2024 en France ou le visage humide du changement climatique
Par Benjamin Legendre (AFP)
Avec une température moyenne provisoire entre 14°C et 14,1°C, l'année 2024 pourrait terminer au troisième ou quatrième rang des annales en France, qui remontent à 1900, selon les données dévoilées dans un pré-bilan de Météo-France. L'année 2024 serait ainsi seulement battue par le record national de 2022 (14,5°C), presque égalé en 2023, et se conclurait proche des températures de 2020, l'éphémère record précédent. « Signe du changement climatique, 9 des 10 années les plus chaudes en France sont postérieures à 2010 », souligne d'ailleurs Météo-France.
Mais la température moyenne de 2024 ne devrait pas rester exceptionnelle longtemps: Météo-France s'attend à ce qu'elle soit dépassée « plus d'une année sur deux » d'ici 2050, compte-tenu de la trajectoire actuelle des émissions de gaz à effet de serre de l'humanité. « Illustrant la raréfaction du froid sur notre pays », la barre des 40°C a été de nouveau franchie plusieurs fois dans le sud de la France en 2024, et le thermomètre « n'est pas descendu en dessous de - 15 °C en plaine » comme déjà en 2023.
Selon l'observatoire, les températures en France sur la période 2015-2024 ont été en moyenne 2,2°C plus chaud qu'à la période pré-industrielle, avant la combustion massive d'énergies fossiles et les premiers signes du réchauffement climatique. Conséquence de cette évolution: la métropole a connu 13 jours de vague de chaleur en moyenne sur cette période, contre 2 par an en 1961-1990. A l'inverse, il y a eu moins d'une journée par an de vague de froid généralisée sur les dix dernières années contre 6 auparavant dans les années 1960, 1970 et 1980.
Sols gorgés
Mais là où 2022 fut très chaud et sec, 2024 restera comme une année exceptionnellement humide, causant des inondations à répétitions et des récoltes de vins ou céréales désastreuses par endroits. Avec 15% de précipitations au-dessus des normales, 2024 figure « parmi les 10 années les plus pluvieuses » depuis 1959, selon l'agence météorolgique nationale.La France a dans le même temps connu « le plus grand déficit d'ensoleillement depuis 30 ans » (- 10 %), « proche » des niveaux « historiquement bas des années 1987 ou 1992, 1993, 1994 » .
Dès le début de l'année, les Hauts-de-France ont subi des inondations majeures. Mi-mai, jusqu’à un ou deux mois de précipitations sont tombés en deux jours en Moselle et dans le Bas-rhin. Septembre, le plus arrosé en France depuis 25 ans, a notamment été marqué par des « crues torrentielles destructrices en Isère » , dans le sud-est du pays, rappelle Météo-France. En octobre, l'Ardèche subissait un épisode cévenole record, avec 500 mm en une journée par endroits, tandis que la tempête Kirk provoquait des inondations en Seine-et-Marne et en Eure-et-Loire.
A Paris, avec 850 mm tombés depuis le 1er janvier, 2024 se classe « déjà au 2e rang » des archives, indique Météo-France. La Corse, en revanche, a connu une année sèche. Gorgés d'eaux, « les sols sont restés plus humides que les normales pendant huit mois, du jamais vu depuis plus de trente ans » , relève le bilan.
Un avant-goût de l'avenir ? Pas forcément, car selon les projections climatiques pour la France les « précipitations resteront très variables et leur évolution sur le long terme, à l'échelle nationale, est très incertaine ». Météo-France s'attend toutefois à « une hausse des précipitations en hiver et une baisse en été », soit une répartition annuelle défavorable pour l'agriculture ou la prévention des crues. De plus, « les précipitations efficaces », c'est-à-dire celles qui pénètrent les sols, bénéficient aux cultures et remplissent les nappes phréatiques, « vont diminuer sous l'effet de la hausse des températures », avertit l'agence nationale.
Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2