Emmanuel Macron annonce avoir décidé de supprimer un échelon de collectivités, si son camp l'emporte aux législatives
Par Franck Lemarc
La chose est passée un peu inaperçue dans le discours de plus d’une heure que le chef de l’État a prononcé en introduction de la conférence de presse, avant de répondre aux questions de la presse. Mais les mots ont été prononcés : « Il faudra supprimer un échelon territorial ». Emmanuel Macron n’est donc plus au stade du questionnement, comme lors de précédentes déclarations, où il parlait de « réfléchir à la question de la suppression d’une strate » : sa décision semble prise.
« Simplifier drastiquement »
Le chef de l’État a évoqué pendant la conférence de presse le chapitre de la « simplification » : « Vivre mieux c’est aussi une vie plus simple, notamment dans le rapport à l’État, aux normes et aux services publics – c’est le message qui nous a été envoyé » . Le chef de l’État souhaite donc, si l’actuelle majorité l’emporte le 7 juillet, « simplifier drastiquement et alléger le rapport aux territoires, (car) il y a un besoin de liberté et de proximité ». C’est là que le président a lâché sa petite phrase : « Il nous faut déconcentrer beaucoup plus rapidement mais il nous faudra supprimer un échelon territorial pour ramener plus de simplicité et de liberté sur le territoire. »
Par ailleurs, le chef de l’État a décidé de « rouvrir la question de ces grandes régions qui ont éloigné la décision » et « redonner la liberté de choix à nos compatriotes s’ils veulent revenir sur ce sujet ».
En soit, le fait qu’Emmanuel Macron rouvre le débat du nombre de strates de collectivités ne surprend pas, puisqu’on le sait favorable à la suppression d’un échelon depuis longtemps – tout comme son ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, qui a fait l’hiver dernier des déclarations dans ce sens.
Mais ce qui est plus étonnant, c’est que le chef de l’État a demandé à deux élus, le député Éric Woerth et le maire de Charleville-Mézières, Boris Ravignon, de travailler sur le sujet de la décentralisation ; et que les deux rapporteurs ont formellement exclu la solution de supprimer un échelon.
Pour le maire de Charleville-Mézières, les choses sont claires : « La France n’a pas une catégorie de collectivités à supprimer, une strate d’élus à liquider pour que tout s’arrange, pour remédier à l’impuissance publique, pour combler les déficits. » Quant au député de l’Oise, son avis est tout aussi tranché, même s’il estime dans son rapport nécessaire de « mieux identifier les responsabilités » des différentes strates.
Quel niveau « supprimer » ?
Emmanuel Macron a donc choisi de ne pas écouter ces préconisations. Il reste à savoir quel niveau de collectivité il souhaite supprimer. Cela ne peut être les régions, puisqu’il a parlé à leur sujet d’éventuellement en redessiner les contours. On ne peut guère imaginer qu’Emmanuel Macron veuille supprimer les communes. Il reste donc, une fois encore, les départements. Soit dit en passant, le chef de l’État a mentionné l’action de ceux-ci, sans les nommer, lorsqu’il a évoqué dans son discours une refonte complète de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) – dont on sait qu’il s’agit d’une des compétences essentielles des départements. Emmanuel Macron semble envisager – comme plusieurs ministres l’ont évoqué récemment – une « renationalisation » de l’ASE, puisqu’il a parlé de « construire une vraie politique nationale de l’Aide sociale à l’enfance » .
Interrogé par les journalistes sur ces déclarations, le président de la République n’a pas dit clairement quels sont ses projets, répétant simplement que bien que « nos élus locaux (fassent) un travail formidable, on voit bien qu’il y a trop de niveaux » . Il a seulement évoqué l’idée d’une nouvelle architecture autour de « deux blocs », « un bloc local et un bloc territorial » , remettant au passage sur la table « ce qu’on appelle le conseiller territorial » . Le conseiller territorial étant, dans l’esprit de la réforme morte-née de Nicolas Sarkozy, à la fois un élu régional et départemental, on peut penser que le chef de l’État a dans la tête une fusion des régions et des départements. Ce qui ne serait pas sans poser de considérables problèmes, dans la mesure où les départements, comme tous les maires le savent, jouent en rôle clé de soutien local aux politiques menées par les communes dans de nombreux domaines. Une telle décision apparaîtrait donc comme totalement contradictoire avec la volonté présidentielle, exprimée hier, de « rapprocher » l’action publique des habitants.
De façon surprenante, ni Régions de France ni départements de France n’ont réagi, depuis à ces propos, ni par communiqué ni sur X (twitter).
Accès aux services publics
Notons enfin que dans cette conférence de presse, Emmanuel Macron a évoqué le sujet de l’accès à certains services publics. « Il faut reconnaître que dans certaines villes, certains quartiers, dans la ruralité, nous devons avoir une réponse beaucoup plus drastique sur l’accès aux transports, à la santé et au logement. Beaucoup de choses ont été faites, mais (…) ça ne va pas assez vite. Il faut une révolution copernicienne d’action. » Il faudra attendre que paraisse le programme des candidats de l’actuelle majorité pour en savoir plus sur cette « révolution copernicienne » , sur des sujets dont certains, comme les transports, relèvent en partie de la compétence des élus locaux.
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