Budget 2024 : Elisabeth Borne déclenche un nouveau « 49.3 » sur la partie « recettes »
Par A.W.
Après l’examen en première lecture par le Sénat et l’échec de la commission mixte paritaire, la Première ministre a, une nouvelle fois, déclenché, hier, l'article 49.3 de la Constitution afin d’adopter, en nouvelle lecture, la partie « recettes » du projet de loi de finances (PLF) pour 2024.
« Notre pays a besoin d’un budget », a-t-elle argué pour justifier son 21e recours à cette arme constitutionnelle qui permet au gouvernement de faire adopter le texte sans vote, en conservant ou écartant les dispositions qu'il souhaite.
« Alors que les délais constitutionnels nous pressent et qu'aucun groupe d'opposition n'est prêt à voter ce budget […], nous ne pouvons pas priver nos services publics de leurs moyens, nous ne pouvons pas priver notre sécurité, notre justice et nos armées d’une hausse inédite de leur budget. Nous ne pouvons pas priver la transition écologique de moyens sans précédent. Nous ne pouvons pas priver nos enseignants d’une augmentation de leur salaire de 125 euros minimum par mois », a défendu Élisabeth Borne.
Réforme des ZRR
« Le cap clair que nous fixons pour le pays : maîtriser nos deux dettes, la dette financière et la dette écologique », a de son côté soutenu le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, avec un « investissement historique pour la transition écologique » et 7 milliards supplémentaires prévus l'an prochain.
« Le "49.3" est au budget ce que le trou noir est à l'espace : il absorbe et efface toute trace de démocratie parlementaire », a pour sa part critiqué le président de la commission des finances, Eric Coquerel (LFI), pointant, « une fois de plus, un rabougrissement des débats ». Comme à son habitude, son groupe a répondu en déposant une motion de censure.
Vantant tout de même le maintien d’un « dialogue », la Première ministre a salué l’enrichissement du texte « par des amendements de la majorité comme des oppositions, à l’Assemblée nationale comme au Sénat », en se réjouissant notamment de « la réforme des zones de revitalisation rurale » - qui vont devenir France ruralités revitalisation (FRR).
C’était en effet l’un des compromis entrevus lors des débats à la chambre haute, entre le gouvernement et les sénateurs. Plusieurs amendements adoptés par ces derniers ont ainsi prévu de conduire à un assouplissement des critères financiers permettant de « faire entrer dans le zonage 4 000 communes de plus que prévu » et de mieux considérer la situation « spécifique » des communes de montagne. Des annonces initialement faites à l’occasion du congrès de l’AMF.
Cette disposition devrait donc se maintenir dans la loi de finances finale, bien que le texte sur lequel le gouvernement ait engagé sa responsabilité hier n’était pas encore publié ce matin et que le détail des mesures retenues par l’exécutif restait donc encore inconnu.
DGF : vers une hausse de 100 millions d’euros
L’un des amendements déposés par le gouvernement avant l’examen en nouvelle lecture revient, sans surprise, sur l’augmentation par le Sénat de la dotation globale de fonctionnement (DGF) versée par l'Etat aux collectivités.
Le texte devrait ainsi retenir une hausse supplémentaire de 100 millions d'euros de la DGF, comme annoncé par Elisabeth borne lors du congrès des maires, fin novembre, alors que le Sénat avait décidé de la porter à 170 millions. Mais ni la « chambre des territoires » ni le gouvernement ne souhaitent indexer la DGF sur l’inflation, au grand dam des associations d’élus qui réclament la mise en place urgente de cette mesure.
D’autres points de convergences et « avancées » votés par les sénateurs pour les collectivités territoriales ont été mis en avant par Thomas Cazenave. Parmi lesquelles, « la contemporanéisation des versements de TVA aux collectivités, à leur demande, l’extension et l’augmentation de la dotation garantie pour les communes nouvelles, […] l’attribution de la dotation particulière relative aux conditions d’exercice des mandats locaux (DPEL) sans critère de potentiel financier, le renforcement de l’assouplissement des règles de lien, notamment entre la taxe d’habitation sur les résidences secondaires et la taxe foncière, à la demande des élus, ou encore la mise en place du fonds de sauvegarde pour les départements en difficulté, faisant face à une baisse de leurs ressources, en particulier les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) ».
Autant de mesure que l’on devrait donc retrouver dans le texte retenu par l’exécutif. Assurant que « la situation des collectivités territoriales est globalement bonne, particulièrement celle du bloc communal », le ministre des Comptes publics a expliqué vouloir continuer à « soutenir les collectivités » - et les aider à « valoriser leurs investissements dans la transition écologique » via la « généralisation des budgets verts » . Cependant, celle-ci « doivent contribuer à hauteur de leur capacité à l’effort national ».
« Fonds territorial climat » : une mesure « indispensable »
A noter que cinq associations (Amorce, AMRF, France urbaine, Villes de France et ANPP-Territoires de projet) ont réclamé, hier, le maintien du « Fonds territorial climat » adopté par le Sénat dans la partie « dépenses » du PLF pour 2024, une mesure attendue « depuis plusieurs années par les collectivités territoriales ».
Dotée d’une enveloppe de 200 millions d'euros, cette proposition sénatoriale transpartisane visant à instaurer un fonds permettant de financer les PCAET serait visiblement proche de voir le jour puisque le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, avait assuré au début du mois qu'il tenterait, « dans les jours qui viennent », de concilier les différents « points de vue ».
Cette mesure « donne enfin les moyens d’une ingénierie territoriale en faveur de la lutte contre le dérèglement climatique essentielle pour mettre en œuvre la Stratégie Française Energie Climat dans tous les territoires », expliquent les associations qui rappellent que ce nouveau fonds prévoit « un versement de soutien aux collectivités porteuses d’un plan climat-air-énergie territorial (PCAET) à hauteur de 4 euros par habitant, pour l’heure déplacée du Fonds vert. Il viendrait ainsi permettre aux collectivités d’assumer davantage leur destin écologique et énergétique en disposant de moyens favorisant leur liberté d’action en matière de politique environnementale ».
Ces cinq associations ont également demandé le maintien de la franchise de taxe sur l’élimination des déchets ménagers (TGAP) sur la part des déchets non recyclables, également adoptée par les sénateurs. Celle-ci « octroie aux collectivités les marges de manœuvre pour investir dans l’économie circulaire et en particulier dans le tri à la source des biodéchets, alors qu’elles sont aujourd’hui insuffisamment accompagnées », expliquent-elles, jugeant ces deux mesures « indispensables ».
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