Accords collectifs, loi SRU : deux décisions du Conseil d'État qui concernent les collectivités
Par F.L.
C’est juste un petit mot qui a été supprimé par le Conseil d’État dans le décret du 7 juillet 2021 relatif aux modalités de la négociation et de la conclusion des accords collectifs dans la fonction publique, mais il est important.
Ce décret, qui fixe les nouvelles règles de la négociation collective dans les trois versants de la fonction publique (lire Maire info du 8 juillet 2021), est un texte d’application de l’ordonnance du 17 février 2021 instaurant la pratique négociations pour des accords collectifs dans la fonction publique. Il fixe, en particulier, les règles de révision, de suspension ou de dénonciation d’un accord, en indiquant notamment à l’article 8 que « la révision de l'accord intervient à l'initiative de l'autorité administrative ou territoriale signataire ou de tout ou partie des organisations syndicales signataires, représentant la majorité au moins des suffrages exprimés. »
Les organisations non signataires d’un accord peuvent demander sa révision
C’est la deuxième occurrence du mot « signataires » qui a provoqué la contestation des organisations syndicales : la rédaction de cette phrase empêchait une OS non signataire de l’accord de demander la révision de celui-ci. Or cette condition n’était nullement prévue dans l’ordonnance. Plusieurs organisations syndicales (Fédération CGT des services publics, FSU, Solidaires…) ont donc porté l’affaire devant le Conseil d’État en demandant l’annulation « pour excès de pouvoir » de cette disposition (et de plusieurs autres, sur lesquelles, en revanche, le Conseil d’État ne les a pas suivies).
Sur la question des organisations signataires, le Conseil d’État a reconnu qu’en réservant « aux seules organisations signataires de l'accord » la possibilité d’en demander la révision, les auteurs du décret « ont ajouté une condition non prévue par la loi » et « méconnaissant les exigences du Préambule de la Constitution ». Les magistrats ont donc supprimé le mot « signataires » du décret, ce qui permet donc à des organisations non signataires, désormais, de pouvoir demander d’engager des négociations pour la révision d’un accord – à condition qu’elles représentent, ensemble ou séparément, « la majorité des suffrages exprimés ».
SRU : une commune fait reconnaître son droit à l’exemption
Autre décision du Conseil d’État également publiée ce matin au Journal officiel : elle concerne cette fois les conditions de dérogation aux règles de la loi SRU. Cette décision est néanmoins datée, puisque la loi 3DS a changé la donne.
Rappelons qu’au titre de la loi SRU, qui fixe des obligations bien connues de production de logements sociaux, certaines communes peuvent être exemptées de ces obligations. La loi prévoit trois cas pouvant justifier une exemption pour une commune : premièrement, que celle-ci soit située « hors d'une agglomération de plus de 30 000 habitants et insuffisamment reliées aux bassins d'activités et d'emplois par le réseau de transports en commun » ; deuxièmement, qu’elle appartienne à une agglomération de plus de 30 000 habitants dans laquelle la situation du logement social n’est pas tendue ; ou enfin, troisièmement, si plus de la moitié du territoire urbanisé de la commune est un soumis à une inconstructibilité du fait de l’exposition au bruit, au risque technologique ou à un plan de prévention des risques naturels.
Si une commune estime remplir l’une de ces conditions et estime donc pouvoir être exemptée des obligations en matière de logement social pour une période de trois ans, elle doit soumettre son cas à son EPCI de rattachement, lequel EPCI accepte ou non la demande. Puis, les EPCI communiquent à l’État la liste des communes dont ils acceptent l’exemption, ce qui donne lieu à la parution d’un décret listant l’ensemble des communes exemptées. Le dernier décret de ce type est paru le 30 décembre 2019.
La commune d’Émerainville, en Seine-et-Marne, avait demandé à sa communauté d’agglomération d’être exemptée, estimant remplir l’une des conditions prévues : plus de la moitié de son territoire urbanisé est soumis à une inconstructibilité résultant du plan d’exposition au bruit de l’aérodrome de Lognes. Mais la communauté d’agglomération a refusé que la commune d’Émerainville soit exemptée, et cette dernière ne figure pas, en effet, dans le décret du 30 décembre 2019.
La commune a attaqué cette décision devant le Conseil d’État en février 2020, demandant à celui-ci d’annuler le décret « en tant qu’elle ne figure pas dans cette liste ».
Le Conseil d’État a estimé que la commune était dans son droit, puisqu’elle remplit, de fait, l’une des conditions d’exemption. Il a donc accepté d’annuler le décret « en tant qu’il ne mentionne pas la commune d’Émerainville » – ce qui ne veut pas dire, évidemment, que le décret est annulé dans son ensemble. Les magistrats exigent que la communauté d’agglomération « procède au réexamen de la situation de la commune dans un délai de deux mois » à compter de la décision, rendue le 10 mai.
Mais en réalité, cette décision n'aura pas de conséquence directe : en effet, depuis la publication de la loi 3DS, les communes dont plus de la moitié du territoire urbanisé sont inconstructibles sont désormais automatiquement exemptées, sans que l'EPCI ait à se prononcer.
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