Feux de forêt : un rapport met en avant le rôle clé du bloc communal dans la prévention
Par Lucile Bonnin
Le rapport « Politique de prévention et de lutte contre l’incendie de forêt dans un contexte d’extension et d’intensification du risque dû au changement climatique » commandé par le gouvernement en mars 2022 à l’Inspection générale de l’Administration (IGA), au Conseil général de l’agriculture, de l’alimentation et des espaces ruraux (CGAAER) et à l’inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD) a été récemment rendu public.
Cette mission propose une feuille de route, en deux tomes, pour les années à venir pour la gestion des forêts et la lutte contre les incendies. Certaines actions « ont d’ores et déjà été prises en compte dans la loi adoptée le 10 juillet 2023, d’autres s’inscrivent dans le prolongement des mesures qu’elle prévoit ou qui correspondent à la formalisation d’actions engagées par le gouvernement ou qui restent à initier dans le domaine de la prévention et de la lutte » . Au total, 27 recommandations ont été formulées.
Adapter les stratégies de prévention à court terme
14 propositions d’actions à court terme ont été arrêtées par les inspections. Parmi elles, on retrouve notamment le besoin de développer l’acculturation pour le grand public mais aussi pour les élus. Les inspections sont également favorables à la création d’une météo des forêts à l’instar de ce qui a été fait pour la « météo des plages » par exemple, mesure qui a été mise en place l'été dernier.
Concernant les démarches d’aménagement du territoire pour renforcer la résilience à l’incendie de forêt, les collectivités territoriales sont invitées à « conduire une mise à jour des documents d’urbanisme au regard des objectifs conjoints de diminution de l’artificialisation des terres et de diminution des risques ». Le rapport insiste également sur l’importance de faire respecter les obligations légales de débroussaillement : elle prône de « privilégier des démarches qui s’intègrent dans des plans de massif ou dans des plans intercommunaux de débroussaillement et d’aménagement forestier » . Sur ce sujet, le plus grand flou règne néanmoins depuis que Gabriel Attal, en réaction au mouvement des agriculteurs, a annoncé un allègement des obligations légales de débroussaillement, sans que l’on en connaisse encore la teneur exacte.
Les auteurs du rapport pointent aussi le cas spécifique des aires protégées et des espaces naturels et invitent les collectivités à « expliquer et diffuser largement aux usagers les mesures de la réglementation permanente ou temporaire ». De même, dans le cas des espaces naturels, agricoles et forestiers, les collectivités peuvent soutenir et développer les réserves communales ou intercommunales de sécurité civile pour renforcer la surveillance.
Les conclusions de cette mission mettent surtout en lumière la nécessité de promouvoir une gouvernance territoriale du risque incendie de forêt associant davantage les collectivités notamment en renforçant « le rôle respectif de la commune et de l’intercommunalité » dans cette gouvernance et en impliquant les collectivités en amont de la construction de la décision publique.
Les collectivités davantage impliquées à long terme
Dans le tome 2 du rapport, des solutions de long terme sont mises en avant. Les inspections établissent par exemple qu’il faudra « renforcer dans la durée les effectifs et compétences au service de la prévention dans les territoires », aussi bien du côté de l’État que des collectivités. Cela passera notamment par une coordination de l’action publique via des pôles territoriaux. Un tel renforcement des effectifs, du sôté de l'Etat, supposerait une inversion complète de la pratique gouvernementale, puisqu'il faut rappeler que, entre 2000 et aujourd'hui, les effectifs de l'ONF ont été taillés à la hache, passant de 13 000 à 8 200.
Il serait aussi pertinent de définir des périmètres départementaux d’actions. Trois catégories de territoires peuvent être appréhendées notamment pour « conduire une action territoriale différenciée » : « les territoires historiques » (notamment le Sud et le Massif central) ; « les nouveaux territoires du feu » (départements de l’ouest et du centre) ; et « les territoires d’extension future » (notamment la Normandie ou les Hauts-de-France).
Du côté des moyens à allouer à cette politique de prévention, la mission estime que, « dans une perspective de moyen ou de long terme, devant l’ampleur des changements attendus, l’action de l’État va atteindre ses limites, tant en matière de financement que d’exercice des responsabilités » . Ainsi, la gouvernance devra évoluer avec notamment la montée en puissance des grandes collectivités. Les auteurs du rapport indiquent que le bloc communal reste « l’échelon privilégié » de la mise en œuvre d’une politique de prévention au plus près « des enjeux à protéger ».
Pour la mission, « c’est surtout dans le domaine de la prévention que se jouera, à moyenne ou longue échéance, la « guerre contre le feu » ; or le dispositif de prévention demande une adaptation locale forte, et un enracinement que seuls les acteurs locaux sont susceptibles de mettre en place » . Ainsi, « cette orientation suppose de reconsidérer la pratique consistant à voir l’État disposer d’une place prépondérante dans la gestion des risques naturels majeurs ».
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