Centres de vaccination : un maillage toujours plus inégal
Lundi, les trois associations nationales d’élus (AMF, ADF et Régions de France), publiaient un communiqué pour demander, encore une fois, « un maillage équilibré des centres de vaccination (…), crucial pour garantir une équité territoriale en tenant compte des zones rurales souvent sous-dotées. » La réalité est en effet tout autre.
Les semaines passant, on s’éloigne en effet de plus en plus de la stratégie qui avait été décidée au début de la campagne de vaccination, consistant à installer entre 5 et 7 centres de vaccination par département – soit un total de 500 à 700 centres dans le pays. Or le nombre de centres dépasse aujourd’hui les 1000 dans le pays, avec des inégalités criantes d’un département à l’autre.
Maillage défaillant
Le fichier mis à jour hier par le ministère de la Santé donne un total de 1080 centres de vaccination dans l’ensemble du pays. Mais attention, certains de ces centres ne sont pas ouverts au grand public et sont réservés aux personnels de santé. Cela concerne 59 centres. Il reste donc 1021 centres de vaccination qui, eux, sont bien ouverts au grand public. Ce qui, naturellement, pose la question de leur approvisionnement, d’autant plus dans une période où les laboratoires annoncent des livraisons inférieures aux prévisions dans les semaines à venir.
Mais le principal problème reste celui du maillage. Les 1021 centres ne se répartissent pas autour d’une dizaine par département : au contraire, les différences se creusent entre départements. Lors du premier décompte que Maire info avait réalisé, le 15 janvier, nous relevions déjà le cas de la Haute-Garonne et ses 33 centres. Ce sont aujourd’hui trois départements qui dépassent les 30 centres : les Alpes-Maritimes (31), la Haute-Garonne toujours (qui est passée à 35), et le Nord (36). Il y a par ailleurs entre 20 et 30 centres dans 4 départements : les Bouches-du-Rhône (22), l’Essonne (20), l’Hérault (24), et le Pas-de-Calais (23).
À l’inverse, plusieurs départements restent fortement sous-dotés, c’est-à-dire en-dessous des « cinq à sept » centres prévus initialement : c’est notamment le cas de la Guyane, de la Meuse, de la Haute-Loire et du Territoire de Belfort, qui ne comptent que trois centres ; de l’Ain, du Cantal, de la Haute-Marne, des Hautes-Alpes, de la Guadeloupe et de la Martinique, qui n’en ont que quatre.
Il faut cependant noter que certains départements ont rattrapé leur retard en une dizaine de jours : la Sarthe, qui ne comptait que deux centres le 15 janvier, en a aujourd’hui neuf.
Ces inégalités restent difficiles à expliquer, car elles ne semblent directement corrélées ni à la population du département (la Lozère et ses 75 700 habitants ont plus de centres de vaccination que le Loiret qui en compte presque 680 000) ; ni, directement, au taux d’incidence. Certes, des départements dont le taux d’incidence est très élevé, comme les Alpes-Maritimes (441) ont un grand nombre de centres (31). Mais le Finistère, qui a un taux d’incidence parmi les plus bas du pays (70) compte 17 centres quand la Meuse (TI de 268) n’en bénéficie que de 3.
Ces chiffres ne sont sans doute pas définitifs, puisque les ARS ont communiqué dernièrement aux maires que certains centres allaient fermer et que de nouveaux allaient ouvrir. Et la campagne de vaccination va encore durer des mois. Il faut donc espérer qu’au sein des cellules départementales de vaccination, préfets et ARS vont tenir compte de la demande des associations d’élus, pour éviter que se développe, dans les départements sous-dotés, un sentiment de frustration, pendant que, dans les départements les mieux fournis, les trop nombreux centres ne seront pas suffisamment approvisionnés.
Répartition des vaccins
Le gouvernement a également, conformément à son engagement, ouvert les fichiers de livraisons de vaccins. Enfin, presque conformément à son engagement : le ministre Olivier Véran avait promis la semaine dernière que serait publié « le nombre précis de doses dont chaque centre de vaccination dispose chaque semaine ». Ce n’est pas le cas : les données publiées sont régionales. Elles permettent de connaître le nombre de flacons et le nombre de doses livrées aux plates-formes logistiques et aux établissements pivots de chaque région. La ventilation vers les centres de vaccination n’est donc pas connue à ce jour.
Pour ne rien simplifier, la méthode de comptage va également changer : chaque flacon livré par Pfizer contenait au départ 5 doses individuelles, mais le laboratoire a annoncé que – sans changer le contenu des flacons – il fallait maintenant en compter 6.
Où en est-on ? À ce jour, les établissements se sont vu livrer 3,11 millions de doses (Pfizer et Moderna). La répartition, là encore, n’est pas alignée sur la la prévalence du virus dans les régions : la Nouvelle-Aquitaine, avec presque 360 000 doses reçues, est beaucoup mieux fournie que le Grand est (environ 280 000 doses). Mais les calculs, rappelle le gouvernement, tiennent aussi compte de la proportion de personnes âgées de plus de 75 ans sur le territoire.
En valeur absolue, la région la mieux fournie est l’Île-de-France (416 000 doses reçues environ). Les collectivités ultra-marines semblent, en valeur absolue toujours, les parents pauvres de la répartition : La Réunion a reçu quelque 18 000 doses, la Martinique 12 000, la Guadeloupe 16 000. Et la Guyane, 4 095. Ramenés à la population de ces régions, de fortes disparités apparaissent : la Guyane a touché une dose pour 71 habitants, quand la Normandie en a une pour 18 habitants, le Grand Est une pour 20 et l’Île-de-France une pour 29.
Franck Lemarc
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