Nouveau débat sur la taxe d'habitation sur les locaux associatifs
C’est le député socialiste de la Loire Régis Juanico qui a soulevé la question lors de la séance de questions au gouvernement. Il a relevé que dans son département, « plusieurs structures associatives ou d’éducation populaire ont reçu pour la première fois fin 2020 un avis d’imposition » au titre de la taxe d’habitation (TH). « À l’issue d’une année particulièrement difficile pour la vie associative, (…) les sommes appelées au titre de la TH, qui s’élèvent souvent à plusieurs milliers d’euros, mettent en péril l’équilibre financier déjà fragile de (ces) structures », a poursuivi le député.
Cette augmentation du nombre d’assujettis serait due, selon Régis Juanico, à « un durcissement de l’application des textes » par les DDFiP (directions départementales des finances publiques).
La question de l’ouverture au public
Que dit la loi ? Selon l’article 1407 du Code général des impôts, la taxe d’habitation est due « pour les locaux meublés (…) occupés à titre privatif par les associations et qui ne sont pas retenus pour l’établissement de la cotisation foncière des entreprises ». « À titre privatif » est important, puisque, a contrario, les locaux dans lesquels le public peut circuler librement ne sont pas assujettis à la TH. Mais l’appréciation de cette nuance est, selon le député, variable. « De nombreuses structures mettent en avant l’ouverture au public de leurs locaux », par exemple pour accueillir « des réunions publiques, des conseils de quartier, des assemblées générales, ou recevoir des élèves ». Les DDFiP demandent maintenant aux associations des « plans détaillés » visant à identifier les surfaces privatives de celles ouvertes au public. Avec, à la clé, « de maigres dégrèvements » accordés au cas par cas, souligne le député.
Régis Juanico a donc demandé au gouvernement, tout particulièrement dans la situation créée par l’épidémie qui engendre « à la fois baisse d’activité, perte de recettes, reflux du mécénat des entreprises et diminution du nombre de bénévoles », s’il envisageait « d’exonérer en grande partie, voire totalement, de la TH ces structures vitales pour notre pacte social et républicain ».
D’autres cas
Ce n’est pas la première fois que le sujet vient en débat au Parlement. Au moment de la réforme de la taxe d’habitation, plusieurs députés ou sénateurs avaient déjà demandé au gouvernement si la suppression de la TH, pour les particuliers, s’appliquerait aussi aux locaux détenus par les associations. Réponse constante du gouvernement : non. En juin 2020, par exemple, Bercy répondait à une question du député Jean-Louis Masson (Moselle) que la réforme ne concernait « que les ménages », et que « les associations à but non lucratif demeurent assujetties à la TH ».
En janvier 2020, dans le département du Haut-Rhin cette fois, un député relevait lui aussi qu’une association sportive venait de recevoir, pour la première fois en trente ans, un avis d’imposition à la TH. Jugeant cette situation « particulièrement inéquitable pour les associations à but non lucratif et donc sans moyens financiers », le député, René Danesi, demandait lui aussi au gouvernement d’exonérer ces associations de la TH. Même réponse du gouvernement.
La réponse du gouvernement
La doctrine du gouvernement n’a pas varié aujourd’hui. Cédric O, secrétaire d’État chargé de la Transition numérique, s’est chargé hier de répondre à Régis Juanico. Il a rappelé « la jurisprudence bien établie par le Conseil d’État », à savoir les règles qui permettent de savoir si un local est, ou non, privatif : dès lors que c’est la structure qui possède le local qui fixe les conditions d’accès au public (« type de public admis, jours et heures d’ouverture » ), les locaux sont réputés conserver un caractère privatif. Si, au contraire, l’ouverture au public « ne dépend pas de la volonté » de cette structure, mais de « règles émanant d’un tiers », les locaux ne sont plus considérés comme privatifs.
Autrement dit, le fait que des locaux associatifs soient ouverts ponctuellement au public, par décision de l’association, n’enlève rien au caractère privatif de ces locaux, et la TH reste due.
Quant à envisager l’exonération de TH pour les associations, le gouvernement s’y refuse toujours, au motif qu’une telle décision « les exclurait de toute participation au financement des dépenses locales » et que « les autres contribuables locaux devraient alors compenser la perte de ressources qui en résulterait pour les collectivités ».
Le secrétaire d’État a rappelé que les associations ont toujours la possibilité de demander à l’administration fiscale « la remise gracieuse de tout ou partie de leur imposition », et que des « consignes » ont été données pour que ces demandes soient examinées « avec bienveillance ». Il a, en outre, « été demandé à l’administration fiscale de veiller à l’harmonisation des pratiques locales ».
Cette réponse « fait une belle jambe » aux associations concernées, a sèchement répondu le député Juanico, dont le groupe « continuera de réclamer la suspension ou l’annulation de cette taxe qui frappe (les associations) pour la première fois, alors que le contexte ne s’y prête guère ».
Franck Lemarc
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