PLF 2020 : en séance, les sénateurs confirment leur souhait de reporter d'un an la réforme fiscale
Suivant la proposition de la commission des finances (lire Maire info du 15 novembre), les sénateurs ont validé à leur tour, lors de l’examen en séance du projet de loi de finances (PLF) pour 2020, la réforme de la fiscalité locale, mais ont souhaité différer son entrée en vigueur d’un an, au 1er janvier 2022, contre l’avis du gouvernement. L’objectif : permettre la réalisation de simulations complémentaires sur les conséquences financières de la réforme afin de l’« ajuster ». Les élus du Palais du Luxembourg en ont profité pour majorer les compensations qui seront reversées aux collectivités.
Majoration des compensations de TH
« Prenant acte de l’extension [de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales] au 20 % des ménages les plus favorisés et de son extinction totale en 2023 », les sénateurs ont jugé que cette réforme était « prématurée » et que le schéma de compensation envisagé « nécessite des travaux complémentaires », selon l’exposé des motifs de l’amendement du rapporteur général de la commission des finances du Sénat, Albéric de Montgolfier, qui pointe un « certain nombre d’effets financiers importants » qui n’ont « pas été évalués » ou de manière « approximative ».
En cause notamment, le potentiel fiscal et le potentiel financier. « Sans modification des méthodes du calcul de [ces derniers], le classement des collectivités territoriales en fonction de ces indicateurs sera profondément bouleversé à l’issue de la réforme », estime le sénateur d’Eure-et-Loir (lire à ce sujet Maire info du 4 novembre) qui préconise des « travaux complémentaires ».
Reprenant à leur compte les « failles » décelées en commission, les sénateurs ont adopté une série d’amendements techniques permettant de « corriger les effets indésirables » et de « s’approcher plus fidèlement du montant des recettes » de taxe d’habitation sur les résidences principales de l’année qui précède la réforme. Pour cela, ils ont décidé de majorer les futures compensations en les « revaloris[ant] à l’inflation » et sont revenus sur la revalorisation des valeurs locatives adoptée par l’Assemblée nationale (lire Maire info du 10 octobre) en choisissant le taux de +1,1 % basé sur l’indice des prix à la consommation harmonisé (et non celui de +0,9 % basé sur l’indice des prix à la consommation).
Les sénateurs ont également souhaité que le « gouvernement permette au moins aux communes de conserver les ressources issues des hausses de taxe d’habitation de 2018 et 2019 », afin de ne pas « leur planter un second couteau dans le dos » et leur faire perdre « 160 millions d’euros ». Ils ont, par ailleurs, adopté, contre les avis de la commission et du gouvernement, une exonération de la TH pour les locaux des établissements d’assistance privés non lucratifs sanitaires, sociaux et médico-sociaux.
Le Loto du patrimoine exonéré de taxation
Bien que le gouvernement se soit engagé à compenser le Loto du patrimoine des taxes habituellement prélevées par l'État sur les jeux et loteries, le Sénat a décidé d'exonérer celui-ci des « 14 millions d'euros » de taxes qu’il verse, comme le réclame l'animateur Stéphane Bern, qui a été missionné sur ce sujet. Une disposition qu’avaient déjà adoptée, l’an dernier dans le PLF pour 2019, les sénateurs mais qui n’avait pas été retenue dans le texte final. Cette année aussi, le gouvernement s’y est montré défavorable.
Afin de « financer la mission d’aménagement du territoire qui est confiée » à La Poste, ces derniers ont également relevé le plafond des allègements de fiscalité locale dont celle-ci bénéficie, avec l’avis favorable du gouvernement cette fois. « Le relèvement du plafond actuel, de 95 % à 99 %, permettra de garantir la stabilisation de la compensation par l’État de cette mission de service public à hauteur de 174 millions d’euros par an », selon les auteurs de l’amendement.
Ces abattements viendraient ainsi alimenter le Fonds postal national de péréquation territoriale qui contribue au maintien de services postaux sur l’ensemble du territoire et plus particulièrement dans les zones rurales et de montagne, les quartiers prioritaires de la politique de la ville et les départements et régions d’outre-mer. Il contribue également au financement des maisons de services au public et futures Maisons France services hébergées par La Poste.
Taxes sur les bureaux et surfaces commerciales
La Haute assemblée a, par ailleurs, décidé de moduler le taux de la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom), selon le lieu d’implantation des grandes surfaces. Ainsi, « si l’établissement se situe en centre-ville, le montant de la taxe est réduit de 50 %, alors qu’il est majoré de 50 % si le commerce se situe en périphérie ». Cette modulation permettrait « d’encourager le retour des grandes surfaces en intra-urbain » et d’agir « en faveur de la revitalisation des centres-villes, de la consommation d’espaces naturels, et de privilégier l’implantation de commerces dans des lieux déjà urbanisés et artificialisés ».
Il a, en outre, été validé que l’assiette de la Tascom intègre les entrepôts de stockage des « pure players » (entreprises de commerce en ligne ). Cette mesure, pour laquelle gouvernement et commission ont donné un avis défavorable, permettrait de « rétablir une équité fiscale et territoriale entre tous les acteurs du commerce tout en octroyant aux collectivités locales une nouvelle ressource fiscale », ont justifié les auteurs de l’amendement.
La Haute assemblée a également supprimé l’augmentation de 20 % de la taxe sur les bureaux dans un périmètre ciblé de l’Ile-de-France et exclu les parcs de stationnement commerciaux de la taxe annuelle sur les bureaux en Île-de-France.
Enfin, les sénateurs ont rétabli la taxe dite « Apparu » sur les micro-logements - qui vise les propriétaires bailleurs qui perçoivent des loyers élevés provenant de la location de logements de petites surfaces.
A.W.
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