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Édition du mercredi 15 mars 2023
Développement économique

Développement économique : la répartition des compétences entre niveaux de collectivités reste inachevée, selon la Cour des comptes

Dans son rapport annuel, la Cour critique les insuffisances dans la gestion des aides aux entreprises. Elle appelle à s'inspirer des « bonnes pratiques de gouvernance » observées pendant la crise, entre collectivités territoriales, et avec l'État d'autre part.

Par A.W.

Une répartition des compétences qui reste floue, un pilotage et un contrôle insuffisants, ainsi que des évaluations trop peu fréquentes. Dans son dernier rapport annuel, la Cour des comptes critique sèchement, dans un chapitre dédié, la gestion des aides aux entreprises de la part des collectivités et estime que la clarification du partage des compétences voulu par les lois Maptam et Notre reste un « chantier inachevé ».

« Confusion et perte d'efficacité » 

Si, jusqu’en 2014, l’action des collectivités territoriales dans ce domaine se fondait sur la clause de compétence générale, les lois Maptam (de « modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles » ) de 2014 et Notre (portant « nouvelle organisation territoriale de la République » ) de 2015 avaient pour objectif de clarifier la répartition des compétences entre niveaux de collectivités dans ce domaine, tout en tentant d’« améliorer la cohérence de leur action économique »  et d’« accroître la lisibilité de leurs interventions pour les entreprises ».

Quelques années plus tard, les aides aux entreprises relèvent désormais bien des régions et le foncier des EPCI, mais le tourisme et le commerce sont restés « des domaines de compétences partagés entre les quatre échelons de collectivités territoriales ». Sans compter que la loi autorise « les départements à octroyer par délégation ou à cofinancer tout ou partie des aides »  tandis que le transfert du financement des structures de développement économique des départements vers les régions et les EPCI n’a été que « partiel », pointe la Cour.

Résultat, « cette situation peut s’avérer source de confusion et de perte d’efficacité », selon les auteurs du rapport, qui jugent ainsi de la portée « limitée »  de la clarification, celle-ci n’ayant « pas encore été menée à son terme »  à leurs yeux.

Dépenses des régions et du bloc communal en hausse

Après la mise en place de la nouvelle répartition, les magistrats financiers observent ainsi que « la part des régions et du bloc communal dans le total des dépenses de développement économique a progressé, passant de 66 % à 80 % du total, et la spécialisation de leurs actions s’est renforcée ».

La part des régions dans le total est ainsi passée de 27 % en 2013 à 37 % en 2021 et celle du bloc communal de 39 % à 42 % (du fait des EPCI dont les dépenses sont passées de 1,7 milliard à 2,5 milliards d’euros). Sur la même période, le poids des dépenses des départements a lui diminué, passant de 20 % à 12,7 %. 

Reste que, malgré la nouvelle répartition des compétences et le renforcement du rôle des régions et des EPCI, cela « ne s’est pas accompagné d’une diminution concomitante des dépenses des communes et le montant des dépenses des départements reste élevé », notent ainsi les magistrats financiers.

Pilotage et contrôle à « renforcer » 

En outre, les deux outils mis en place par la loi Notre – les schémas régionaux de développement économique, d'innovation et d'internationalisation (SRDEII) et les conventions entre collectivités – pour structurer le partenariat entre collectivités n’ont « pas permis de pallier la complexité de l’organisation des compétences, même s’ils ont pu, dans certains cas, renforcer la coordination de l’action économique des régions, des métropoles et des EPCI ». 

La Cour appelle ainsi à s’inspirer et à généraliser « les bonnes pratiques de gouvernance »  observées pendant la crise, entre collectivités territoriales, d’une part, et avec l’État d’autre part, afin « d’améliorer la cohérence de l’action des collectivités publiques au regard des enjeux de développement économique du pays et en vue de l’élaboration des prochains SRDEII ». 

S’agissant du pilotage des politiques mises en œuvre et du contrôle des aides allouées, ils doivent être « renforcés », selon la Cour. Celle-ci estime ainsi que le contrôle par les collectivités territoriales des structures de développement (agences régionales ou départementales de développement économique ou d’attractivité territoriale) s’avère « souvent partiel ou superficiel », bien que certaines collectivités aient engagé « des démarches d’amélioration ».

Une évaluation insuffisante

La Cour rappelle, par ailleurs, qu’il « appartient aux collectivités territoriales de développer l’évaluation des mesures prises de façon à en mesurer l’impact sur les entreprises et le tissu économique local ».

Une évaluation qui reste « insuffisamment développée »  alors que « seules quatre régions ont été en mesure de fournir à la Cour un bilan des indicateurs des SRDEII : Île-de-France, Occitanie, Pays de la Loire, Provence-Alpes-Côte-d’Azur ». 

« Des contrôles récents attestent de ce déficit d’objectifs et d’indicateurs pour suivre l’efficience des stratégies de développement », notent les Sages de la rue Cambon qui expliquent que, « parmi les rares exemples d’évaluation figure celui de la région Île-de-France [dont] les conclusions mettent en évidence un effet de levier financier et un effet accélérateur des aides sur l’innovation, des retombées économiques hétérogènes et la lourdeur de certains processus ».

« L’émiettement de ces aides, l’insuffisance des indicateurs et des données collectées, ainsi que le faible nombre d’évaluations conduites ne permettent pas de tirer un bilan de leur impact sur les entreprises », concluent ainsi la Cour. 

Télécharger le chapitre consacré au développement économique.

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