Aménagement du territoire : la survie du FNADT en péril, alerte un rapport sénatorial
Par A.W.
Il faut « sauver » le soldat « FNADT ». C’est en substance le mot d’ordre du sénateur centriste du Cantal Bernard Delcros, dans un rapport présenté hier, dans lequel il s’inquiète des menaces sérieuses qui pèsent sur l’avenir du fonds national d'aménagement et de développement du territoire et des conséquences importantes pour les territoires.
Après avoir déjà subi des coupes budgétaires importantes en 2025, cet outil de financement de l’aménagement du territoire serait toujours dans le collimateur du gouvernement, qui reste à la recherche de 40 milliards d’euros d’économies pour son budget 2026. Or, une nouvelle atteinte aux crédits du FNADT porterait « un coup fatal » à certains volets de la politique d’aménagement du territoire, selon le rapporteur spécial des crédits consacrés à la politique des territoires.
Un fonds menacé dans son existence même
« Si un effort exceptionnel a pu être consenti [cette année], celui-ci ne pourra pas se réitérer en 2026 sans mettre en péril de façon irrémédiable de nombreuses actions concrètes d’aménagement du territoire qui dépendent exclusivement de cet outil de financement », met en garde le sénateur.
« La poursuite de la baisse des crédits du FNADT en 2026 se traduirait concrètement par la fin du volet territorial des CPER [contrats de plan État-régions], la fin des politiques de massif et la fin des mesures du plan France ruralités ! », tempête l’élu du Cantal, qui estime que ce fonds « ne peut en aucun cas être une variable d’ajustement lors des discussions budgétaires ».
D’autant qu’une telle décision serait une « aberration » puisqu’il n’y a « pas d’enjeu financier de grande ampleur » autour de ce fonds, qui coûte « seulement 200 millions d’euros » environ chaque année. En revanche, cela mettrait bien en péril « des enjeux territoriaux de première importance », « tout particulièrement » pour « les territoires ruraux, les territoires de montagne, […] mais aussi pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville ».
Sa suppression constituerait, donc, non seulement « un contresens économique » au regard du « fort effet de levier qu'il génère » (tout euro dépensé dans le cadre du FNADT engendre 6 euros d'investissements en tout), mais aussi « un contresens politique total » puisqu’il s'agit du seul outil budgétaire offrant une telle « souplesse », largement « plébiscitée » par les élus locaux. Une souplesse qui susciterait, « depuis longtemps et de manière récurrente, des réticences de Bercy quant à l’existence même de ce fonds ».
Le gouvernement est donc prévenu au moment où François Bayrou doit présenter, mardi prochain, les grandes orientations de son budget pour 2026.
CPER et politiques de massif en danger
Pour comprendre les enjeux évoqués par Bernard Delcros, il faut rappeler que le FNADT finance les contrats de plan État-région, dont les moyens ont été divisés par trois en 2025 (passant de 148 millions à 40 millions d’euros), mais aussi des programmes tels que les maisons France services.
Historiquement, celui-ci intègre une section générale et une section locale pour « faciliter sa gestion ». La section générale finance ainsi essentiellement des opérations d’intérêt national pilotées par l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) qui couvre notamment les mesures du plan France ruralités : France Services, Nouveaux lieux-Nouveaux liens, Territoires d’industrie, Action cœur de ville, Petites villes de demain, Villages d’avenir ou encore le Volontariat territorial en administration.
De l’autre côté, la section locale (déconcentrée au niveau des préfets de région) assure le financement de dispositifs contractualisés entre l’État et les collectivités : la septième génération des contrats de plan État-régions (CPER) pour 2021-2027, les contrats de plan interrégionaux de fleuves et de massifs (CPIER), les pactes de développement territorial ou encore les contrats de redynamisation de site de défense (CRSD).
La « baisse drastique » de 2025 a déjà « menacé l’existence » des contrats de plan État-région et a conduit au « report ou l’abandon d’opérations structurantes ». Si ces crédits ne sont pas rétablis en 2026, « les CPER et CPIER disparaîtraient purement et simplement », alerte le sénateur.
De la même manière, la poursuite des politiques de massif serait rendue « impossible » en cas de remise en cause des crédits du FNADT, celui-ci pouvant représenter « jusqu’à 95 % » de la contribution de l’État. Et « les mêmes constats peuvent être faits pour les politiques de bassin de fleuve : leur existence dépend en grande partie de la survie » de ce fonds.
Redonner des moyens au FNADT
« L’efficacité et la souplesse de l’utilisation de ce fonds d’intervention, son effet levier reconnu, pour un coût finalement très limité pour l’État […], justifie son maintien et de renoncer à tout projet de dilution dans un autre outil de financement », conclut donc Bernard Delcros.
Mieux, celui-ci propose, pour « sauver le FNADT », de lui « donner les moyens de poursuivre ses missions ». Pour cela, il formule plusieurs recommandations.
D’abord, il souhaite le « maintenir impérativement à l’écart de toute fusion des diverses subventions d’investissement local », sans quoi cela « sonnerait le glas » des actions qu’il finance.
Ensuite, il préconise d’inscrire au budget « les crédits nécessaires au respect des engagements pris par l’État dans le cadre des CPER et CPIER », tout en « renforçant la section générale du FNADT pour assurer le financement des nouveaux espaces France services dont la labellisation a été annoncée par le gouvernement ». « Il importe aussi que les crédits nécessaires au financement des engagements pris par le Premier ministre lors du comité interministériel aux ruralités du 20 juin 2025 soient inscrits dans le budget », dit-il.
Enfin et parmi d’autres propositions, il suggère d’engager « une réflexion » pour faire de ce fonds « l’outil de financement principal de la politique d’aménagement du territoire de l’État, afin de la rendre plus lisible et efficace ». Il s’interroge notamment « sur l’opportunité d’une intégration au sein du FNADT du fonds pour le recyclage des friches et du fonds Développement des mobilités durables en zones rurales ».
Est-ce que cette mise en garde suffira à sauver le FNADT ? Rien n'est moins sûr, à en croire le commentaire du rapporteur général, Jean-François Husson, lors de l’adoption du rapport par la commission des finances : « J’ai l’impression, en l’espèce, que ce rapport s’apparente un petit peu à la chronique d’une mort annoncée. Notre rapporteur spécial joue en quelque sorte le rôle de lanceur d’alerte pour éviter la fin du dispositif. »
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