Pas encore de confinement, mais fermeture des centres commerciaux et des frontières
Pendant toute la semaine dernière, les ministres ont préparé l’opinion à un confinement qui, annonçait même mercredi le porte-parole du gouvernement, pourrait être « serré ». Les consultations menées jeudi et vendredi par le Premier ministre sont allées dans le même sens, puisque Jean Castex a, par exemple, demandé aux élus locaux quelles étaient leurs « recommandations » pour un nouveau confinement.
Et puis, vendredi soir en fin d’après-midi, changement de cap : l’Élysée a convoqué quelques ministres pour un conseil de défense organisé au pied levé, avant de dépêcher le Premier ministre, vers 20 h 30, pour une brève conférence de presse. Il n’y aura finalement pas de confinement, ou du moins, pas tout de suite.
Les raisons d’un choix
Pour expliquer cette décision, de multiples facteurs sont intervenus. Il semble d’abord qu’une note – non publiée à ce jour – du Conseil scientifique ait pesé dans la balance, défendant l’idée d’attendre au moins une semaine pour reconfiner. Le fait que les chiffres de l’épidémie, s’ils restent élevés, n’explosent pas, a également été pris en compte : le nombre de patients en réanimation, notamment, reste en-dessous de ce qu’il était lors des deux premières vagues (3 120 aujourd’hui contre 4 900 au pic de l’automne et 7 000 en avril). On n’assiste pas encore, en France, à ce qui se déroule actuellement en Espagne et au Portugal, par exemple, qui connaissent une explosion exponentielle des cas.
Les arguments économiques ont également été pris en compte, dans l’idée de tout faire pour éviter ou retarder une nouvelle paralysie de l’économie. Enfin, la situation politique et sociale inquiète le gouvernement – avec, dans plusieurs pays comme les Pays-Bas, le Liban, l’Espagne, l’éclatement la semaine dernière de violentes émeutes contre les mesures de couvre-feu ou de confinement.
Les mesures concernant les commerces
Le gouvernement a donc opté pour deux nouvelles mesures : la fermeture des centres commerciaux et commerces de plus de 20 000 mètres carrés, et la fermeture partielle des frontières.
Le décret paru dimanche matin détaille ces mesures.
Premièrement, les jauges d’accueil du public dans les commerces sont modifiées. Trois catégories sont à distinguer : les commerces dont la surface est inférieure à 8 m² ne peuvent accueillir « qu’un client à la fois ». De 8 à 400 m², le nombre de clients doit permettre que chacun dispose de 8 m² (25 clients pour 200 m², 50 pour 400 m², etc.). Au-delà de 400 m², la surface dont doit disposer chaque client est désormais de 10 m².
Mais surtout, tous les magasins ou centres commerciaux dont la surface totale est supérieure à 20 000 m² ont dû fermer leurs portes hier, à l’exception des commerces alimentaires. Le décret donne précisément le mode de calcul de cette mesure : on parle de « tout établissement comprenant un ou plusieurs magasins de vente ». La surface à prendre en compte comprend « les surfaces de vente, les bureaux et les réserves, sans déduction de trémie ou poteau et calculée entre les axes des murs mitoyens avec les parties privatives, et les nus extérieurs des murs mitoyens avec les parties communes ». Cette définition a donné lieu, ce week-end, à de savants calculs dans les préfectures pour aboutir à des listes établies par départements et déterminant les magasins et centres commerciaux qui peuvent rester ouverts et ceux qui ferment.
Il est à retenir qu’au sein d’un centre commercial, peuvent rester ouvert les supermarchés, hypermarchés, les magasins alimentaires et les pharmacies. Contrairement à ce qui s’est passé cet automne, aucune mesure n’est pour l’instant prévue pour fermer certains rayons des grandes surfaces. Autrement dit, les magasins de vente de vêtements ou de jouets doivent fermer dans les centres commerciaux, mais, pour l’instant, les hypermarchés peuvent continuer à vendre des vêtements ou des jouets, ce qui va immanquablement relancer le débat sur la concurrence.
Il faut également noter que contrairement aux épisodes précédents, les grandes enseignes de bricolage ou de bâtiment ne sont pas autorisées à rester ouvertes (si elles font plus de 20 000 m²). Et que le « click and collect » est interdit pour les commerces dont ce nouveau décret exige la fermeture – tout comme pour les restaurants et débits de boisson situés dans ces centres commerciaux.
Rappelons que tous les établissements qui peuvent rester ouverts doivent impérativement fermer leurs portes à 18 heures, en dehors de quelques secteurs listés dans le décret (garages, stations-services, blanchisserie de gros, laboratoires d’analyse, services funéraires, etc.).
Les limitations de déplacement
Deuxième mesure annoncée vendredi soir : la France ferme partiellement ses frontières. Il est désormais interdit de quitter la France sans « motif impérieux » (familial, professionnel ou de santé) pour se rendre dans un pays « autre que ceux de l’Union européenne, Andorre, l'Islande, le Liechtenstein, Monaco, la Norvège, Saint-Marin, le Saint-Siège ou la Suisse. » Les déplacements dans les deux sens entre la métropole et les territoires d’outre-mer sont également suspendus, ainsi qu’entre les territoires d’outre-mer eux-mêmes, à l’exception de ceux entre la Guadeloupe et la Martinique.
Pour ce qui est de l’entrée sur le territoire, il n’est pas simple de s’y retrouver, car le décret publié hier est peu clair : il ne parle en effet des déplacements « entre le territoire métropolitain et un pays étranger », ce qui laisse à penser qu’on ne parle ici que des départs. Rien dans le décret ne mentionne explicitement les arrivées. Mais quoi qu’il en soit, le site du ministère des Affaires étrangères l’écrit clairement : depuis dimanche à zéro heure, « toute entrée en France (…) en provenance d’un pays hors de l’espace européen » est interdite sauf motif impérieux.
Pour ce qui est de l’entrée sur le territoire y compris par voie terrestre, quel que soit le pays de provenance, elle est désormais suspendue y compris pour les « voies terrestres » à la présentation d’un test négatif de moins de 72 heures. Cette obligation ne s’applique pas aux travailleurs frontaliers et aux chauffeurs routiers.
Franck Lemarc
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