L'AMF offensive à l'approche de son 106e congrès
Par Lucile Bonnin
« Si on veut éviter que les prochains Gilets jaunes soient en écharpe tricolore, il va falloir véritablement retrouver le sens de la décentralisation, de la subsidiarité, de la performance publique et faire confiance aux communes, car les communes, heureusement, sont là. » Le ton du 106e Congrès de l’AMF a été donné hier par le président de l’association, David Lisnard, aux côtés du premier vice-président délégué de l’AMF, André Laignel, et de Murielle Fabre, secrétaire générale.
Cette nouvelle édition débutera le 18 novembre avec la Rencontre des élus des Outre-mer au Palais des congrès d’Issy-les-Moulineaux. Un rendez-vous très attendu tant la situation est tendue dans ces territoires, notamment à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie et en Martinique. Puis, du 19 au 21 novembre, les élus se réuniront au Parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris autour du thème « Les communes… heureusement ! ».
Contexte politique et budgétaire tendu
« Injonctions contradictoires », « dénonciations calomnieuses », « sentiment de profonde humiliation », « état de sidération face à la méconnaissance du rôle des élus » : le moins que l’on puisse dire est que le contexte politique dans lequel va se tenir ce prochain congrès va être tendu.
Les représentants de l’AMF, à commencer par André Laignel, président du Comité des finances locales, se sont largement exprimés sur le projet de loi de finances actuellement encore à l’Assemblée nationale. Pour rappel, le gouvernement prévoit de prélever 5 milliards d'euros sur les recettes des collectivités et accuse même ces dernières d'être responsables de la dérive des comptes publics.
André Laignel dénonce « un mensonge d’État ». Selon le vice-président de l’AMF, cet effort budgétaire demandé aux collectivités s'élèverait en réalité non pas à 5 milliards d’euros mais plutôt « à un peu plus de 11 milliards d'euros de ponctions et de charges ». Par ailleurs, il a été rappelé que les collectivités ne sont pas responsables de l'aggravation du déficit. « Quand l’État dérive, il cherche des boucs émissaires, et il semble que, pour ce rôle, les élus locaux sont en première ligne », a résumé André Laignel.
La colère des élus locaux est aussi alimentée par d’autres politiques élaborées par « les petits hommes gris de Bercy », comme l’explique le président de l’AMF, qui contraignent les maires dans leur capacité d’action et les décourage (40 maires démissionnent en moyenne chaque mois). Le président de l’AMF a notamment évoqué les transferts de charges non compensés par l’État (compétence Gemapi, création du service obligatoire petite enfance, transfert de la responsabilité sur le périscolaire, gestion du trait de côte et des digues fluviales, titres d’identité, etc.) couplée à une perte d’autonomie financière progressive des communes et intercommunalités (suppression de la taxe d’habitation et de la CVAE).
Les élus locaux ont aussi dénoncé les injonctions contradictoires qui émanent de l’État qui accuse d’un côté les collectivités d’être « le problème des comptes publics » mais qui demande, de l’autre côté, aux communes « d’ouvrir 200 000 places d’accueil pour la petite enfance » et d’ « augmenter le taux d’encadrement ».
André Laignel n’a également pas manqué d’évoquer le très controversé rapport de la Cour des comptes publié il y a un mois qui appelait à supprimer 100 000 emplois dans la fonction publique territoriale (lire Maire info du 3 octobre). « Ce procès en mauvaise gestion à l’égard des personnels territoriaux qui seraient trop nombreux, incompétents, trop souvent malades » mène à « un sentiment de profonde humiliation car ces critiques sont injustes et mensongères et sont proférées par ceux qui ont sinistré la France et qui, dans une tentative vaine pour le faire oublier, s’en prennent aux seuls qui ont encore la confiance des Français : les maires et leurs équipes ».
Mais, heureusement les communes…
Tandis que le gouvernement semble vouloir continuer dans le chemin du « dénigrement de l’action communale », le Congrès de l’AMF mettra une nouvelle fois en lumière l’action communale et l’implication des élus. « On est toujours heureux de trouver les communes lorsqu’il y a des crises », rappelle David Lisnard, et « heureusement, les communes, tous les jours font le job ».
« Le congrès s’annonce comme un moment crucial [pour aborder] la façon dont sont envisagées les relations entre le pouvoir central et les pouvoirs locaux » , a déclaré le maire de Cannes, qui souligne que ce congrès s’inscrit dans une « volonté d’affirmer que le mandat de maire est fort de sa dimension de praticien » et qu’il est ainsi primordial de mettre « en exergue les difficultés croissantes à exercer ce rôle ».
Le congrès sera marqué cette année par une quarantaine de forums, débats et points-info. « Dès l’ouverture du congrès, le mardi matin, nous ferons un point pour lancer une année de bilan et perspectives autour de l’insertion des personnes porteuses de handicap et autour des 20 ans de la loi de février 2005, grande loi structurante sur le handicap. »
D’autres thématiques très plébiscitées par les maires seront abordées allant de la politique d’aménagement, à celle du logement, et en passant par le sport, la culture, l’insécurité, la petite enfance, la transition énergétique, les finances locales, les secrétaires généraux de mairie, les transports, la ruralité, les polices municipales, etc…
Murielle Fabre a également indiqué que la question de l’élu sera au centre des débats et notamment celle de « l’amélioration des conditions d’exercice des mandats des maires » qui est un « combat pour l’AMF ». Au dernier congrès, « nous avions fait un vaste diagnostic avec l’appui du Cevipof » ; « aujourd’hui place à l’action ! », a lancé la secrétaire générale. « Les propositions sont sur la table avec la proposition de loi sénatoriale de Françoise Gatel et d’autres qui sont sur le bureau de l’Assemblée nationale. Il est peut-être plus urgent d‘avoir un projet de loi en la matière, car 2026, c’est demain et la crise des vocations est aujourd’hui. »
Le programme du congrès est disponible sur le site de l’AMF. Comme chaque année, Maire info et Maires de France suivront le congrès au plus près. Maire info animera aussi, comme chaque année, une web-tv pour donner la parole à de nombreux élus, personnalités et ministres.
Retrouvez ici toutes les informations pratiques pour participer au Congrès.
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