Maire-info
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Édition du vendredi 10 janvier 2025
Éducation

Territoires éducatifs ruraux : un bilan satisfaisant selon l'IGESR mais un pilotage à repenser

Alors que les territoires éducatifs ruraux (TER) devraient être au nombre de 300 dans toute la France d'ici 2027, l'IGESR présente ses premières constations sur ce dispositif qui vise à consolider l'école rurale.

Par Lucile Bonnin

Lancé en 2022 par Jean-Michel Blanquer, ex-ministre de l’Éducation nationale, le dispositif Territoires éducatifs ruraux est en quelque sorte une adaptation des cités éducatives des quartiers prioritaires de la politique de la ville aux territoires ruraux, « dans la même logique d’intensification des prises en charge éducatives des enfants et des jeunes avant, pendant, autour et après le cadre scolaire ». Selon l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR), il existait, en 2023, 64 Territoires éducatifs ruraux, se déployant dans 570 communes regroupant 86 collèges, 632 écoles et bénéficiant à 67 836 élèves.

L’expérimentation « Territoires éducatifs ruraux »  touchant à sa fin, et avec sa généralisation annoncée depuis avril 2023 (lire Maire info du 3 avril 2023), l’IGESR a remis en juin de la même année un rapport sur ce dispositif. Ce dernier vient seulement d’être rendu public. L’IGESR y dresse un bilan positif et propose des ajustements dans sa mise en application. 

Des familles satisfaites 

L’auteur du rapport rappelle dans un premier temps que l’ « expérimentation TER a pour ambition de mettre en synergie des dispositifs de droit commun et d’appels à projets ». Concrètement, en plus de la dotation propre de 30 000 euros, les TER s’appuient sur plusieurs autres dispositifs comme notamment les financements de l’éducation nationale et des services jeunesse et sports ;  la convention territoriale globale (CTG) portée par la Caisse d’allocations familiales (CAF) et le financement des plans mercredi et des PEDT ou encore les dynamiques portées par chacune des collectivités (régions et départements sur le sport, la culture, l’éducation au développement durable-EDD…) et des partenaires (associations, CANOPÉ, clubs, maisons des jeunes et de la culture-MJC…). 

Selon l’enquête sur laquelle s’appuie ce rapport, les projets portés par ce dispositif sont « nombreux et variés » . Il est précisé dans le rapport que « la structuration des actions autour d’axes prioritaires est généralisée »  et que donc « les TER les plus avancés travaillent en commissions (EDD, piscine, activité périscolaire, parentalité, orientation…) associant l’ensemble des acteurs (parents, élus personnels). » 

Globalement, « le retour des familles et des élus (…) est positif, notamment quand les réflexions portent sur les différents temps de l’enfant. La richesse des propositions éducatives et/ou culturelles faites aux élèves des TER est l’élément positif le plus souvent rapporté par les familles. » 

L’EPCI comme périmètre d’intervention à privilégier 

La mission observe également que pour « décloisonner les politiques publiques »  et « porter une vision stratégique en faveur de la ruralité »  qu’un lien s’est renforcé dans le cadre des TER entre communes et EPCI. Ainsi, en 2023, « la plupart des TER ont intégré les EPCI dans les signataires et dans les groupes de pilotage. Les actions du TER en faveur des communautés de communes peuvent être présentées chaque année lors des conseils communautaires, réalisés en présence de tous les maires, ce qui permet de maintenir un lien étroit avec les communes non signataires des TER. » 

Plus largement, la mission considère que « le modèle le plus simple à piloter reste celui d'un TER correspondant au périmètre d'un EPCI » . Le modèle peut aussi correspondre « à une ancienne communauté de communes si la superficie ou le nombre d’acteurs de l’EPCI parait disproportionné ». Selon les observations de l’IGESR, « l’existence d’un EPCI ou d’une collectivité ayant exprimé son engagement dans la dynamique TER apparait comme une condition propice au déploiement réussi d’un TER. L’engagement déclaré des élus et notamment du président d’EPCI est un sujet plus important que la détention de compétences éducatives par l’EPCI (que ce soit des compétences scolaires, petite enfance, jeunesse, périscolaire, extrascolaire…). » 

Manque d’impulsion de la part de l’État et fortes réserves de l'AMF

Enfin, il est fait mention dans ce rapport que le pilotage de ce dispositif reste à perfectionner. Si « le déploiement des TER se traduit localement par un rapprochement entre les CAF, les MSA, les ARS, les CPAM et les DSDEN » , le soutien national à ces dynamiques n’est pas au rendez-vous. De plus, « en l’absence de chef de projet national, les acteurs locaux indiquent qu’il leur a fallu attendre plus d’une année sans information sur le soutien à la poursuite de l’expérimentation engagée. » 

Il est préconisé dans le rapport qu’une « coordination entre les ministères sociaux et celui de l'Éducation nationale »  soit mise en place sur le sujet de la ruralité. La mission indique aussi qu’il est « nécessaire qu'une étude d'impact et une évaluation de long terme (dix ans) soit maintenant installée, notamment du fait de la nouvelle extension du programme, qui doit s'élargir de 65 à 300 TER ». 

Récemment auditionnée par l’IGESR, l’AMF a rappelé qu’elle n’a pas été associée à l’élaboration de l’expérimentation des TER lancée en 2021, et qu’elle peine aujourd’hui à obtenir une visibilité sur son développement, et les dispositifs réellement mis en place. Elle demande toujours une clarification des objectifs assignés à cette expérimentation, une évaluation de celle-ci ainsi que des financements disponibles avant toute généralisation.

Par ailleurs, l’AMF a insisté pour que les TER soient pensés et coconstruits en amont avec les maires concernés, et pas systématiquement les intercommunalités qui sont relativement peu compétentes en matière scolaire.  Elle a également prévenu que les TER ne doivent pas servir de socle pour modifier à terme la répartition des compétences dans le champ éducatif, voire le statut de l’école, sans une véritable concertation nationale avec les maires sur le devenir de l’école.
 

Consulter le rapport. 

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