Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 22 mai 2023
Violentes faites aux élus

Violences faites aux élus : le gouvernement dévoile son « pack sécurité »

Le ministère chargé des Collectivités territoriales a annoncé, mercredi dernier, un nouveau train de mesures visant à protéger les élus contre les violences, après l'émoi suscité par la démission du maire de Saint-Brévin-les-Pins, Yannick Morez. Des mesures que salue l'AMF, qui demande toutefois à l'État d'aller plus loin.

Par Franck Lemarc

Maire-Info
© Matignon

« Les maires et nos élus locaux sont les premiers maillons de la chaîne républicaine : ils incarnent l’intérêt général au quotidien, le don de soi pour les autres. En protégeant nos élus, nous protégeons notre démocratie. »  C’est ce qu’a déclaré Dominique Faure, la ministre chargée des Collectivités territoriales, après avoir reçu, mercredi 17 mai, le maire de Saint-Brévin-les-Pins, Yannick Morez, accompagné du président de l’AMF, David Lisnard, et du président de l’Association des maires de Loire-Atlantique, Maurice Perrion. À cette occasion, la ministre a dévoilé le nouveau « Pack sécurité »  destiné aux élus.

Annonces accélérées

Le maire de Saint-Brévin-les-Pins avait annoncé la semaine précédente son intention non seulement de démissionner de ses fonctions mais même de quitter sa commune, après des mois de harcèlement par des militants d’extrême droite qui refusent l’installation d’un Cada (Centre d’accueil des demandeurs d’asile) dans la commune. Ce harcèlement a connu son apogée lorsqu’un individu a mis le feu aux voitures du maire, incendie qui s’est propagé à son domicile. 

Cet épisode, qui n’est que la suite d’une longue série d’agressions contre les maires (lire Maire info de lundi dernier), a suscité une colère particulière du côté des associations d’élus, notamment du fait que Yannick Morez a estimé n’avoir pas reçu le soutien nécessaire de l’État (« l’État m’a abandonné », a-t-il encore déclaré la semaine dernière lors d’une audition par le Sénat). 

Néanmoins, les annonces faites par le gouvernement mercredi dernier, si elles ont peut-être été précipitées par cette affaire, n’ont pas été directement provoquées par celle-ci, puisque les décisions, explique l’entourage de la ministre, étaient déjà prises depuis plusieurs semaines. 

3 400 référents

La ministre a annoncé le lancement d’un nouveau Centre d’analyse et de lutte contre les violences faites aux élus, qui a d’ores et déjà commencé à travailler. Il s’agit d’une cellule d’une quinzaine de personnes partiellement détachées pour « mieux connaître le phénomène des violences aux élus, l'analyser et adapter la réponse opérationnelle en temps réel ». Ce centre intégrera des fonctionnaires détachés du ministère de l’Intérieur, des directions générales de la police et de la gendarmerie nationales, de la DGCL ainsi que de l’Agence nationale de cohésion des territoires. 

Si les associations d’élus seront régulièrement « consultées »  par ce Centre, elles n’en feront pas directement partie, indique l’entourage de la ministre. 

Le Centre d’analyse et de lutte sera chargé de piloter le déploiement d’un « pack sécurité », dont le principal outil sera « la création d’un réseau de 3 400 référents nationaux ‘’atteintes aux élus’’ dans toutes les brigades de gendarmerie et les commissariats, afin que les élus aient un point de contact privilégié pour oser parler des menaces ou des violences dont ils font l’objet ». 

Par ailleurs, le gouvernement va renforcer le dispositif « Alarme élu », déjà existant, qui « permet aux élus qui se sentent menacés de se manifester auprès de leur commissariat ou de leur gendarmerie pour être secourus rapidement en cas d'appel au 17 et bénéficier d'une vigilance renforcée de la part des forces de l'ordre ». Il s’engage à ce que chaque menace fasse l’objet d’une évaluation, et à ce que les élus menacés puissent bénéficier d’un audit de sécurité de leur mairie ou de leur domicile. Il sera également demandé aux forces de l’ordre d’accepter systématiquement de recueillir les plaintes en mairie ou au domicile de l’élu si celui-ci ne souhaite pas aller en gendarmerie ou au commissariat. 

Enfin, le gouvernement annonce que la plate-forme Pharos (permettant de signaler les contenus illicites sur internet) sera mobilisée « pour mieux détecter et judiciariser les violences en ligne ». 

« D'autres étapes suivront, a déclaré Dominique Faure, notamment pour durcir les peines des auteurs de violences faites aux élus. » 

Plate-forme nationale

L’AMF a réagi à ces annonces, mercredi dernier, par la voix de son président, David Lisnard, qui a déploré une  montée des violences « qui révèle l’impuissance publique »  et « une crise civique et démocratique profonde ». L’association a salué la création du Centre d’analyse et de lutte, qui « répond à une demande ancienne de l’AMF ». Elle demande cependant à y être plus étroitement associée, et réitère sa demande de voir créée une « plate-forme nationale d’enregistrement et de suivi des plaintes ». Interrogé sur ce sujet par Maire info, l’entourage de la ministre a indiqué que le gouvernement n’est pas fermé à cette idée, mais qu’une telle plate-forme est « entièrement à créer techniquement et juridiquement », ce qui prendra forcément du temps. 

Enfin, l’AMF a rappelé qu’une grande partie du problème, en aval des violences, vient de l’insuffisance « des moyens d’enquête dont disposent la police et la gendarmerie, ce qui conduit à un nombre considérable de classements sans suite ». L’association demande donc que l’État « donne plus de moyens humains et financiers »  aux forces de l’ordre. 

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2