Dynamisation du commerce : une commission parlementaire mise sur le « volontarisme » des élus
Par Franck Lemarc
C’est l’éternelle question de l’œuf et de la poule : le développement exponentiel du commerce électronique est-il la cause ou la conséquence du déclin du commerce de proximité ? Les députés de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, dans un rapport rendu public le 26 janvier, tentent d’apporter des éléments de réponse sur les causes de la disparition de nombreux commerces de proximité – ou, a contrario, celles de leur développement dans certains territoires.
La démographie déterminante
Taux de vacance commerciale alarmant notamment dans les petites villes et les villes moyennes, désert commercial dans les petites communes – 60 % des communes rurales ne possèderaient plus aucun commerce de proximité… La disparition des commerces de proximité n’est pourtant pas, selon les rapporteurs, un phénomène national et homogène : contrairement aux idées reçues, « le nombre de commerces n’a cessé d’augmenter depuis 2000, toutes surfaces confondues ». Mais la croissance du commerce est très inégalement répartie.
Autre idée battue en brèche par les députés : le développement des zones commerciales en périphérie ne tue pas systématiquement le petit commerce des centres-villes. « En réalité, écrivent-ils, tous les cas coexistent : déclin en centre-ville et en périphérie, dynamisme commercial divergent entre le centre et la périphérie, dynamisme conjoint. »
De fait, la cause principale du développement ou du déclin du commerce de proximité est, tout simplement, la démographie. Les députés ont corrélé précisément les territoires qui ont perdu le plus de population et ceux qui ont perdu le plus de commerces : « Le commerce s’avère être le baromètre de la santé démographique et économique d’un territoire. »
Au-delà de ce facteur, ce sont bien « les actions conduites par les élus locaux » qui sont déterminantes : « L’évolution de la localisation des commerces s’analyse à une échelle infra-départementale, le plus souvent communale ou intercommunale », et les élus qui réussissent le mieux, en la matière, sont ceux qui « ont compris que l’enjeu du maintien des commerces de proximité va au-delà de leur fonction marchande » – les commerces étant « un lieu de sociabilité ouvert à tous les citoyens ».
Optimisme
Comment éviter, donc, ces centres-villes où les commerces au rideau fermé sont laissés « en l’état », « nourrissant l’idée d’une désertification des quartiers et donnant une image peu attractive à la ville » ? Les députés saluent la mise en place des programmes nationaux Action cœur de villes et Petites villes de demain, et, surtout, la « mobilisation des élus pour maintenir des commerces sur leur territoire ».
Ce qui passe notamment par le « rétablissement des flux, en actionnant tous les volets de l’attractivité d’une ville » ; accès aisé, piétonisation éventuelle, animation des quartiers commerçants. Le rapport se veut résolument optimiste : « On ne peut qu’être frappé par le nombre de villes qui, tout en subissant la fermeture d’entreprises, notamment industrielles, ont réussi à maintenir une offre de commerces pour leur population. Aucune situation n’est donc désespérée quand des élus font preuve de volontarisme, écoutent les conseils des urbanistes, comprennent l’intérêt d’une politique de digitalisation des commerces et in fine mobilisent toutes les compétences humaines présentes sur leur territoire. »
21 propositions
La vingtaine de proposition portée par la commission se répartit deux catégories : d’une part, des dispositifs d’aménagement urbain « ou de mesures d’appui à ces dispositifs » ; d’autre part, des propositions sur l’activité commerciale elle-même.
La commission propose notamment une « actualisation du règlement des marchés », une politique visant à « s’efforcer de retenir en centre-ville les services publics générateurs de flux de personnes », un inventaire national des friches commerciales. Ils plaident pour que communes et EPCI instituent des instances dédiées (conférences du commerce…) pour « structurer le dialogue entre élus et commerçants », et proposent même d’introduire de telles structures dans le Code général des collectivités territoriales. « Aucune opération commerciale ne devrait être lancée sans s’accompagner d’équipements et/ou de logements qui assurent la mixité des usages », proposent-ils.
Les députés demandent une refonte de la procédure d’autorisation en CDAC « afin de permettre aux élus d’assurer leur stratégie commerciale au regard de leur recherche d’équilibre sur les différents espaces des territoires dont ils ont la charge », et plaident pour que les élus « améliorent la prise en compte des problématiques logistiques lors de l’élaboration des documents de planification territoriale (Sraddet, SCoT, PLUi) en y intégrant les flux de personnes et de marchandises vers les commerces de proximité ».
Sur le terrain financier, la commission demande la pérennisation des aides financières comme celles prévues par le fonds Friches, « permettant de réaménager les friches commerciales et le cas échéant de modifier leur destination ». Par ailleurs, sur le plan fiscal, la commission propose une « convergence » de la fiscalité des commerces physiques et des commerces en ligne, « en commençant par réformer la taxe sur les surfaces commerciales », qui handicape lourdement les premiers. « Une telle démarche complexifierait le droit fiscal mais elle semble nécessaire pour assurer l’équité entre commerce physique et commerce électronique », notent les députés.
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