Budget 2023 : le Conseil constitutionnel saisi par les députés sur les modalités de calcul de la DGFÂ
Par A.W.
Après avoir passé avec succès, samedi, l’ultime motion de censure déposée par les députés de la Nupes, le projet de loi de finances (PLF) pour 2023 va devoir désormais passer la censure du Conseil constitutionnel.
Adopté sans vote grâce à la procédure du 49.3 actionnée par la Première ministre, le texte qui prévoit la suppression de la CVAE et la création d'un filet de sécurité énergétique pour les collectivités a été déféré, lundi, devant les sages de la rue de Montpensier à la fois par les députés LR et LIOT (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires), et par ceux de la coalition de gauche. Dans deux saisines distinctes, ils considèrent que plusieurs dispositions du texte portent atteinte aux principes constitutionnels.
« Injustices » dans le calcul de la DGF
Parmi de nombreux griefs, les députés LR et LIOT s’interrogent ainsi, dans leur saisine, sur « les modalités de calcul » de la dotation globale de fonctionnement (DGF) qui, à leurs yeux, créent « un certain nombre d’injustices ».
En cause, le fait que celle-ci puisse être « extrêmement variable » entre des communes qui ont pourtant le même nombre d’habitants. Comme c’est le cas, illustrent les députés, de la dotation moyenne attribuée à la commune de Coubron (Seine-Saint-Denis) qui serait « 13 fois » inférieure à celle de la commune de Seine-Saint-Denis percevant le plus de DGF, « quatre fois plus faible que la moyenne de la DGF par habitant » attribuée dans ce département francilien et « plus de trois fois plus faible que [celle] attribuée dans les communes du Grand Paris Est ».
Or, selon eux, « rien ne semble justifier un tel différentiel, pas même la nécessité d’une certaine péréquation pour les communes en difficulté », vu « l’ampleur des écarts observés ». Ils demandent donc au Conseil constitutionnel de « trancher en droit cette question ».
CVAE : des amendements censurés de manière « injustifiée »
De leur côté, les députés de la Nupes dénoncent, dans leur saisine, la limitation « de manière excessive et injustifiée » du droit d’amendement des parlementaires de la part de la présidente de l’Assemblée, lors de l’examen de l’article consacré à la suppression de la CVAE.
Alors que plusieurs amendements prévoyant la suppression du fonds de péréquation de la CVAE (et donc des dépenses afférentes) ont été considérés comme recevables par le président de la commission des finances, ils ont été déclarés irrecevables par la présidente de la chambre basse qui l’avait pourtant saisi.
Les députés de la Nupes expliquent ainsi que la suppression du fonds « n’entraînait ni diminution des recettes de création ou aggravation de charge publique » puisque « seule la répartition entre les départements change ». D’autant qu’« un tel mécanisme avait été mis en place lors de la compensation versée aux régions » lors de la suppression, en 2021, de la part de CVAE qui leur était attribuée. La décision de la présidente de l’Assemblée est donc, à leurs yeux, « une infraction manifestement disproportionnée [et] injustifiée ».
Plus globalement, les députés jugent que l’exécutif n’a pas respecté le droit d'amendement des parlementaires lorsqu’il a engagé sa responsabilité sur un texte qui n’était pas le projet de loi « tel qu’il avait été amendé par les députés, en particulier en première lecture ». Certaines modifications pourtant votées à la majorité par les députés ayant été évincées quand d’autres, non soutenues ou rejetées par les députés, ont été intégrées. Autre grief de la part des LR et LIOT : près de 1 500 amendements, émanant de tous les groupes, « n’ont pas été traités par les services de l’Assemblée nationale ». Le sort qui leur a été réservé reste donc inconnu.
Mauvaise utilisation du 49.3
De la même manière, députés de gauche et de droite reprochent, cette fois-ci de concert, au gouvernement l’utilisation à cinq reprises (en première lecture sur la partie « recettes » puis sur l’ensemble du texte, en nouvelle lecture sur la première partie puis sur le texte entier et, enfin, en lecture définitive sur l’ensemble du texte) de la procédure prévue à l'article 49.3 de la Constitution, permettant l'adoption d'un texte sans vote, à condition de passer l’épreuve de la motion de censure.
Plus précisément, ils estiment qu'Elisabeth Borne aurait dû dégainer ce dispositif uniquement sur l'ensemble du texte, et non simplement sur ses parties. Signalons toutefois qu'une saisine sur le même sujet a eu lieu sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, et que les Sages ont rendu leur copie hier : pour eux, l'utilisation du 49.3, dans ces conditions, est tout à fait conforme à la Constitution. Il n'y a aucune raison qu'ils n'appliquent pas le même raisonnement au PLF.
Par ailleurs, les députés pointent « l’insincérité » des prévisions économiques qui sous-tendent le projet de loi, l’insertion de plusieurs « cavaliers législatifs » et « budgétaires » ou encore « la planification insuffisante des moyens » des politiques de transition écologique. Les députés LR et LIOT reprochent également à cette loi d’avoir été examinée avant l’adoption de la loi de règlement et d’approbation des comptes de l’année 2021, projet de loi qui a été rejeté cet été par les parlementaires des deux chambres. Ce qu’ils estiment inconstitutionnel.
Pour rappel, le projet de loi de finances (PLF) pour 2023 valide la suppression de la CVAE étalée sur deux ans, met en place un filet de sécurité énergétique pour les collectivités et autorise, entre autres dispositions, de nouvelles communes à majorer leur taxe d’habitation sur les résidences secondaires.
Intégrés au texte lors de son adoption en deuxième lecture, les « contrats de confiance » ont été finalement retirés du texte, l’exécutif espérant toujours le réinsérer dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour 2023 à 2027 d’ici la fin de son examen. Mais cette fois-ci, sans le mécanisme de sanctions qui lui était initialement adossé.
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