Biodiversité : l'intégration des orientations nationales dans les politiques territoriales d'aménagement (enfin) précisée
En matière de préservation de la biodiversité, le temps est (souvent) long pour voir aboutir des mesures contraignantes. Portée par les lois Grenelle I et II de 2009 et 2010, la notion de « trame verte et bleue » s’est traduite en prescriptions au prix d’une gestation douloureuse (lire Maire Info du 4 janvier 2013). Outil d'aménagement durable du territoire, cette politique vise à « constituer ou à reconstituer un réseau écologique cohérent, à l'échelle du territoire national, pour préserver les écosystèmes et permettre aux espèces animales et végétales d'assurer leur cycle de vie ». S’agissant de sa prise en compte dans les documents de planification territoriale – et notamment les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet) –, les opérationnels ont encore dû s’armer de patience. Près de deux après sa mise en consultation, un décret a ainsi été publié au Journal officiel du 20 décembre, afin de mettre à jour le document-cadre fixant les orientations nationales en matière de continuité écologique des milieux, et ainsi intégrer cette nouvelle donne dans les politiques territoriales d’aménagement. Mais alors que la loi Notre de 2015 imposait initialement aux régions de finaliser leur Sraddet en 2019, seules les régions Paca et Grand Est ont tenu le pari. Devant se substituer à des schémas existants – dont le schéma régional de cohérence écologique (SRCE) – les Sraddet doivent fixer un certain nombre d’objectifs, notamment en matière de « gestion économe des espaces », de lutte contre le changement climatique, de pollution de l’air, ou encore de préservation et de restauration de la biodiversité. La mise à jour du document-cadre détaillant les orientations nationales « pour la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques » visait en ce sens à permettre leur intégration dans ces documents.
Un rapport, des objectifs, une carte synthétique
Encadré par les articles L. 4251-1 et suivants du CGCT, le Sraddet est un schéma dit « intégrateur », devant décliner au niveau régional la politique Trame verte et bleue. Il doit en ce sens identifier « les enjeux régionaux relevant de ces politiques », et « analyser les interactions tant positives que négatives entre ces enjeux afin de les mettre en cohérence », selon le décret du 17 décembre. Concrètement, les orientations nationales en matière de trame verte et bleue doivent être intégrées dans les « choix stratégiques » du Sraddet, de même qu’il devra exposer « les critères scientifiques et techniques permettant d'assurer une cohérence dans l'identification des continuités écologiques à l'échelle nationale mais également transfrontaliers », selon les termes du texte.
De même, le rapport du Sraddet doit contenir une synthèse de l'état des lieux en matière de biodiversité, qui doit chercher « à identifier les tendances et évolutions au travers des outils de suivi et des indicateurs disponibles ». Cette synthèse doit notamment inclure « un diagnostic par sous-trames qui permettra de déterminer les enjeux particuliers associés à la trame verte et bleue régionale (habitats remarquables constitutifs de certaines sous-trames, espaces et espèces patrimoniales associées, structures paysagères remarquables, etc.). ». Ce diagnostic initial doit ainsi permettre, « de la manière la plus fine possible », d’analyser les interactions potentielles entre les infrastructures de transport et la perméabilité des milieux vis-à-vis des continuités écologiques, et entre le développement des énergies renouvelables et la préservation de la biodiversité.
Fascicule unique et compatibilité des documents d’urbanisme
Sur le fondement de ce diagnostic et de la stratégie générale du Sraddet, des règles devront être fixées par la région pour atteindre les objectifs fixés par le document, représentés par une « carte synthétique indicative ». Selon le texte, l'outil principal « réside dans le pouvoir réglementaire reconnu à la région par l'article L. 4251-1 du CGCT qui lui permet d'énoncer des règles générales », qui doivent être regroupées dans un fascicule unique du Sradett, comprenant des indicateurs de suivi et d'évaluation. Des règles qui pourront d’ailleurs servir d’autres objectifs que celui de la préservation de la biodiversité, et notamment ceux de « maîtrise de l'artificialisation des sols et de consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers ». Ces règles générales pourront également définir des objectifs précis et des prescriptions concrètes avec lesquelles les documents d’urbanisme (Scot, PLU, PLUi, chartes des parcs naturels régionaux, plans de déplacement urbains, plans climats-air-énergie territoriaux) devront être compatibles.
Pour mémoire, la Trame verte et bleue était initialement définie comme un « réseau formé de continuités écologiques (…} identifiées par les schémas régionaux de cohérence écologique (SRCE) et les documents de planification de l'Etat, des collectivités territoriales et de leurs groupements ». Avec l’obligation de mettre en place les Sraddet dès juillet 2019, la loi Notre de 2015 a bouleversé le paysage opérationnel, les régions ayant, pour la plupart, à peine adopté leur SRCE à cette date. À noter que le centre de ressources pour la mise en œuvre de la Trame verte et bleue – désormais rattaché à ce qui est devenu, au 1er janvier 2020, l’Office français de la biodiversité – a récemment mis en ligne un document destiné à guider les maîtres d’ouvrage pour la prise en compte des continuités écologiques au sein des documents d'urbanisme.
Caroline Saint-André
Télécharger le décret.
Télécharger l’outil de prise en compte des continuités écologiques dans les documents d’urbanisme.
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