David Lisnard évoque avec la Première ministre les dossiers brûlants pour les collectivités
Par F.L.
C’est « à l’initiative » d’Élisabeth Borne que cet entretien téléphonique a eu lieu, et il s’est visiblement déroulé dans un climat apaisé : le président de l’AMF conclut son communiqué en « remerciant la Première ministre de ce premier échange très respectueux et de son écoute ».
Et c’est bien, en premier lieu, du « respect » que réclame l’association représentant la quasi-totalité des communes de France, en échange d’un partenariat qu’elle veut « loyal » avec l’État.
Encadrement des dépenses
Cette discussion a été l’occasion pour David Lisnard de remettre sur la table les insatisfactions passées et les craintes pour l’avenir. Il a rappelé les épisodes les plus clivants du précédent quinquennat d’Emmanuel Macron, à savoir la suppression de la taxe d’habitation et le dispositif dit de Cahors, c’est-à-dire l’encadrement forcé des dépenses de fonctionnement d’un certain nombre de collectivités, dispositif qui a « lourdement affecté les marges de manœuvre des collectivités ». On sait que le chef de l’État a d’ores et déjà prévu de réactiver un tel dispositif d’encadrement des dépenses de fonctionnement – alors qu’il avait été abandonné pour cause d’épidémie de covid-19. David Lisnard a rappelé à la Première ministre « l’opposition » de l’AMF à ce qu’il soit remis en œuvre, a fortiori au moment où les dépenses de fonctionnement contraintes des collectivités augmentent fortement et vont mécaniquement continuer de le faire : d’abord du fait de la hausse des matières premières et en particulier des prix de l’énergie. Ensuite du fait que les taux d’intérêt repartent à la hausse (rappelons que le paiement des intérêts d’un emprunt entre dans les dépenses de fonctionnement, même s’il s’agit d’une dépense d’investissement). On peut ajouter à cela l’augmentation des dépenses qui va résulter du dégel du point d’indice, ou encore, par exemple, des « surprimes » que les collectivités pourraient avoir à payer à certains fournisseurs dans le cadre de marchés publics, si ceux-ci sont confrontés à une hausse des prix imprévue. Ces surprimes entrent, elles aussi, dans le cadre des dépenses de fonctionnement, même s’il s’agit d’un marché lié à un investissement.
Concilier ces hausses – totalement subies par les collectivités – avec un encadrement des dépenses de fonctionnement paraît donc intenable, sans compter que, a rappelé David Lisnard, ce dispositif même est une remise en cause du principe de libre administration des collectivités locales.
Inquiétudes sur le ZAN
Autre sujet d’inquiétude pour les maires : le ZAN et la question de la gestion du trait de côte face au recul du littoral. « David Lisnard a évoqué les difficultés des collectivités locales relatives aux textes (…) tels que les deux premiers décrets relatifs au ZAN, publiés dans la précipitation alors que le sujet exigeait concertation et réflexion », indique l’AMF. Ce sujet a été largement discuté ces derniers jours parmi les membres de l’AMF, notamment au Bureau de l’association (lire Maire info du 13 mai), ou encore, lundi, lors d’une réunion des présidents d’associations départementales des maires (lire Maire info d’hier).
Quant à la question de l’ordonnance sur les mesures contre le recul du trait de côte, elle paraît faire courir un tel risque juridique aux maires concernés et impliquer de tels enjeux financiers que l’AMF et l’Association nationale des élus du littoral (Anel) ont décidé, la semaine dernière, de saisir le Conseil d’État (lire Maire info du 20 mai).
Finances locales
David Lisnard a également évoqué avec la Première ministre le projet – annoncé pendant la campagne d’Emmanuel Macron – de suppression de la CVAE, taxe qui représente une recette de quelque 9,5 milliards d’euros pour les collectivités. Le maire de Cannes a demandé que ce projet soit « clarifié » et que la CVAE, si elle devait être supprimée, soit remplacée par un autre impôt. Il est en effet d’usage, depuis plusieurs années, lorsqu’un gouvernement supprime un impôt local, de le compenser par de la dotation ou par une part de TVA, ce qui prive les élus de la maîtrise des taux et des bases – et donc de leur autonomie.
Plus généralement, David Lisnard a réitéré la demande constante de l’AMF – et du Comité des finances locales) qu’une « réflexion globale sur les finances locales » soit menée.
Le président de l’AMF a également « souligné la nécessité de concilier l’efficacité des services publics et la défense des usagers et des contribuables en donnant de la respiration locale », ce qui demande « plus de subsidiarité, la fin de la multiplication des schémas directeurs et plus de libertés à l’échelon local ».
Il a souhaité que l’AMF soit désormais reconnue comme « partenaire institutionnel à part entière », rappelant la création récente d’un « comité législatif et réglementaire » par l’AMF, dont l’objectif est de « travailler en amont avec le gouvernement et le Parlement sur les futurs textes ».
Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2
Hausse des prix alimentaires : 15 % de hausse des budgets pour les cantines
Logement : sujets aux « erreurs en pagaille », les nouveaux DPE ne seraient « pas fiables »
L'ANFR interroge les collectivités sur leur utilisation du signal horaire hertzien
Accords collectifs, loi SRU : deux décisions du Conseil d'État qui concernent les collectivités