20 % de produits bio en restauration collective en 2022 : « un objectif hors d'atteinte », selon associations et syndicats environnementaux
Deux ans après sa promulgation le 1er novembre 2018, l’heure est aux premiers bilans pour la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine, durable et accessible à tous, plus connue sous le nom de loi Egalim.
Un bilan peu flatteur, et c’est un euphémisme, à en croire la note d’analyse publiée mardi par une trentaine de syndicats et associations (*), parmi lesquels Greenpeace, la Confédération paysanne et le Réseau Action climat. « Le constat d’échec est sans appel tant la quasi-totalité des indicateurs sont au rouge. Aucune des ambitions et bonnes intentions déclarées en grande pompe ou sous forme législative n’ont été suivies d’effet », fulminent les auteurs.
Seulement 4,5 % de produits bio en restauration collective
L’une des « ambitions » de cette loi, dont les signataires de cette note parlent, était d'« améliorer la qualité et la durabilité des repas proposés en restauration collective » et en restauration collective publique en particulier. Celle-ci a donc pour obligation de proposer, à compter du 1er janvier 2022, 50 % de produits dits de qualité (AOP/AOC, label rouge, HVE, produits fermiers) dont au moins 20 % de produits issus de l’agriculture biologique. Or « le bilan de cette mesure est pour l’instant négatif ». Si les collectivités ont bien proposé davantage de produits bio dans les restaurants collectifs (+ 28 % entre 2018 et 2019), ces produits ne représentent encore qu’une part négligeable dans la composition des menus (4,5 %). « L’objectif de 20 % de produits bio en 2022 ne sera donc pas atteint si un coup d’accélérateur important et généralisé sur l’ensemble du territoire n’est pas mis dès aujourd’hui ».
Les associations regrettent que les collectivités soient « laissées livrées à elles-mêmes ». Pour surmonter les « freins rencontrés par les restaurants collectifs », les syndicats et associations ont bien proposé pourtant de « pourvoir aux besoins en investissement matériel, accompagnement et formation des restaurants collectifs en milieu scolaire, universitaire, hospitalier, médico-social ». Mais l’idée a été retoquée par le gouvernement.
50 millions d’euros sur deux ans pour 1 500 communes
Les moyens mis sur la table ne sont clairement pas suffisants pour changer les pratiques, lutter contre le gaspillage alimentaire ou pour la végétalisation des repas, insistent encore les associations. « Le plan de relance prévoit une enveloppe de 50 millions d’euros sur 2 ans pour 1 500 communes quand les demandes de la Fondation Nicolas Hulot, du Secours Catholique et du réseau Restau Co sont de l’ordre de 330 millions d’euros par an pendant 3 ans pour opérer la transition et éviter le renforcement de la fracture alimentaire territoriale ». Il est, par ailleurs, à craindre que « de nombreux restaurants collectifs, du fait d’un budget contraint, optent pour des produits bio à bas coût issus des importations ». En effet, l’inscription de critères locaux dans les appels d’offres de la restauration collective reste interdite par le Code des marchés publics.
Menus végétariens à la cantine : « de sérieux efforts réalisés par les communes »
Impossible, en outre, de réaliser un bilan sur l’introduction, depuis le 1er janvier 2020, de produits issus du commerce équitable. « La question de savoir qui des collectivités territoriales ou des restaurateurs aura en charge la remontée des données à partir de 2022 n’a même pas été tranchée », déplorent les associations et les syndicats. Celui de l’expérimentation visant à introduire, pendant deux ans (2020-2022), des menus végétariens dans les cantines scolaires publiques et privées une fois par semaine, lui, est « mitigé ». « Si de sérieux efforts ont été réalisés par les communes dans les écoles primaires, notamment sur la qualité (73 % des villes appliquent la loi et plus de la moitié des menus servis sont composés de protéines végétales), près de la moitié des établissements du secondaire ne respectent pas la loi (41 % des collèges et 48 % des lycées) et la plupart servent encore des menus végétariens peu diversifiés, composés d’omelettes en majorité ».
Les choses pourraient-elles s’inverser dans les années qui viennent ? Les associations et les syndicats ne se montrent guère optimistes. « Parmi les processus qui auraient pu permettre de corriger le tir ou de mettre en œuvre des plans d’action pour atteindre les objectifs législatifs (projet de loi de finances, plan de relance, Convention citoyenne pour le climat, nouvelle programmation de la Politique agricole commune (PAC), etc), tout indique à ce stade qu’ils ne feront que conforter l’immobilisme qui prévaut depuis le discours de Rungis. Dernier exemple en date, le gouvernement a encore refusé fin octobre d’allouer dans le projet de loi de finances pour 2021 (PLF) les moyens nécessaires aux changements de pratiques de la restauration collective, pourtant une des pierres angulaires de la loi Egalim. »
Ludovic Galtier
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(*) Plateforme citoyenne pour une transition agricole et alimentaire : Attac, CCFD-Terre Solidaire, CFSI, CIWF France, Commerce Équitable France, Confédération paysanne, Foodwatch France, Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme, Fédération Nationale d’Agriculture Biologique, France Nature Environnement, Eau et Rivières de Bretagne, Générations Futures, Greenpeace France, Miramap, Nature et Progrès, Réseau Action Climat, Secours Catholique, Caritas France, SOL (Alternatives Agroécologiques et Solidaires), Terre & Humanisme, UFC-Que Choisir, Union Nationale de l’Apiculture Française, Welfarm, WWF.
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