École : une circulaire de rentrée 2024, comme si de rien n'était
Par Lucile Bonnin
Alors que les élections législatives n’ont pas encore eu lieu, le ministère de l’Éducation nationale vient de publier la circulaire de rentrée pour l’année scolaire 2024-2025. Avec pour leitmotiv « la cohésion » , le gouvernement actuellement en place entend « ne laisser aucun élève sur le bord du chemin » .
« Cohésion par la progression de chacun », « cohésion par la lutte contre toutes les formes d’assignation », « cohésion autour de l’école et ses personnels », « cohésion sociale par l’avenir que prépare l’école » : cette ligne directrice sonne comme un argument de campagne au moment où l'actuelle majorité accuse ses adversaires de vouloir porter atteinte à la « cohésion » du pays..
La publication de cette circulaire intervenant dans un climat politique aussi incertain qu'instable, il est difficile de savoir si cette feuille de route sera effectivement appliquée, ou pour combien de temps.
Poursuite de travaux déjà engagés pour l’école
La plupart des mesures évoquées par la ministre de l’Éducation nationale Nicole Belloubet ne constituent pas des nouveautés mais pérennisent des dispositifs déjà annoncés ou mis en place très récemment.
Pour lever le frein de « l’assignation sociale » , le gouvernement annonce « la poursuite de la revalorisation des internats, notamment des internats d’excellence ruraux : dès cette nouvelle rentrée, 170 internats supplémentaires bénéficieront de la labellisation "internats d’excellence", dont 38 avec le soutien financier de l’État à hauteur de 40 millions d’euros. Parallèlement, la mobilisation des territoires éducatifs ruraux (TER), amplificateurs de coopérations autour de l’école et vecteurs de rayonnement pour les territoires, sera poursuivie pour atteindre la cible de 300 TER à la rentrée 2026 ».
Sur le volet de l’inclusion scolaire, la circulaire rappelle que dès la rentrée prochaine, les communes n'auront plus à rémunérer les AESH qui accompagnent les enfants en situation de handicap pendant le repas de midi (lire Maire info du 28 mai).
De même, « les programmes d’enseignement moral et civique (EMC) révisés entreront ainsi progressivement en vigueur à compter de cette rentrée » et « l’appropriation par les élèves d’une culture de l’engagement sera encouragée dans le cadre de la labellisation "Classes et lycées engagés", à travers des projets réalisés au sein des établissements et en lien avec le Service national universel (SNU) afin de vivre un séjour de cohésion et de découvrir différentes formes d’engagement. » Notons par ailleurs que le SNU n’est toujours pas obligatoire alors que c’était la volonté du président de la République. Il constitue pour l’instant simplement le « prolongement pratique du programme d’EMC ».
Concernant l’usage des écrans, le gouvernement garde le cap : « l’école doit jouer un rôle déterminant dans l’usage raisonné des écrans et l’appropriation d’une culture numérique responsable. » En la matière, « les outils numériques seront strictement limités et les outils individuels, proscrits à l’école maternelle » et « au collège, une "pause numérique" sera expérimentée au sein de collèges volontaires ».
Des entrées en vigueur importantes
L’entrée en vigueur des groupes de niveaux, pourtant unanimement décriés par les syndicats, est annoncée. En décembre dernier, Gabriel Attal, alors ministre de l’Éducation nationale, annonçait la mise en place, dès la rentrée prochaine, de groupes de niveau en français et en mathématiques pour les 6e et les 5e, et l’année suivante pour les 4e et les 3e (lire Maire info du 18 mars). Finalement, pour la rentrée prochaine, des groupes de besoins en français et en mathématiques pour les élèves des classes de 6e et de 5e seront bel et bien mis en place. « Tous les élèves suivront le même programme, mais, selon les thématiques et les compétences à travailler, ils seront répartis en groupes pour faciliter les apprentissages » , précise Nicole Belloubet.
Sur cette réforme, qui a été plutôt mal reçue par le corps enseignant, le gouvernement se veut rassurant : « Si la mise en œuvre organisationnelle de ces groupes peut bien sûr présenter, par son caractère inédit, une certaine complexité, elle permet avant tout une transformation des pratiques d’enseignement et facilite la prise en charge différenciée des élèves. En aucun cas, elle ne saurait aboutir à la constitution de groupes pérennes d’élèves en difficulté, ni constituer une forme de "tri scolaire" ».
Autre réforme qui doit entrer en vigueur : celle du lycée professionnel. « Plusieurs mesures ont d’ores et déjà été mises en œuvre, notamment le versement d’une allocation au titre des périodes de formation en milieu professionnel, la création d’un bureau des entreprises et le dispositif Ambition emploi. L’année scolaire à venir sera marquée par la réorganisation de l’année de terminale pour permettre aux élèves de mieux préparer le postbac (l’insertion professionnelle ou la réussite dans l’enseignement supérieur), ainsi que par une nouvelle grille horaire garantissant la consolidation des savoirs fondamentaux, avec 15 % de l’horaire dédié aux enseignements en français et en mathématiques. »
Par ailleurs, de nombreuses nouveautés devraient intervenir au collège : les conditions d’obtention du brevet vont par exemple être révisées : « Ce sont les notes attribuées par les professeurs qui serviront au calcul de la note de contrôle continu, tandis que les épreuves terminales compteront désormais pour 60 % de la note finale, au lieu de 40 % actuellement. ». Par ailleurs, « à l’école élémentaire comme au collège, les évaluations nationales seront déployées en début d’année pour chaque niveau scolaire. »
Une nouvelle expérimentation devrait être lancée à la rentrée dans 4 départements pour « une nouvelle organisation du service public de l’école inclusive » avec la mise en place de pôles d’appui à la scolarité (PAS). « Ces pôles apporteront aux familles, à l’échelle d’un bassin de vie, une écoute et des réponses opérationnelles pour la scolarisation de leur enfant, en partant du besoin pédagogique de celui-ci (adaptations pédagogiques, matériels pédagogiques adaptés, etc.). Lorsqu’une aide humaine est nécessaire, ils pourront aider les familles dans leur démarche et affecter un AESH auprès de l’enfant dans l’attente de la notification de la maison départementale des personnes handicapées. Enfin, ces pôles regrouperont des personnels de l’éducation nationale et des personnels du secteur médico-social, afin de faciliter l’intervention de ces derniers auprès des élèves à besoins particuliers. »
Concernant le manque de personnels – problématique centrale à laquelle l’école doit faire face ces dernières années – la ministre annonce qu’ « une force mobile scolaire sera créée au niveau national pour apporter, en cas de crise, un appui et des renforts aux équipes académiques en moins de 24 heures. » Rappelons enfin que comme l’avait annoncé Emmanuel Macron en début d’année, « les concours de recrutement des professeurs du premier et du second degré seront placés en fin de 3e année de licence à compter de la session 2025 » . Il n’est pas certain que cette mesure isolée puisse résoudre le manque d’attractivité du métier. Pourtant, l’urgence est là : selon les projections de la Dares, 328 000 enseignants partiront à la retraite d’ici à 2030, soit plus d’un tiers du total actuel.
Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2
Soins de premier recours : parution des premiers décrets, les suivants se font toujours attendre
Le nouveau régime indemnitaire des policiers municipaux entre en vigueur
Retransmission des JOP Paris 2024 : une simple déclaration suffit
La fonction publique territoriale, locomotive de l'insertion des agents en situation de handicap