Édition du mercredi 6 juillet 2005
Les écoles ne respectent pas les renouvellements d'air réglementaires de 15 mètres cubes par heure et par personne
Les enfants respirent un air généralement plus pollué à l'intérieur des écoles qu'à l'extérieur, ce qui affecte leurs performances scolaires, selon les experts réunis pour un colloque à Paris par le réseau Recherche Santé Environnement Intérieur.
Les études de terrain anglaises, danoises, néerlandaises et françaises sont formelles : les écoles sont en général mal aérées et le confinement favorise les concentrations de polluants. Les experts parlent de « sick building syndrome », qui regroupe des symptômes tels que maux de tête, vertiges, nausées. La mauvaise qualité de l'air peut aussi favoriser les manifestations allergiques et l'asthme. Et surtout, elle affecte directement les performances des élèves : somnolence, perte d'attention, etc.
L'enjeu est important : les enfants passent en moyenne 6 à 8 heures à l'école et n'ont aucune possibilité de s'y soustraire.
Une enquête danoise (2003-2005) a comparé les performances des élèves dans des conditions de ventilation différentes. Les résultats des tests de lecture et compréhension sont améliorés de moitié lorsque le volume d'air est multiplié par deux (de 4,2 à 8,4 litres par élève), selon les résultats préliminaires. Les performances s'améliorent aussi lorsque la température baisse (20 degrés au lieu de 23,5 degrés). "Ce type d'étude est extrêmement précieux, au moment où le gouvernement danois doit lancer un programme de construction d'écoles", a observé Pawel Wargocki, de l'Université technique du Danemark.
En France, aucune des 11 écoles visités en 2001 par l'Observatoire de la qualité de l'air intérieur ne respectait les renouvellements d'air réglementaires de 15 mètres cubes par heure et par personne. Le débit maximal observé dans l'échantillon était de 10 mètres cubes.
"Les écoles sont mieux isolées pour économiser l'énergie et les maîtres ne pensent pas toujours à ouvrir les fenêtres", a observé Séverine Kirchner, de l'Observatoire de la qualité de l'air intérieur.
La très grande majorité (80 % à 90%) des écoles ne dispose pas de ventilation mécanique et, lorsque celle-ci existe, elle n'est pas entretenue (filtres usés, etc.). "L'air confiné ne parvient pas à disperser les polluants", a-t-elle ajouté. Si une partie de la pollution vient du dehors, une autre est émise à l'intérieur : bois, colles, tissus, produits de nettoyage, sans parler du matériel scolaire qui contient des produits chimiques (effaceurs, marqueurs, etc.).
Les experts s'inquiètent de l'omniprésence du formaldéhyde, un conservateur présent dans de très nombreux produits (colle, encres, bois agglomérés, vernis, produits nettoyants), classé cancérigène de niveau 1 par le Centre international de recherche sur le cancer.
Une campagne de mesure dans les écoles et crèches de Strasbourg a relevé en 2004/2005 des teneurs significatives de formaldéhyde.
Les lieux de vie des plus petits ne sont pas épargnés : les maternelles utilisent énormément de matériaux pour les activités manuelles (colles, peintures, etc.). En crèche, le nettoyage est plus poussé qu'en primaire, par peur des infections, a relevé André Cicolella, qui dirige l'unité d'évaluation des risques sanitaires de l'INERIS.
Cependant, les études sont trop fragmentaires pour proposer des remèdes. Une enquête nationale lancée en 2003 sur l'air intérieur de 720 logements français devait initialement porter sur 80 écoles. Le volet scolaire a été amputé faute de financement. L'Observatoire proposera aux pouvoirs publics une nouvelle étude sur les écoles l'an prochain.
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