ZAN : le taux de décisions favorables rendu par la Cnac a diminué en 2023
Par A.W.
Dans son dernier rapport d'activité présenté la semaine dernière à Bercy, la Commission nationale d'aménagement commercial (Cnac) fait le bilan d’une année 2023 « marquée par le déploiement effectif » du « Zéro artificialisation nette » (ZAN) instauré par la loi Climat et Résilience de 2021.
« Il s’agit d’un tournant décisif et structurant pour l’aménagement commercial, désormais conçu au prisme de la préservation de la biodiversité et de la protection de l’environnement », explique la commission qui estime avoir joué « un rôle précurseur et fait figure d’exemple en veillant à favoriser des projets économes en sols et limiter l’imperméabilisation des sols ».
Nombre de décisions en baisse
La Cnac note ainsi une baisse de 23 % du nombre de décisions qu’elle a rendues, celles-ci passant de 223 en 2022 à 181 en 2023. Néanmoins, bien que ce nombre ait chuté, elle constate une hausse de 15 % de la surface de vente totale examinée à hauteur de près de 488 000 m² (contre environ 413 000 m² en 2022).
Elle explique cette évolution en apparence contradictoire, à la fois, par « la prise en compte de la jurisprudence « Poulbric » (depuis cette décision, les surfaces d’arrière-caisses et celles des sas d'entrée desservant un seul et unique commerce au sein d’un même bâtiment entrent dans le calcul de la surface de vente) » et par le fait que cette hausse des mètres carrés présentés peut également « tenir aux structures commerciales nouvellement développées prévoyant un confort d’achat accentué et un esthétisme amélioré : larges allées, espaces détentes pour la clientèle… »
Résultat, la surface moyenne examinée en 2023 était de 2 696 m², contre 1 851 m² un an plus tôt.
Par ailleurs, elle souligne que le taux d’avis favorables qu’elle a rendu en 2023 a diminué par rapport à 2022. Sur un total de 181 décisions, ce sont 79 d'entre elles qui ont ainsi été favorables, soit 44 % d’avis favorables, un résultat obtenu en ne comptabilisant toutefois pas les procédures de revoyure et de réexamen. Par comparaison, l’année précédente, ce taux montait à 54 % (et 43 % en 2021, en pleine crise sanitaire), mais, cette fois, revoyures et réexamens compris. Un « taux inférieur à celui de 2022 » qui s’explique « principalement » par la mise en œuvre du principe du ZAN, selon la Cnac qui indique que l’année 2023 a été « une période de transition » qui a « aussi influencé ce taux ».
La commission souligne, en outre, que 29 projets ont été rejetés puisqu’ils auraient eu pour effet d’engendrer « une artificialisation de 89 870 m², soit l’équivalent d’environ 13 terrains de rugby ». Dans ce cadre, la Cnac a « veillé au respect des conditions dérogatoires » et a, toutefois, autorisé neuf autres projets artificialisants pour « 13 674 m² de surface de vente et 27 755 m² de sols artificialisés ».
De leur côté, les commissions départementales d'aménagement commercial (CDAC) ont vu leur nombre de décisions chuter de 30 % et la surface de vente totale examinée baisser quasiment d’autant (- 25 %). Dans le même temps, elles ont accordé 86 % de décisions favorables, un taux similaire aux dernières années. Et si 40 % des projets examinés par les CDAC ont fait l’objet de recours devant la Cnac, l’instance nationale a confirmé 40 % des avis des commissions départementales.
Reprise de friches
« L’année 2023 a été une année de transition pour les projets d’aménagement commercial conduisant à une baisse du nombre de recours », souligne, en préambule, la présidente de la Cnac, Anne Blanc, qui note que « la prise en compte du critère du zéro artificialisation nette, la forte hausse du coût des matériaux de construction ainsi que le rapprochement entre certaines enseignes de la grande distribution expliquent principalement cette tendance ».
Celle-ci reconnaît, néanmoins, que « le ZAN a provoqué un nouveau mode de développement commercial avec des alternatives comme la reprise de friches ou des projets visant à favoriser la mixité fonctionnelle ». Ainsi, en 2023, ce sont 16,7 % des avis favorables de la commission qui visaient une reprise de friche.
La présidente de la Cnac se félicite de « la volonté de contribuer collectivement à une évolution positive, constructive et vertueuse de l’urbanisme commercial ». D'ailleurs, sur les 21 projets soumis à la Cnac dans le cadre de la procédure de revoyure, 16 d’entre eux (ou 17, selon le chiffre évoqué dans le rapport) ont reçu un avis favorable, ces projets ayant été améliorés notamment sur « l’aspect imperméabilisation des sols ». « Cela atteste, pour la plupart des projets, des efforts produits par les demandeurs entre les deux examens en matière de végétalisation, d’énergie renouvelable, de consommation du foncier notamment », assure Anne Blanc.
« J’espère néanmoins qu’en 2024, une nouvelle étape soit franchie et que les projets "artificialisants" que nous aurons à examiner prévoiront une renaturation à proportion égale d’espaces artificialisés selon le principe de "tout ce qui sera pris" sur la nature devra être "rendu" », fait savoir la présidente de la Cnac.
Construction : toujours 20 000 ha consommés par an
Dans ce contexte, on peut rappeler que, dans son dernier bilan, le Céréma vient de dévoiler que la France consomme toujours autour de 20 000 hectares par an, bien que les constructions consomment de moins en moins d'espaces. Un impact du ZAN qui semble donc, pour l'heure, resté modeste, selon le centre d'études.
Alors que la loi Climat et résilience a établi un objectif de réduction par deux de la consommation foncière d’ici 2030 par rapport à la consommation mesurée entre 2011 et 2020 (l’objectif étant de passer de 250 000 hectares à 125 000 hectares, avant d’atteindre une artificialisation nulle en 2050), le défi semble encore particulièrement complexe à réaliser.
D’autant que des exceptions à la règle pourraient bien se démultiplier rapidement. Pour résoudre le casse-tête de la lutte contre l’artificialisation des sols sans remettre en cause les grands projets industriels ou d’infrastructures de transport, l’idée d’un « forfait national » a ainsi été élaborée afin que l’État puisse implanter des infrastructures sans grignoter le quota des régions concernées.
Seulement, ce forfait de 12 500 hectares risque de ne pas suffire. Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, l’a d’ailleurs confirmé : « Je l'ai toujours dit, le forfait de 12 500 hectares pourra être dépassé. Il est évolutif, et sera remis à jour chaque année pour intégrer les nouveaux projets. »
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