Éclairage public : les stratégies des collectivités pour tendre vers plus de sobriété énergétique
Par Lucile Bonnin
La Fabrique de la cité – groupe de réflexion sur les transitions urbaines – a publié une note portant sur l’éclairage public et les mesures mises en place par les collectivités à l’aune de la crise énergétique de l’hiver 2022.
Face aux pénuries de gaz et d'électricité, les collectivités territoriales ont été plus que jamais invitées à s’engager pour atteindre l’objectif de réduction de 10 % de la consommation énergétique d’ici 2024 fixé par le gouvernement. Des mesures d’extinction de l’éclairage ont pu être prises dans certaines communes par exemple.
« Cette expérience collective a pu inspirer des innovations politiques, conforter des expériences citoyennes, accélérer le déploiement de nouvelles technologies », observent les auteurs de la note. La question de l’éclairage public a depuis été prise en main par certaines collectivités, « avec des résultats inspirants. »
Gouvernance et financement
La Fabrique de la cité rappelle que « par défaut, la compétence éclairage public est aux mains des communes, qui peuvent faire le choix de la déléguer à une intercommunalité, à fiscalité propre ou non ». Concrètement, les communes « peuvent aussi déléguer seulement l’investissement, ou aussi la gestion et l’entretien de leur parc ». Plusieurs options s’offrent donc au bloc communal même si le pouvoir de police générale reste dans tous les cas au maire qui est responsable de la sécurité publique.
Le parc d’éclairage public d’une commune peut être géré par un acteur privé. « Dans ce cas, il existe plusieurs formes de contractualisation pour l’investissement ou la gestion du parc, qui donnent plus ou moins de responsabilités au mandataire. »
La commune de Libourne a par exemple conclu avec un acteur privé « un marché global de performance ». Le principe : « le prestataire est rémunéré sous condition de l’atteinte des objectifs de réduction de consommation d’énergie ». Ici l’objectif est de renouveler 100 % du parc en LED d’ici 6 ans.
L’investissement dans le nouveau matériel est cependant pris en charge par la commune. A Libourne, on utilise « un outil original pour financer cet investissement : la location avec option d’achat. Pour l’achat du matériel, la commune a contracté une LOA, et à l’issue du paiement des loyers à la banque, la commune peut poser une option d’achat pour un euro symbolique. » Ce choix en matière de gestion de l’éclairage « a permis à la commune d’alléger la charge de l’investissement et de la faire porter sur le budget de fonctionnement. »
Pollution lumineuse et mise en valeur patrimoniale sobre
D’autres leviers ont pu émerger ces dernières années à travers les pratiques des collectivités. Les auteurs soulignent que « l’extinction reste un sujet délicat pour les communes, puisqu’elle touche à des représentations en matière d’insécurité et de fréquentation de l’espace public. » Ainsi, les solutions employées pour tendre vers davantage de sobriété doivent être progressives.
La commune d’Annemasse « a adopté en 2009 une stratégie de renouvellement des candélabres et d’abaissement de l’intensité lumineuse en cœur de nuit ». La commune a opté pour une « stratégie progressivement à partir de 2016, en débutant par ses espaces naturels et son corridor écologique (parcs, bords d’Arve) ainsi que la zone commerciale en périphérie, puis les cœurs d’îlots résidentiels, où il y a peu d’usages la nuit, puis en adaptant l’intensité et les plages où l’éclairage est allumé en fonction des usages ».
A Mulhouse, un plan lumière a été mis en place poursuivant à la fois des objectifs de réduction de la consommation électrique et d’économies d’énergie, mais aussi des stratégies de mise en valeur du patrimoine. Ce plan « prévoit de réduire de 70 % les consommations énergétiques de l’éclairage, un passage à 100 % de LED, la rénovation des armoires pour passer à une télégestion, gagner en efficacité et mettre en valeur le patrimoine culturel. »
Enquête de terrain : une bonne pratique
Pour développer des politiques d’éclairage public plus responsables, « l’enquête de terrain et le concours de sciences humaines et sociales sont essentiels » car ils « contribuent à la réalisation de diagnostics territoriaux complets des usages des espaces nocturnes et des besoins associés ».
Des craintes de la part des habitants existent sur le rapport entre extinction de l’éclairage et insécurité et, comme le pointe Sébastien Vauclair, président du bureau d’études Dark Sky Lab, « on ne peut pas balayer d’un revers de manche les ressentis des personnes qui fréquentent les lieux ». Par ailleurs, « l’éclairage représente aussi pour certains citoyens un lien avec les services publics, le fait de ne plus en avoir peut être vécu comme un abandon des pouvoirs publics, notamment pour des petits villages ou hameaux. »
Brest Métropole semble avoir intégré cette notion puisque dans sa stratégie elle travaille « de manière transversale avec tous les services concernés par la nuit et l’éclairage public, les acteurs économiques qui ont un parc d’éclairage privé, [et surtout] les habitants des différents espaces, concernés au premier chef par les choix d’éclairage faits sur leur lieu de vie. » Résultat : cette stratégie a permis « une réduction de la consommation d’énergie de 45 % en 2023 par rapport à 2014 et un équipement du parc en LED à hauteur de 40 %. »
Il apparaît judicieux de mettre la concertation au cœur de toutes les décisions concernant l’éclairage public. D’ailleurs, les auteurs de la note confirment que la concertation paraît d’autant plus intéressante que, « dans les collectivités étudiées où l’extinction est pratiquée, les réactions sont souvent meilleures que celles auxquelles s’attendaient élus et services, et quelques explications sur les raisons de l’extinction permettent la plupart du temps de convaincre les réticents. »
Consulter la note dans son intégralité.
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