bonnin
« Le travail n’est pas fini, et on va le finir », « nous sommes dans une situation de réussite inachevée » : le constat est clair autant pour les acteurs de la filière (opérateurs et industriels) que pour les collectivités. Malgré l’avancée rapide du déploiement de la fibre, des problèmes et inquiétudes subsistent dans les territoires (lire Maire info du 26 janvier).
Pour Patrick Chaize, président de l’Avicca, « le secteur du numérique dans son ensemble est dans une position particulière. Le système est en train de se bloquer, de se coincer » . Alors que l’échéance du 100 % fibre se rapproche fortement (2025) et que celle de l’extinction du cuivre (2030) va suivre, les acteurs de la filière représentés par la fédération InfraNum et l’association Avicca ont décidé d’agir, pour « faire en sorte que chacun puisse se mettre autour de la table pour reconstruire un vrai projet du numérique en France. »
Pour Philippe Le Grand, président d’InfraNum, l’annonce de ce plan appelé « Good deal » représente pour tous les acteurs de la filière « un travail titanesque » mais nécessaire : « La conjugaison des efforts des collectivités et des industriels avec l’organisation de l’État nous permet d’entrevoir une perspective aussi importante que les deux précédentes étapes que nous avons connues sur l’aventure du fixe, qui est aujourd’hui une fierté nationale, mais qui mérite d’être achevée, complétée et sécurisée. » Ainsi, les acteurs proposent trois mesures concrètes qui visent à garantir « l’égalité, la pérennité et la solidarité. »
Création d’un fonds de péréquation
Dans leur communiqué de presse commun, l’Avicca et InfraNum plaident pour la « création d’un Fonds de péréquation des réseaux optiques, estimé à plusieurs centaines de millions d’euros à fiscalité constante. » Ce dernier doit « renforcer et sécuriser les réseaux d’initiative publique, et permettre à chaque Français d’accéder à un niveau de service comparable sur tout le territoire. »
« Pour pouvoir maintenir un principe fondamental d’égalité des tarifs sur l’ensemble des territoires, il faut qu’on puisse avoir cet outil de péréquation qu’on appelle de nos vœux depuis très longtemps » , indique Patrick Chaize. S’il reconnaît que sa mise en place va être complexe et difficile, notamment pour trouver la ressource financière, l’idée d’une réorientation financière de l’Ifer est sérieusement envisagée.
Concrètement, les acteurs de la filière semblent être favorables à ce que le surcroît de l’Ifer soit en partie ou entièrement « affecté à ce fonds de péréquation des réseaux optiques qui fera le plus grand bien au Rip notamment, explique Philippe Le Grand. On évalue que l’Ifer aujourd’hui pèse 400 millions d’euros et va augmenter à 1 milliard dans les prochaines années ». Si les opérateurs continuent de considérer que cette taxe est « injuste et démesurée » ils semblent aussi penser que comme « l’Ifer augmente, autant le réaffecter aux infrastructures numériques. »
La stratégie peut surprendre mais elle est résumée ainsi par Patrick Chaize : « Pour réussir, il faut partager les problèmes et les objectifs de chacun, notamment car on est dépendants les uns des autres. » D’ailleurs, ce dernier s’est exprimé sur la position des collectivités face à l’évolution de l’Ifer. « Cela fait 5 ans que l’on dépose des amendements sur l’Ifer et à chaque fois on retrouve en face les collectivités qui s’y opposent, non pas par principe, mais parce que globalement on ne répondait pas à leur question d’avoir quelque chose en échange de la diminution de la recette. » Si rien n’est décidé encore, le sénateur rappelle qu’il est désormais indispensable que chacun prenne ses responsabilités pour atteindre les objectifs « dans un équilibre partagé. »
Réaliser tous les raccordements
Réussir à traiter tous les raccordements, y compris les complexes, est une priorité désormais. « Nous proposons la création d’une structure nationale qui portera la réalisation du génie civil nécessaire en tant qu’investisseur avisé de façon à lisser ces investissements et à trouver une économie qui permet de financer tous ces raccordements complexes dont le montant ajusté n’est pas encore connu » , a expliqué le président d’InfraNum.
Cette structure pourrait être financée par des investisseurs publics ou privés. Pour ce qui concerne sa gouvernance, elle sera sans doute « complexe et complète ». Mais Patrick Chaize le martèle : « On est encore au début de l’histoire ».
Adaptation des tarifs
Le troisième axe de ce plan vise un objectif de solidarité. InfraNum et l’Avicca veulent adapter les « tarifs sur le marché de gros dans les zones rurales afin de contribuer à la péréquation et garantir l’équilibre économique des réseaux d’initiative publique. »
Pour Philippe Le Grand, « on ne peut pas considérer que l’économie d’un réseau d’initiative publique en zone rurale soit la même qu’en zone urbaine. Nous souhaitons mettre en place un principe d’évolution des tarifs de gros dans les zones rurales pour permettre une amélioration durable de l’économie de ces réseaux. »
« Les planètes sont alignées »
Si ces constats et ces trois solutions peuvent ne pas sembler révolutionnaires – car elles sont longtemps évoquées par les différents acteurs notamment l'Avicca – ce qui change c’est que « aujourd’hui les planètes sont alignées car l’ensemble des acteurs publics et privés y trouvent un intérêt. »
Philippe Le Grand explique que ce « Good deal » est un plan qui « ne lève aucun impôt supplémentaire, qui ne va pas chasser la subvention mais qui réaffecte un impôt démesurément croissant, qui développe une logique d’investisseurs et porte des économies des délégations de services publics. Il ne faudrait pas que les infrastructures numériques puissent devenir le parent pauvre d’une politique nationale. »
« Tous les acteurs se disent que c’est une bonne solution, ajoute Patrick Chaize. Maintenant la question est simple : est-ce que le ministre veut porter ce plan ou pas ? » Concrètement, dans le cas où Jean-Noël Barrot décide de porter ce projet, un projet de loi sera déposé. Si ce n’est pas le cas, une proposition de loi qui émanerait du sénateur Patrick Chaize sera déposée. La balle est désormais dans le camp du gouvernement.
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