PLF 2021 : DETR, taxe de séjour, dotation d'intercommunalité... les députés ont largement amendé la mission « Relations avec les collectivités »Â
L’Assemblée a décidé, hier, de recentrer la DETR sur les territoires ruraux, de réajuster les prélèvements sur la dotation d’intercommunalité mais aussi d’autoriser les collectivités à augmenter la taxe de séjour pour les hébergements touristiques non classés dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2021. Le vote solennel est prévu mardi.
A l’occasion de l’examen de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », les députés d’opposition ont fustigé la politique du gouvernement à l’égard de ces dernières alors que celui-ci a, au contraire, assuré qu’il comptait renforcer leurs moyens.
« Etat ingrat » contre « renforcement des moyens »
Avec la suppression de la taxe d’habitation, la baisse de 10 milliards d’euros des impôts de production et les pertes de recettes, « les collectivités vont renouer l’année prochaine avec une forme d’État ingrat qui demande beaucoup, aide un peu et contrôle à l’excès – voire entrave – les mouvements de cette jambe indispensable, en bridant son autonomie », a jugé le député de Seine-Maritime Sébastien Jumel (PCF).
Un Etat qui renforce d'autant « leur dépendance à son égard » que « les collectivités, d’année en année, collectent toujours moins de ressources propres et reçoivent toujours plus de dotations », a déploré le député corse Jean-Félix Acquaviva (Libertés et Territoires).
Un sentiment renforcé, selon la députée du Puy-de-Dôme, Christine Pires Beaune (PS), par le fait que « les crédits du PLF pour 2021 sont tout à fait insuffisants au regard du contexte », regrettant « vivement la faiblesse du dispositif de garantie des ressources des collectivités » et rappelant que le projet de décret ne concerne que « 2 500 communes, sur les 12 000 à 14 000 annoncées par le gouvernement (...) pour des montants très modestes » (lire Maire info du 2 novembre).
De son côté, le député de l’Essonne Robin Reda (LR) a rapporté que « les élus locaux s’inquiètent de la solitude financière dans laquelle nous laissons les exécutifs territoriaux de notre pays », reprenant à son compte les propos d’André Laignel, président du Comité des finances locales : « Ce PLF pour 2021 est calamiteux pour les collectivités. Il acte un recul de leurs libertés, met en place une compensation fiscale insuffisante, poursuit le rationnement des dotations et ne compense pas la perte de recettes et de coûts induits par la crise de la covid-19 ».
Devant ce front commun des oppositions, la ministre de la Cohésion des territoires, Jacqueline Gourault, a rejeté ces accusations et défendu un « renforcement des moyens accordés aux collectivités locales » avec 3,9 milliards d'euros prévus pour 2021. « L’année prochaine, les collectivités recevront même de l’État des moyens plus élevés qu’en 2020, avec une augmentation des concours financiers de 1,2 milliard d’euros en 2021, déduction faite des mesures de périmètre », a-t-elle soutenu, notant que si « les pertes de recettes et donc la compensation (sont) moins élevées que prévu, c’est plutôt une bonne nouvelle ! ».
Airbnb : taxe de séjour déplafonnée
Plusieurs dispositions concernant la taxe de séjour ont été adoptées cette nuit. Les collectivités devraient ainsi pouvoir augmenter la taxe de séjour réglée pour les nuitées dans les hébergements touristiques non classés, les députés ayant validé un amendement de Christophe Jerretie (Corrèze, MoDem) visant à supprimer le plafonnement à 2,30 euros de la taxe de séjour. Celle-ci pourra ainsi passer à 4,10 euros par nuitée au maximum, soit le même plafond que pour les palaces. Il s'agit de réparer une « inéquité » avec les hôtels et aussi d'être au niveau d'autres capitales européennes, a soutenu le rapporteur général Laurent Saint-Martin (LaREM).
La possibilité a également été accordée aux communes et EPCI d’élever le plafond d’abattement sur la taxe de séjour forfaitaire pour les hébergements touristiques à 80 % afin « d’alléger une charge fixe qui peut devenir handicapante quand la fréquentation touristique est quasi nulle ».
Toujours concernant la taxe de séjour, la date limite de délibération des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et des communes a été avancée du 1er octobre au 1er juillet afin de « parvenir à une gestion plus sécurisée et rationalisée du processus de collecte et de reversement ». « Cela permettra ensuite une publication fiabilisée des tarifs (applicables l’année suivante) à destination des plateformes de réservation en ligne de logements plus tôt dans l’année, au 30 septembre au lieu de début décembre », selon l’exposé des motifs de l’amendement concerné.
DETR : recentrage sur les territoires ruraux
Comme l’avaient souhaité les membres de la mission d’information de l'Assemblée nationale, dans un rapport (lire Maire info du 29 octobre), la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) devrait être recentrée sur... les territoires ruraux. C’est ce que prévoit l’amendement adopté par les députés qui vise à ne prendre désormais en compte, dans le calcul de l’enveloppe, que les seules communes rurales situées dans les EPCI éligibles, et non plus aussi les communes urbaines situées dans des EPCI éligibles à la dotation.
Dotation d’intercommunalité : réajustement des prélèvements
Les députés sont également revenus sur un point de la réforme de la dotation d’intercommunalité instaurée en 2019, jugé récemment inconstitutionnelle par le Conseil constitutionnel. Le prélèvement de l’État qui était opéré à l’identique chaque année sur certains EPCI conduisait à une différence de traitement non justifiée entre les intercommunalités (lire Maire info du 20 octobre). Il a donc été décidé que, à compter de l’exercice 2021, « une procédure d’ajustement des prélèvements sur la fiscalité des EPCI en cas de changement de situation ». Il est ainsi prévu « une clause de revoyure du montant du prélèvement pour les groupements dont les recettes par habitant auraient baissé de manière sensible par rapport à 2015 », ce prélèvement pourra être « minoré » voire « même entièrement annulé », a précisé Jacqueline Gourault.
TFPB, CFE… : reports, exonérations et abattements
Plusieurs reports et exonérations sont aussi à signaler. Les députés ont d’abord reporté de deux mois, au 1er décembre 2020, la date limite des délibérations permettant aux collectivités et aux EPCI d’instaurer des exonérations de TFPB, de CFE et de CVAE dans les zones de revitalisation des centres-villes (ZRCV) et les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZoRCoMiR), deux nouveaux dispositifs fiscaux visant à soutenir les activités commerciales et artisanales dans les centres-villes des villes moyennes et en milieu rural. De ce fait, les entreprises pourront exceptionnellement demander à bénéficier des allègements « jusqu’au 31 décembre 2020 ».
Report de deux ans également du transfert de la cotisation foncière des entreprises (CFE) des établissements publics territoriaux (EPT) vers la métropole du Grand-Paris.
Une série d’exonération ou d’abattements de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) ont également été accordés aux collectivités territoriales : applicable aux immeubles de l’État sur lesquels ont été délivrés des titres constitutifs de droits réels, aux logements faisant l’objet d’un bail réel solidaire (BRS)...
Taxe funéraire supprimée
L'Assemblée a, par ailleurs, supprimé la taxe funéraire portant sur les convois, les inhumations et les crémations (et instituée de manière facultative sur délibération du conseil municipal) qui était prélevée en 2017 par 400 communes pour un montant de 5,8 millions d'euros. C'est une taxe « injuste » géographiquement, a fait valoir le rapporteur général, vantant « une mesure pour les familles » et justifiant cette décision au regard de « la faiblesse de son rendement, de l’absence d’objectif de politique publique assigné, de la lourdeur que sa gestion entraîne pour les trésoriers communaux, et de son incidence fiscale sur les proches des défunts ».
On peut, en outre, citer, parmi d’autres, le prolongement jusqu'en 2021 du fonds de stabilisation et son élargissement à une cinquantaine de départements et de collectivités à statut particulier, le prolongement jusqu’en 2025 des aides du fonds d’aide pour le relogement d’urgence (FARU) ou encore le report d’un an du calendrier de l’expérimentation du compte financier unique (CFU).
A.W.
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