Bronchiolite : le gouvernement active le Plan blanc
Par Franck Lemarc
« C’est une épidémie qui dépasse les pics que nous avons connus depuis plus de 10 ans. J’ai décidé ce matin de déclencher le plan Orsan spécifique à cette épidémie, pour renforcer encore les moyens des ARS et permettre que l’ensemble de l’hôpital puisse se concentrer sur ce problème particulièrement aigu. » Voilà ce qu’a déclaré hier François Braun, ministre de la Santé, devant le Sénat. Le plan Orsan (Organisation de la réponse du système de santé en situations sanitaires exceptionnelles) est une déclinaison de ce que l’on appelait auparavant le « Plan blanc ». Il comprend plusieurs volets, en fonction de la situation. Le dispositif déclenché hier est « Orsan EPI-CLIM », soit le plan dédié aux épidémies saisonnières et événements climatiques.
La bronchiolite
Rappelons que la bronchiolite est une affection, le plus souvent bénigne, qui touche les nourrissons et les enfants de moins de deux ans. Il s’agit d’une infection virale (qui ne répond donc pas aux antibiotiques) qui n’a pas, à ce jour, de traitement spécifique et qui en général « guérit spontanément en quelques jours », indique Santé publique France. Néanmoins, dans un certain nombre de cas, une hospitalisation peut s’avérer nécessaire : si l’enfant est âgé de moins de six semaines, s’il ne boit plus suffisamment, s’il vomit systématiquement ou « dort en permanence ». La maladie, toujours selon SPF, est mortelle dans 0,5 % des cas lorsque les enfants sont hospitalisés en services de soins aigus.
Si cette épidémie revient chaque année, à l’automne et en hiver, elle est cette année particulièrement brutale. Dans son bulletin épidémiologique d’hier, SPF note « un nombre de passages aux urgences et d’hospitalisations pour bronchiolite très élevé et à des niveaux supérieurs à ceux observés aux pics épidémiques depuis plus de 10 ans ». La semaine dernière, les hospitalisations pour bronchiolite représentaient « 50 % des hospitalisations suite à un passage aux urgences chez les enfants de moins de deux ans », contre 40 % les années précédentes. L’épidémie touche toutes les régions métropolitaines ainsi que la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane, mais elle est particulièrement virulente dans les départements de la moitié nord de la métropole.
Ce que change Orsan
La virulence de l’épidémie a conduit à la saturation des services d’urgences pédiatriques de plusieurs régions, dont la région Île-de-France, ou plusieurs dizaines d’enfants ont dû être transférés dans des hôpitaux d’autres régions en urgence : on a vu par exemple, la semaine dernière, des transports en hélicoptère de bébés depuis Paris vers le CHU de Lille.
Le dispositif Orsan qui a été activé hier permet la réorganisation des services de soin, non seulement à l’hôpital mais également en ville, « pour réaffecter les ressources au regard des priorités », rappelle SPF. Les ARS mettent en place des cellules spécifiques, baptisées CRAB (Cellules régionales d’appui bronchiolite), chargées de trouver des places pour les enfants malades, dans le public comme dans le privé, éventuellement en lien avec d’autres régions. Le dispositif permet également de « veiller à ce que la permanence des soins en médecine de ville soit territorialement adaptée au niveau de tension rencontré » et « d’accompagner les acteurs du territoire dans la mise en œuvre de solutions ».
Île-de-France : la région se mobilise
Le conseil régional d’Île-de-France a réagi, hier, à cette situation, en annonçant son intention de soutenir financièrement les familles dont les enfants ont été hospitalisés à distance. En effet, souligne la région dans un communiqué, « l’éloignement du lieu de résidence engendre en effet des frais de déplacement, de garde d’enfant, de restauration voire d’hébergement conséquents et ne doivent pas représenter une difficulté ou un frein à la présence des parents aux côtés de leur enfant ».
La région va donc voter aujourd’hui une aide forfaitaire de 150 euros pour les familles dont un enfant est hospitalisé à « plus d’une heure » de leur lieu d’habitation.
Crise profonde et « refondation »
Cette épidémie survient à un moment où la pédiatrie est déjà en crise. Comme l’avaient dénoncé plus de 4 000 professionnels de la pédiatrie dans une lettre ouverte à Emmanuel Macron, fin octobre, « les services de réanimations pédiatriques partout en France sont saturés, les services d’hospitalisation débordent, les soins dits non urgents sont reportés. » Ces professionnels s’alarmaient d’une « dégradation criante des soins apportés aux enfants qui les met quotidiennement en danger » (lire Maire info du 24 octobre).
Pour y faire face, le ministère de la Santé a annoncé un soutien de 150 millions d’euros à la pédiatrie, presque immédiatement porté à 400 millions d’euros, puis à plus de 500. Une gestion dénoncée par l’opposition, hier, au Sénat, comme « un pilotage à la petite semaine », « sans réponse pérenne et d’envergure ». L’opposition a souligné que malgré ces hausses de crédits, « l’augmentation de l’Ondam [objectif national de dépenses d'assurance maladie] est deux fois inférieur à l’inflation », ce qui revient à « une réduction des moyens ».
Le ministre François Braun a reconnu, en réponse, qu’une « refondation du système de santé » est « nécessaire ». « Mon ministère ne se contentera pas de gérer les crises. Nous travaillons à des Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant. Une feuille de route pour les années à venir sera publiée au printemps prochain, tandis que nous disposerons du résultat des travaux du CNR-santé. »
Le ministre de la Santé Santé et de la Prévention devrait participer, aux côtés de la ministre déléguée Agnès Firmin Le Bodo, le mercredi 23 novembre, dans le cadre du congrès de l’AMF, à un forum intitulé « l’accès aux soins, les solutions locales ».
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