Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 4 mai 2020
Coronavirus

Covid-19 : la désinfection des voiries à l'eau de Javel de nouveau déconseillée

Après le Haut conseil de la santé publique (HCSP) au début du mois d’avril (lire Maire info du 10 avril), c’est au tour de la Cellule interministérielle spécialisée dans la décontamination des infrastructures (Cisdi) de se prononcer sur « l’opportunité de la désinfection des rues »  dans la lutte contre l’épidémie de covid-19. 
Conclusion d’importance pour les communes : les experts préconisent « la poursuite de la pratique de nettoyage des voiries »  mais « sans utiliser de produits biocides ou désinfectants et sans changement d’habitudes, en dehors des mesures de protection éventuelles des employés ». Il est, en revanche, « préconisé d’attacher un soin particulier à la désinfection des surfaces de contact telles que rampes, poignées, bancs publics, arrêts de transport en commun (…) en utilisant des lingettes désinfectantes ou un chiffon imbibé de produit désinfectant ».

Des « risques »  pour l’environnement
Depuis le début de l’épidémie, la désinfection des rues « fait l’objet de nombreuses interrogations ». Pour « protéger au mieux leurs citoyens », certaines municipalités, à l’image de « Nice, Cannes, dans les Yvelines, Reims, Montauban, Péronne, Beaune », utilisent de l’eau de Javel diluée jusqu’à 3 % pour désinfecter les voiries, le mobilier urbain ou des espaces publics particuliers. Or « la littérature scientifique ne recense pas d’étude sur la persistance des coronavirus sur les matériaux de voiries tels que les ciments, les bitumes ou les pierres qui constituent une grande partie des espaces extérieurs urbains », écrit la Cisdi.
En parallèle, l’utilisation de produits tels que l’eau de Javel ou les désinfectants classiques, outre le fait que leur usage seul est « inefficace », « présente un réel risque pour l’environnement et la biodiversité ». Il n’y a, en effet, « pas de garantie d’absence de projections de produit en marge de la zone ciblée ». Du désinfectant pourrait donc être projeté sur les espaces verts, les plantations et la faune à proximité des espaces pulvérisés. Il pourrait de la même façon s’écouler dans les cours d’eau, rivières, et milieux naturels dans lesquels peuvent se retrouver les eaux en sortie de réseaux d’eau pluviale ou en sortie de station de traitement des eaux usées. 
Ainsi, « préalablement à toute utilisation de produit avec un risque de rejet dans l’environnement via les réseaux d’eaux pluviales et d’eaux usées », la Cisdi recommande d’informer les services publics de l’eau et de l’assainissement en charge de la surveillance du réseau et des stations de traitement des eaux usées de « la nature du désinfectant, sa composition (FDS), la concentration employée, les volumes et fréquences de traitement ».

Bâtiments publics
La Cisdi a également émis ses préconisations sur le nettoyage et la désinfection des bâtiments publics. Étape ô combien sensible à une semaine de la première phase du déconfinement et de la réouverture des établissements scolaires. Deux configurations sont possibles : soit l’établissement est fermé depuis plus de dix jours et « seul un nettoyage simple est à réaliser »  (bonne aération des locaux, ouverture des portes et fenêtres, nettoyage des surfaces selon les procédures habituelles, ouverture des robinets afin d’évacuer le volume qui a stagné dans les canalisations intérieures, nettoyage des filtres des appareils de ventilation ou de climatisation…). 
Soit l’établissement est resté ouvert ces dix derniers jours et il convient de « procéder plusieurs fois par jour à la désinfection des surfaces susceptibles d’être en contact avec les mains (en portant une attention particulière aux surfaces en plastique et en acier) : équipements de travail collectifs, rampes d’escaliers, poignées de portes, interrupteurs d’éclairage, boutons d’ascenseur, écrans tactiles, combinés de téléphone, appareils de paiement, comptoir d’accueil, mobilier »  et de « penser à bien aérer après la désinfection ».
Le protocole sanitaire, dispensé vendredi par le ministère de l'Education nationale, suit peu ou prou la même direction : il demande, dans le cas où les lieux ont été fréquentés dans les cinq derniers jours, « un nettoyage habituel et une désinfection »  avant la rentrée des personnels et des élèves. « Pour la désinfection, la plupart des désinfectants ménagers courants sont efficaces selon les autorités sanitaires s'ils respectent la norme de virucide NF EN 1446. »  Mais « en l’absence de désinfectant virucide conforme à la norme EN 14476, une solution désinfectante à base d’eau de Javel diluée à 0,5% de chlore actif (par exemple 1 litre de Javel à 2,6% + 4 litres d'eau froide) pourra être utilisée. Il est nécessaire de vérifier au préalable la compatibilité de l’eau de Javel avec la nature de la surface ». 

Transports en commun
Les transports en commun, enfin, « doivent bénéficier d’une attention particulière lors de la désinfection ». « Au regard de la fréquentation, les surfaces à fort contact avec les mains ou exposées aux projections respiratoires (appareils de validation des titres de transport, barres de maintien des passagers, boutons, poignées de porte, accoudoirs, tablettes de travail, etc.) doivent bénéficier d’une désinfection régulière »  et même quotidienne, selon le décret du 23 mars 2020. « Il s’agit d’une désinfection par application d’un produit désinfectant sur les surfaces susceptibles d’être contaminées ». Les personnes en charge d’opérations de désinfection doivent être formées et informées sur les risques encourus et les mesures de protection individuelle.

Ludovic Galtier

Télécharger l’avis de la Cisdi.

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