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Édition du mardi 13 juillet 2021
Déchets

Gestion des déchets ménagers : la tarification incitative préconisée par Terra Nova

Les collectivités locales devront être pédagogues auprès des usagers pour justifier la hausse annoncée des coûts, malgré des efforts supplémentaires en termes de tri demandés aux ménages. La Banque postale et Terra Nova préconisent notamment de développer la tarification incitative.

Par A.W.

Limiter la production de déchets et satisfaire ainsi aux objectifs imposés par la France et l’Union européenne. Dans une étude publiée la semaine dernière sur la gestion du service public des déchets ménagers, le think-tank Terra Nova et La Banque Postale proposent « d’accompagner au mieux les acteurs locaux dans leur engagement en faveur de la transition écologique »  afin d'atteindre ces objectifs.
Dans ce document, ils identifient ainsi les difficultés rencontrées ainsi que les ressorts dont disposent les collectivités pour « déployer des solutions adaptées ».

Adaptation et réduction des volumes de déchets 

Une accélération de la transformation de la politique de gestion des déchets est, en effet, attendue avec comme priorités la réduction du volume des déchets et la qualité de leur traitement. Imposées par les lois relatives à la transition énergétique pour la croissance verte (TEPCV) et à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (AGEC) - votées en 2015 et 2020 – ces « mesures ambitieuses »  doivent être réalisées « dans un calendrier serré », soulignent les auteurs de l’étude. 
Et ceux-ci de rappeler que « le service public de gestion des déchets ne fait pas exception, lui qui représente 4 % des émissions de gaz à effet de serre en France », soit 17,4 millions de tonnes d’équivalent C02, avec des impacts multiples : pollution de l'air, des eaux et des sols et perte de biodiversité.
Afin de limiter cet impact environnemental, le service de gestion des déchets va donc devoir se transformer en « rédui[sant] au minimum l’impact local de solutions comme l’enfouissement et, dans une moindre mesure, l’incinération ». Avec la réduction de 50 % de la mise en décharge à l'horizon 2025, La Banque postale et Terra Nova rappellent que « les exutoires vont se raréfier », « les collectivités, dont le système reposait majoritairement sur l’enfouissement technique dans un centre de stockage, vont donc devoir trouver des débouchés nouveaux ».
Devant une réglementation « plus contraignante »  et « des débouchés moins nombreux », les acteurs vont devoir faire évoluer leurs pratiques et « passer d’une logique de moyens à une logique de performance économique et écologique », expliquent les auteurs de l’étude qui notent que, « pour les collectivités, la difficulté est d’accompagner [la réduction du volume des déchets] sans que les usagers la perçoivent comme une baisse de la qualité du service public ».

Un coût qui va continuer d’augmenter

Ces évolutions ne vont pas être sans conséquence puisque le coût du service public des déchets va a priori continuer d’augmenter ces prochaines années. 
De « nombreux investissements »  sont ainsi attendus avec l’extension des consignes de tri d’ici 2022 qui va « nécessiter la mise en place de nouveaux dispositifs de collecte séparés des biodéchets et le développement de campagnes de sensibilisation et de promotion de ces dispositifs auprès des ménages »  ainsi que la généralisation du tri à la source des biodéchets d’ici à la fin 2023.
En parallèle de l’évolution règlementaire, la hausse de la fiscalité via la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) sur les tonnes de déchets incinérés ou enfouis est l’autre levier qui doit contraindre « un changement des comportements ». Entraînant un impact financier important, il doit « inciter les collectivités à privilégier la prévention et le recyclage ».
En attendant, les économies prévues sur le long terme, ces coûts supplémentaires pourraient entraîner une augmentation « graduelle »  de la TEOM à court terme, envisagent la Banque postale et Terra Nova.

Travail de sensibilisation auprès des usagers

De plus, il va être demandé aux usagers d’accentuer « encore leurs efforts dans les années à venir avec la généralisation de la collecte à la source des biodéchets », rappellent les auteurs de l’étude qui recommandent par ailleurs de poursuivre les efforts de rationalisation et de mutualisation. 
Un travail de sensibilisation auprès des ménages va ainsi s’avérer nécessaire afin de lever toute une série de « freins politiques »  (efforts supplémentaires sur le tri, créations nécessaires d’usines d’incinération qui sont souvent mal perçues par la population...). 
« La sensibilisation et la communication vont être des éléments clés pour accompagner la mise en place de ces pratiques et favoriser l’acceptation de ces nouvelles contraintes », expliquent-il, car « l’enjeu est de convaincre les habitants de la nécessité de mettre en œuvre ces changements, sans que ceux-ci soient considérés comme une perte de qualité de service, tout en expliquant pourquoi les coûts de collecte risquent de poursuivre leur augmentation ». 
En effet, les dépenses liées à la gestion des déchets progressent (3 % par an en moyenne et 2,5 % en euros par habitant) alors que les efforts individuels augmentent et que le volume de déchets produits par les ménages diminue. « Entre 2007 et 2017, le volume de déchets produits par habitants a baissé de 2 %. L’objectif est d’atteindre une diminution de 15 % d’ici 2030… L’effort des ménages doit donc se poursuivre », conclut l’étude. 

Tarification incitative et « nudges » 

Pour faire face à toutes ces évolutions, l’étude préconise notamment de se tourner vers les « incitations », comme la mise en place de nudges incitatifs. Cette technique qui permet d’inciter des individus à changer certains comportements sans être contraints par une obligation ou une sanction a déjà été mise en place par certaines collectivités. 
L’exemple écossais d’Edimbourg, en 2014, l’a montré. La commune a changé la taille des bacs de collecte d’ordures ménagères pour des modèles moitié moins grands, et accompagnés d’un bac de grande taille pour le tri. Résultat, quatre mois seulement après la mise en place de ce dispositif, le volume de déchets triés a augmenté de 85 % (3,5 kg par foyer par semaine contre 2 kg avant la mise en place), et le volume des ordures ménagères a baissé de 40 %.
Un autre exemple mis en avant se fonde sur la pression sociale. Si l’on informe les usagers que 80 % de leurs voisins trient leurs déchets, « cela peut les encourager à davantage s’impliquer dans le tri », la norme sociale étant considérée comme « un puissant déterminant des comportements ».
La mise en place d’une tarification incitative, en proportion du poids des déchets récoltés, peut être également un outil clé dans l’acceptabilité de ces nouvelles mesures et l’atteinte des objectifs car il permet de « faire prendre conscience plus largement que le service de gestion du déchet a un coût ». Alors que très peu d’usagers sont assujettis à la TEOM ou à la REOM incitative aujourd’hui en France (6 millions d’habitants desservis). « Cette tarification a un effet direct sur le montant de la facture, et la plupart de nos voisins européens l’ont déjà mise en place car elle a des incidences directes sur le geste de tri », constatent les auteurs de l’étude, qui conseillent également la mise en place de la tarification à blanc, qui a pour objectif d’informer l’usager sur le volume de déchets produits et le coût engendré pour la collectivité, mais sa facturation reste au final identique et stable.
Sur cette problématique, la moitié du panel d'EPCI interrogé dans le cadre de l'étude a répondu être prêt à passer à la tarification incitative, « signe d’un intérêt accru des groupements pour ce type de financement ». Cependant, « un certain nombre de difficultés ont été identifiées par ces mêmes collectivités : la réticence des usagers, les difficultés opérationnelles de mise en œuvre ainsi que le coût. La crainte de perdre une ressource prévisible et qui évolue de façon constante dans le temps est également un argument entendu ».

Télécharger l’étude.
 

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