Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 9 février 2024
Gouvernement

Le nouveau gouvernement enfin complet, finalement sans grands changements

Le gouvernement est enfin au complet depuis hier soir, avec la publication de 19 nouveaux noms de ministres délégués et secrétaires d'État, dont seulement cinq sont de nouveaux entrants.

Par Franck Lemarc

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© Elysee.fr

La fumée blanche a fini par apparaître hier vers 20 heures, avec la publication d’un communiqué de l’Élysée donnant la liste complète du gouvernement de Gabriel Attal, après un mois d’interminables tractations, négociations, reports et rebondissements, dont le dernier épisode aura été le refus sec du maire de Pau, François Bayrou, de rejoindre l’équipe gouvernementale, mercredi.

Il y a quelques raisons d’être surpris du temps qu’il aura fallu pour nommer un gouvernement qui, au final, ne marque pas de rupture particulière avec le précédent, ni dans sa structure ni dans ses acteurs. À quelques exceptions près, le périmètre des ministères reste le même, sans création de nouveaux super-ministères – la rumeur avait, un temps, évoqué le retour d’une sorte de grand ministère de l’Équipement incluant à la fois le logement et les transports. Seul changement notable : l’Éducation nationale retrouve un ministère dédié, alors que le choix de l’adjoindre aux Sports et aux JOP avait été très critiqué. On peut noter également que la suppression du ministère de la Transition énergétique a été confirmée, ce qui a de quoi surprendre. Le sujet de l’énergie a été accolé à celui de l’industrie. 

Quant aux acteurs, ils restent pour l’essentiel les mêmes, malgré quelques nouveaux entrants et quelques changements de portefeuille. Le chef de l’État, Emmanuel Macron, semble avoir imposé ses choix à son Premier ministre, avec un gouvernement marqué par la présence de membres de l’appareil du parti présidentiel et par une inflexion vers la droite. 

Les nouveaux entrants

Emmanuel Macron a donc accepté l’exfiltration du ministère de l’Éducation nationale de la contestée Amélie Oudéa-Castéra, qui garde néanmoins un ministère de plein exercice, celui des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques. Elle est remplacée à la tête de l’Éducation nationale par Nicole Belloubet, ancienne ministre de la Justice en 2017. Nicole Belloubet, professeure de droit, connaît bien le monde de l’éducation nationale puisqu’elle a été par deux fois rectrice d’académie (Limoges et Toulouse). Issue du Parti socialiste, la nouvelle ministre de l’Éducation nationale a été élue locale, au début des années 2010, notamment comme première adjointe au maire de Toulouse et première vice-présidente du conseil régional de Midi-Pyrénées. 

Autre entrant au gouvernement, dont la nomination devrait plutôt réjouir les associations d’élus : Frédéric Valletoux devient ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention. Membre du parti Horizons, on peut dire de lui que c’est un incontestable connaisseur des problématiques des collectivités territoriales, sur tous les tableaux, puisqu’il a non seulement été maire de Fontainebleau pendant plus de 15 ans et membre actif de la direction de plusieurs associations d’élus, mais également journaliste, puis rédacteur en chef de la Gazette des communes. 

Si, contrairement à presque tous ses prédécesseurs récents au ministère de la Santé (Agnès Buzyn, Olivier Véran, François Braun), Frédéric Valletoux n’est pas médecin, il a en revanche une très bonne connaissance de la question hospitalière, en tant qu’ancien président, entre 2011 et 2022, de la Fédération hospitalière de France (FHF). Frédéric Valletoux aura donc toutes les armes en main pour s’attaquer à la question cruciale des moyens des hôpitaux – dont la situation financière est jugée catastrophique par la FHF et tous les acteurs du secteur –, de la désertification médicale et des relations entre médecine hospitalière et médecine de ville, ainsi que du sujet brûlant de la place des élus locaux dans la gouvernance de la santé. 

Nettement moins consensuelle, en revanche, est la nomination de Guillaume Kasbarian comme ministre délégué chargé du Logement. Député Renaissance depuis 2017, ce diplômé d’une grande école de commerce semble être l’antithèse parfaite de son prédécesseur Patrick Vergriete : sans expérience d’élu local et marqué à droite, quand Patrice Vergriete était maire de Dunkerque et venait de la gauche. Surtout, le principal fait d’armes de Guillaume Kasbarian est d’avoir porté la loi dite « anti-squatteurs », fortement décriée par les associations de lutte contre le mal-logement et peu goûtée des associations d’élus. 

Dès hier soir, les associations de lutte contre le mal-logement estimaient que cette nomination relevait de la « provocation ». Elle est toutefois cohérente avec le virage annoncé par Gabriel Attal dans son discours de politique général, marqué par un assouplissement de la loi SRU, et avec les mesures sur le logement introduites par le gouvernement dans la loi de finances pour 2024. Il reste maintenant à clarifier ces orientations – les annonces faites par le Premier ministre étant finalement assez floues, et l’AMF ayant fait savoir, depuis, qu’elle restait dans l’attente de « clarifications ».

Parmi les nouveaux arrivants, deux noms peu connus du grand public : Marie Guévenoux, ministre déléguée chargée des Outre-mer, et Marina Ferrari au Numérique. Marie Guévenoux, députée Renaissance de l’Essonne depuis 2017, vient elle aussi de la droite (elle a été présidente des Jeunes populaires, le mouvement de jeunesse de l’UMP). Elle a occupé une place centrale dans l’appareil du parti d’Emmanuel Macron et de l’Assemblée nationale, en tant que première questeure, un poste particulièrement stratégique. Elle n’est en revanche pas connue pour une connaissance particulière des problématiques des outre-mer. 

Le constat est le même pour la nouvelle secrétaire d’État au Numérique, Marina Ferrari. Bien qu’ayant brièvement travaillé dans une start-up spécialisée dans la création d’applications pour smartphone, Marina Ferrari, députée MoDem de la Savoie depuis 2017 et ancienne adjointe au maire d’Aix-les-Bains, est une inconnue dans le monde du numérique. Son activité de parlementaire ne montre aucune appétence particulière sur ce sujet – ni questions au gouvernement, ni rapport, ni proposition de loi sur le sujet. Elle devra donc très rapidement s’acclimater sur un sujet particulièrement technique et complexe, avec notamment à gérer le dossier épineux de la fermeture du réseau cuivre et la bascule vers la fibre.

Il est pourtant à noter que ce sujet essentiel a été « rétrogradé »  dans le gouvernement, puisque l’ancien titulaire du poste, Jean-Noël Barrot, était ministre délégué, alors que Marina Ferrari n’est que secrétaire d’État. 

Les changements de portefeuille

Plusieurs anciens ministres du gouvernement d’Élisabeth Borne ont été maintenus au gouvernement mais en changeant de portefeuille. C’est le cas de Patrice Vergriete, ancien ministre du Logement qui remplace désormais Clément Beaune aux Transports. 

Jean-Noël Barrot passe du Numérique à l’Europe, et Agnès-Pannier-Runacher, chargée auparavant de la Transition énergétique, devient ministre déléguée auprès du ministre de l’Agriculture… mais, étrangement, sans que son portefeuille soit précisé dans le communiqué. 

Les maintiens

Pas de changement, en revanche, pour plusieurs ministres chargés de dossiers concernant les collectivités territoriales, à commencer par le maintien à son poste, avec le même intitulé, de Dominique Faure, ministre déléguée chargée des Collectivités locales et de la Ruralité. Dominique Faure entretenant une bonne relation avec les associations d’élus, son maintien sera certainement apprécié par celles-ci. 

Stanislas Guerini reste ministre de la Transformation et de la Fonction publique – et ministre de plein exercice, ce qu’il a obtenu après, semble-t-il, un long bras de fer avec le chef de l’État. Enfin, Thomas Cazenave et Sabrina Agresti-Roubache gardent, respectivement, leur portefeuille de secrétaire d’État chargé des Comptes publics et de la Ville. 

Le gouvernement, enfin au complet, va pouvoir se mettre au travail. Plusieurs sujets extrêmement importants pour les maires sont au menu, au premier rang desquels les différentes propositions et/ou projets de loi sur le statut de l’élu. Ainsi qu’un éventuel texte sur la décentralisation, issu des réflexions de la mission menée par Éric Woerth, mais dont il semble qu’il ne faille, hélas, pas attendre grand-chose, la décentralisation n’étant visiblement plus au premier rang des priorités gouvernementales. 
 

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