« Pas de suppression » de postes dans l'Éducation nationale malgré le coup de rabot, promet le gouvernement
Par Anne-Sophie Morel (AFP) et F.L.
« Il n’y aura pas de suppressions d’emplois, les emplois dont nous avons besoin pour mettre en place les réformes seront là » , a-t-elle assuré lors d'un déplacement dans une école de Mulhouse, au lendemain de l'officialisation des coupes supplémentaires dans le budget 2024 pour un montant global de 10 milliards d'euros (lier Maire info du 22 février).
Dans le décret paru au Journal officiel, le ministère de l'Économie demande près de 700 millions d'euros d'économies supplémentaires sur l'enseignement scolaire, qui touchent en premier lieu l'enveloppe « vie de l’élève » (- 262 millions d'euros), recouvrant notamment les actions de santé et de citoyenneté ou les aides sociales, mais aussi le paiement des AESH et des personnels d’assistance éducative. L'effort concerne aussi l'enseignement public du premier degré (- 138 millions d'euros), du second degré (-123 millions d'euros) et l’enseignement privé (- 99 millions d'euros).
« Ces annulations de crédits portent sur des crédits mis de côté, que nous utilisons en cours d’année, si nous devons faire face à des chocs particuliers ou exceptionnels, ce sont ces crédits-là qui sont gelés », a précisé Nicole Belloubet, estimant que « l'école est protégée » dans ce coup de rabot.
Il reste tout de même à savoir si la forte baisse de l'enveloppe « vie de l'élève » va remettre en question l'accord de principe du gouvernement sur le financement par l'Éducation nationale des AESH sur le temps de la pause méridienne.
Par ailleurs, la stabilité « globale » promise par la ministre ne semble pas remettre en cause les suppressions de postes d'enseignants au niveau local : depuis la fin décembre, les Conseils départementaux de l'Éducation nationale (CDEN) se voient notifier les affectations dans les départements pour la rentrée prochaine. Et les mauvaises nouvelles se succèdent, comme en atteste la presse régionale : 54 suppressions de postes dans les écoles en Meurthe-et-Moselle, 26 dans la Marne, 12 en Haute-Loire, 38 dans les Vosges, 25 dans l'Aisne... À la rentrée 2024, quasiment toutes les académies connaîtront des diminutions d'effectif (sauf Créteil, Versailles, Nice, Montpellier, la Corse La Réunion et la Guyane). Dans certaines académies, les diminutions seront très marquées : Lille va perdre 219 postes, Nancy-Metz 120, la Normandie 110.
« Ça doit être clair »
Selon le ministère, ces mesures d'économies ne remettent pas en cause l'annulation de la baisse du nombre d'enseignants annoncée fin décembre par Gabriel Attal, quand il était encore ministre de l'Education nationale avant de rejoindre Matignon. Une annulation visant à permettre un meilleur taux d'encadrement des élèves par les professeurs dans le cadre de la réforme « choc des savoirs » , instaurant notamment des groupes de niveau au collège en français et en mathématiques à partir de la rentrée prochaine.
Initialement étaient prévues « 1 709 restitutions d'emplois enseignants dans le premier degré » et « 484 restitutions d'emplois enseignants dans le second degré », justifiées par une nouvelle baisse de la démographie scolaire prévue en 2024.
Nicole Belloubet, nommée le 8 février en succession d'Amélie Oudéa-Castéra, a ainsi assuré qu'elle « aur(ait) les postes » pour permettre la mise en place de groupes de niveau, en faisant notamment appel à des « personnels contractuels » , « formés » et « accompagnés », faute d'un nombre suffisant d'enseignants titulaires. Ses déclarations n'ont toutefois pas vraiment éteint les inquiétudes.
« La ministre tente de rassurer, mais si ces économies ne se font pas sur les postes, il faut qu'elle nous dise où elles se feront, ça doit être clair, pour les enseignants et pour les familles » , indique à l'AFP Élisabeth Allain-Moreno, secrétaire générale du SE-Unsa.
Pièce de 2 euros
« On refuse les économies, on demande évidemment plus d'investissements. On demande à ce que les dépenses actuelles soient mieux fléchées car on voit bien que cela ne correspond pas aux besoins » , ajoute-t-elle, citant les dépenses engendrées par l'expérimentation de la « tenue unique » par exemple. « Il y a une incohérence entre le discours d'Emmanuel Macron ou Gabriel Attal de faire de l'Éducation la "mère de toutes les batailles" et ne pas être capables de sanctuariser le budget du ministère de l'Éducation » , a abondé Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat du second degré.
« L'Éducation nationale manque de tout et on lui retire près de 700 millions d'euros. Si on ne touche pas aux postes, on touche bien à quelque chose. Est-ce sur le recrutement de contractuels ? Récupère-t-on de l'argent du Pacte – un milliard d'euros en année pleine – car le dispositif ne fonctionne pas ? » , s'interroge-t-elle, en référence au « pacte enseignant » , mis en place pour inciter les enseignants à assurer d'autres missions, comme des remplacements, contre une hausse de rémunération.
Ces nouvelles questions surviennent alors que les syndicats, déjà secoués par la séquence Oudéa-Castéra, n'ont pas caché leur agacement cette semaine face au coût annoncé – 16 millions d'euros – d'une opération de promotion des JOP 2024 auprès des élèves de primaire, à qui seront distribuées des pièces commémoratives de 2 euros.
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