Maire-info
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Édition du vendredi 20 décembre 2024
Budget de l'état

La loi spéciale adoptée, François Bayrou annonce qu'il reprendra le PLF 2025 dans sa version déjà amendée

Alors que le versement de la DGF est désormais garanti pour le début d'année 2025, le Premier ministre a annoncé qu'il ne repartirait pas d'un tout nouveau projet de budget. Ce qui laisse entrevoir une possible réduction de l'effort initial demandé aux collectivités pour l'an prochain.

Par A.W.

La loi spéciale a été définitivement adoptée, mercredi, par le Parlement après le vote des sénateurs qui ont approuvé, dans les mêmes termes que les députés deux jours plus tôt, ce texte d’urgence destiné à éviter un « shutdown »  et le blocage des administrations du pays dès les premiers jours de l’année 2025. 

Sauf saisine – qui paraît improbable – du Conseil constitutionnel d’ici sa promulgation dans les tout prochains jours, c’est bien ce texte atypique qui assurera « la continuité de la vie nationale »  et évitera la paralysie budgétaire, en autorisant l'exécutif à prélever l'impôt et à emprunter pour financer l'État, les collectivités et la Sécurité sociale à compter du 1er janvier. 

« Cette loi spéciale donne tout ce qu'il faut à l'État pour assurer ses fonctions essentielles au début de 2025, mais rien de plus. Elle devra être complétée le plus rapidement possible », a prévenu le rapporteur général de la commission des finances au Sénat, Jean-François Husson.

Versement de la DGF garanti

En attendant la constitution d'un gouvernement de plein exercice autour de François Bayrou et d'un véritable budget pour l'année 2025, cette loi garantit ainsi aux collectivités le versement de leurs dotations de fonctionnement pour les prochaines semaines. 

Pour s’en assurer, les députés avaient d’ailleurs fait approuver un amendement sécurisant de manière « explicite »  leur financement, sans que les sénateurs ne reviennent dessus. Ces derniers ayant, au passage, rejeté le seul amendement déposé à la chambre haute dont le but était de garantir, cette fois, les ressources des associations.

Concrètement, les collectivités percevront donc bien, dès janvier, leur DGF sur la base de son montant global et des règles d’attribution de l’année 2024. Elle sera ainsi « versée par douzièmes dès le début de l'année »  (pour les enveloppes faisant l’objet d’un versement mensuel), avant que son montant ne soit « régularisé »  après l’adoption du prochain projet de loi de finances (PLF).

Reprenant les mesures inscrites dans le budget 2024, la loi spéciale permet de ne pas modifier les règles du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), de ne pas minorer la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) ou encore de maintenir l’« amortisseur électricité »  qui impose à l’État de prendre en charge une partie de la facture d’électricité des collectivités territoriales qui ont subi une hausse importante des prix. Trois dispositions, parmi d’autres, qui devaient être revues dans le projet de budget pour 2025 concocté par Michel Barnier, avant la censure.

En revanche, si les élus locaux pourront bien bénéficier de la dotation de soutien à l'investissement local (Dsil), la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) ou encore du Fonds vert pour leurs dépenses déjà engagées, ils devront attendre l'adoption du budget 2025 pour percevoir à nouveau ces dotations sur leurs nouvelles dépenses. Sauf exceptions liées à une situation d’urgence.

Parmi les multiples conséquences de la censure du gouvernement Barnier, le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, avait indiqué la semaine dernière qu’il ne sera « pas possible »  de débloquer un prêt de 1 milliard d’euros destinée à la Nouvelle-Calédonie pour « sécuriser le paiement des situations d'urgence, le paiement des fonctionnaires ou certaines aides critiques », que « la mise en œuvre des mesures fiscales relatives au zonage (FRR), notamment pour les 2 800 collectivités concernées, relève de la décision d’un prochain gouvernement »  et que certaines dispositions de la loi sur les meublés de tourisme ne pourront être appliquées, celle-ci rabotant fortement la niche fiscale très favorable qui leur est octroyée.

Budget 2025 : vers une ponction réduite pour les collectivités ?

Des mesures d’urgence qui ne resteront en vigueur que jusqu’au bouclage définitif du budget dont l’adoption est attendue d’ici la « mi-février », selon la perspective développée, hier soir, par François Bayrou sur le plateau de France 2. « Il faudra bien que ce soit totalement bouclé »  à cette échéance, a-t-il assuré. 

Refusant visiblement de repartir d’un tout nouveau projet, le Premier ministre a également annoncé vouloir reprendre, non pas la copie initialement concoctée par Michel Barnier, mais « la copie qui a été votée ». Le maire de Pau fait ainsi référence à la version du PLF pour 2025 intégrant les nombreux amendements approuvés par les parlementaires lors des débats, mais dont l’examen a été suspendu par la censure. 

L’une des conséquences directes de ce choix serait que l’effort demandé aux collectivités en 2025 soit moins important que ce que prévoyait le projet d'origine de Michel Barnier.

Juste avant la censure, les sénateurs ont, en effet, eu le temps d’abaisser de 3 milliards d’euros le prélèvement annoncé sur les collectivités en adoptant une série de mesures favorables, telles que l’augmentation du montant de la DGF, le relèvement du plafond des DMTO ou encore la suppression de la mesure gouvernementale amputant le FCTVA (pour un gain total d’un peu plus d’un milliard d’euros).

Surtout, ils étaient revenus sur le très controversé projet de « fonds de précaution »   – jugé « trop brutal et inabouti »   et qui prévoyait de ponctionner de 3 milliards d’euros les 450 plus importantes collectivités – pour le remplacer par un nouveau dispositif plus favorable aux départements. 

Le projet remodelé par la chambre haute prévoyait ainsi un mécanisme qui ne devait opérer « aucun prélèvement de ressources », mais plutôt « lisser dans le temps les recettes des collectivités qui sont en mesure de contribuer au redressement des comptes publics ». Et cela via une contribution de « 1 milliard d’euros »  (au lieu des 3 milliards prévus), tout « en tenant compte du niveau de leurs recettes mais aussi de leurs situations financières relatives ». 

Cette version remodelée devait, toutefois, élargir le fonds de précaution à bien plus de communes mais concerner moins de départements, tout en abaissant le prélèvement sur chaque collectivité. 

Mesures consensuelles : un vote réclamé en janvier

Au Sénat, de nombreuses voix ont appelé à reprendre les débats sur le projet de loi de finances là où ils se sont arrêtés, tout comme les députés macronistes. Une solution qui « accroît [le] risque de censure, mais cela va plus vite. Cela me paraît plus rationnel », a souligné le président de la commission des Finances à l'Assemblée nationale, Eric Coquerel (LFI), tandis que le rapporteur général du Budget à l'Assemblée nationale, Charles de Courson (Liot), s’est lui prononcé pour la rédaction de « deux nouveaux textes »  (PLF et PLFSS).

S'attendant à ce que le projet de loi de finances ne soit pas adopté avant plusieurs mois, ces derniers ont adressé au Premier ministre un courrier afin de s’entendre sur des mesures urgentes et consensuelles.

Ils lui ont ainsi suggéré d'inscrire à l'ordre du jour des députés, dès la semaine du 13 janvier, un projet de loi portant diverses dispositions économiques, financières et sociales, permettant l'entrée en vigueur de mesures budgétaires urgentes et consensuelles – dont l'indexation sur l'inflation du barème de l'impôt sur le revenu. 

Le Premier ministre se serait montré « ouvert »  à cette proposition, selon les deux députés, bien que Matignon n'ait pas confirmé cette information.

Consulter la loi spéciale.
 

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