Maire-info
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Édition du jeudi 20 mai 2021
Coronavirus

Les collectivités ont adapté dans l'urgence leur gestion RH face à la crise sanitaire

Plans de continuité d'activité, fourniture d'équipements aux agents, télétravail, autorisations spéciales d'absences... Si la pandémie n'a pas empêché les collectivités d'assurer leurs missions de service public, elle a nécessité de nombreuses adaptations dans la gestion des ressources humaines selon une enquête exclusive réalisée par l'AMF, le CNFPT, la FNCDG, l'ADF et Régions de France.

Par Emmanuelle Quémard

Malgré l’ampleur et la violence de la crise sanitaire liée au covid-19, les collectivités territoriales ont largement assuré la continuité des services publics de proximité. S’adaptant dans l’urgence au contexte inédit de la pandémie, elles ont su mettre en place de nouvelles organisations pour permettre aux agents territoriaux de remplir les missions essentielles au service de la population, tout en préservant leur santé ainsi que celle des usagers. Telles sont les principales conclusions de l’enquête réalisée par l’Association des maires de France (AMF), le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), la Fédération nationale des centres de gestion (FNCDG), l’Assemblée des départements de France (ADF) et Régions de France entre le 21 octobre et le 12 novembre 2020. Étayant le baromètre HoRHizons 2020 (lire Maire info du 3 mars 2021), cette étude s’appuie sur un questionnaire auquel pas moins de 4022 collectivités (1) ont apporté des réponses complètes, mettant en évidence les nombreux impacts de la crise sur la gestion des ressources humaines lors du premier confinement (17 mars -11 mai 2020).

65% des collectivités dotées d’un Plan de continuité d’activité

Les premières décisions prises par les employeurs territoriaux ont ainsi porté sur l’activation d’une cellule de crise réunissant élus et dirigeants territoriaux et sur la mise en œuvre des plans de continuité d’activité (PCA). Ces dispositifs destinés à maintenir les activités indispensables en mobilisant les agents en présentiel ou en télétravail ont été déployés par une majorité de collectivités (65 %). Il convient, cependant, de souligner que 23 % ont réalisé leur PCA dans l’urgence, c’est-à-dire à la suite de l’annonce du confinement. Sans surprise, la taille et la gouvernance des collectivités ont été déterminantes dans la mise en œuvre de ces plans. La totalité des régions et départements disposaient, en effet, d’un PCA avant la crise, alors que seulement 42 % des communes, 37 % des communautés de communes et 45 % des communautés d’agglomération avaient engagé une telle démarche avant la crise. Si la plupart des communautés d’agglomération ne disposant pas d’un plan de continuité à la veille du premier confinement se sont dotées d’un PCA entre le 17 mars et le 11 mai 2020, 31 % des communes et 27 % des communautés de communes n’avaient toujours pas élaboré ce dispositif au moment où le questionnaire leur a été adressé (octobre-décembre 2020). « Les collectivités ont toutes fait preuve de rapidité et de célérité dans la mise en place de la continuité de services, se félicite Murielle Fabre, co-présidente de la commission FPT et RH de l’AMF, même si l’on observe une dichotomie entre grandes et petites collectivités. » 
L’étude montre, par ailleurs, que les collectivités sont parvenues à maintenir une présence minimum d’agents sur les sites où le télétravail n’était pas envisageable. Ainsi, l’activité des agents territoriaux s’est exercée essentiellement en présentiel dans les services assurant l’état civil (81 % des collectivités), la comptabilité et les finances (74 %) ou les interventions techniques et de collecte des ordures ménagères (56 %). En revanche, moins de collectivités ont déployé leurs agents sur le terrain pour assurer des missions telles que la gestion de la propreté urbaine (34 %), la garde d’enfants des personnels mobilisés par la crise sanitaire (32 %), les services informatiques (23 %) ou encore la police municipale (14 %). À noter que les proportions varient là aussi selon la taille des collectivités. Ainsi, la police municipale a été maintenue en présentiel dans la majorité des communes de plus de 50 000 habitants tandis que les communautés d’agglomération ont majoritairement conservé une activité en présentiel pour les services eau et assainissement. De même, la fonction ressources humaines a été exercée en présentiel surtout dans les communes de plus de 2 000 habitants, les départements et les régions. 

Le manque d’anticipation pointé comme dysfonctionnement 

À l’occasion des réorganisations imposées par la pandémie, la gestion des personnels s’est souvent heurtée à des obstacles que l’enquête met en évidence. Les collectivités pointent principalement des dysfonctionnements tels que le manque d’anticipation (pour 43 % des répondants), le défaut d’équipements – masques, gel hydroalcoolique – (40 %), les consignes contradictoires données par l’État (35 %) ou encore la complexité du dispositif d’Autorisation spéciale d'absence (ASA). Si le manque de recul et d’anticipation a été ressenti par toutes les collectivités, il est un peu moins souvent cité par les très grandes collectivités (de plus de 1 000 agents) mais aussi par les plus petites communes. Pour surmonter les difficultés de gestion du personnel, les collectivités ont principalement sollicité le soutien des préfectures (50 %), des centres de gestion (47 %), des départements (39 %) ou encore de leur EPCI (12 %). « La pertinence de l’échelon départemental l’est plus encore en période de crise lorsque les collectivités ont mille questions à résoudre », affirme Michel Hiriart, président de la FNCDG.

83 % des collectivités ont fourni des masques aux agents

La protection des territoriaux a également constitué une tâche prioritaire pour les responsables RH. L’enquête indique que dès la proclamation de l’état d’urgence sanitaire, 86 % des collectivités ont mis quotidiennement des masques à disposition de leurs agents et que 83 % d’entre elles ont rendu obligatoire le port du masque dans les bureaux. Autres actions mises en œuvre pour la sécurité du personnel : le nettoyage renforcé des postes de travail et le protocole d’entretien et de désinfection. En revanche, seulement 3% des répondants ont engagé une réflexion sur les risques psychosociaux liés au contexte sanitaire (peur de la contamination, angoisse de l’isolement…). Par ailleurs, le droit de retrait a été peu utilisé par les agents : seules 8 % des collectivités répondantes y ont été confrontées. « Sans surprise, la santé des agents a été au cœur des préoccupations des employeurs, remarque Olivier Richefou, président du Conseil départemental de la Mayenne et représentant de l’ADF. Le faible niveau du droit de retrait prouve également qu’ils ont fait le job pour que leurs agents continuent à travailler dans de bonnes conditions. » 

10 % des collectivités ont mis en place le télétravail pour la moitié des effectifs

Face à la crise sanitaire, les employeurs territoriaux ont dû réorganiser le travail des agents, notamment en arbitrant entre les activités pouvant être exercées en présentiel et celles permettant le télétravail. Ainsi, 25 % des collectivités ont vu la totalité de leur personnel rester en présentiel et 35 % des répondants ont maintenu plus de 75 % des agents sur site. Dans le même temps, 10 % des collectivités ont instauré le télétravail pour plus de la moitié de leurs effectifs. Pour 3 % d’entre elles, la totalité des agents a travaillé à distance pendant la première période de confinement. Ce sont les communes de moins de 5 000 habitants et les communautés de communes qui ont eu le moins recours au télétravail des agents. A noter que la moitié des communes de moins de 2 000 habitants n’a placé aucun agent en télétravail.

Un impact financier non négligeable

Les responsables RH ont dû également gérer le flux des demandes d’autorisations spéciales d’absence. Dans les structures les plus importantes, les agents placés en ASA ont représenté jusqu’à 20 % des effectifs lors du premier confinement. Au cours de cette période, 18 % des collectivités ont imposé la prise de jours de congés ou d’aménagement et de réduction du temps de travail à leurs agents. L’étude souligne, en outre, que 29 % des collectivités ont versé une prime dite « covid ». Surtout destinée aux personnels « particulièrement mobilisés », cette prime exceptionnelle s’est élevée en moyenne à 488 euros par agent. 
À l’occasion de ce premier bilan, les employeurs territoriaux ont également évalué l’impact financier non négligeable de certaines mesures d’accompagnement. Parmi elles, le versement de la prime « covid », le paiement des heures supplémentaires, l’achat de matériel informatique ou encore le remplacement des agents placés en ASA. « Il se produit un effet de ciseau avec une augmentation des dépenses et une perte de recettes, observe François Deluga, co-président de la commission FPT-RH de l’AMF et président du CNFPT. Il va falloir avoir avec le gouvernement un débat objectif afin de déterminer le coût réel de la pandémie sur les finances des collectivités. » 


(1)   34 794 communes, 1 251 intercommunalités et l’ensemble des régions et départements ont été destinataires de l’enquête.  

Télécharger l’enquête.

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