Violences dans les écoles : création d'une équipe mobile de sécurité « nationale »
Par Franck Lemarc
Une circulaire tristement d’actualité. C’est jeudi qu’a été diffusée au Bulletin officiel de l’Éducation nationale l’instruction du Directeur général de l’enseignement scolaire, Édouard Geffray, sur la création d’une équipe mobile de sécurité nationale, le jour même où le jeune Shamseddine, 15 ans, a été lynché à une centaine de mètres de son collège de Viry-Châtillon, dans l’Essonne. Le lendemain, vendredi 5 avril, le maire de la commune, profondément bouleversé, annonçait la mort de l’adolescent, qui n’a pas survécu à ses blessures malgré une opération en urgence dans un hôpital parisien.
Ce drame intervient quelques jours après le passage à tabac de la jeune Samara, 14 ans, à Montpellier, le 2 avril, qui a conduit la jeune fille dans le coma avec une hémorragie cérébrale – agression commise par des jeunes scolarisés dans le même établissement.
Communauté éducative, parents, élus, se montrent de plus en plus inquiets face à un phénomène de violence qui semble progresser chez les plus jeunes, dès le collège : en un an, selon les statistiques de l’Éducation nationale, c’est au collège que le nombre d’incidents graves a le plus progressé.
Équipes de sécurité
Si cette montée de la violence est la marque d’un problème de société profond, le gouvernement a choisi d’apporter une première réponse sur le terrain sécuritaire, avec l’annonce du renforcement des différents dispositifs de sécurité dans les écoles. Dans sa circulaire, Édouard Geffray rappelle que la sécurité sur la voie publique relève des forces de l’ordre, mais que « les espaces scolaires et leurs accès » relèvent, eux, du ministère de l’Éducation nationale, au travers de deux dispositifs : les APS (assistants de prévention et de sécurité) et les EMS (équipes mobiles de sécurité).
Les EMS ont été créées en 2009. Leurs missions sont décrites avec précision dans un Vade-mecum publié en 2001 par le ministère, et sont au nombre de trois : sécuriser les établissements et leurs « abords immédiats », faire de la prévention « lorsque des tensions sont prévisibles ou en situation de crise ou de danger imminent », faire de « l’accompagnement » auprès des équipes de direction et des équipes pédagogiques ou auprès des élèves. Les EMS sont pilotées à l’échelle des académies.
Quant aux APS, ils ont été créés en 2012. Ce sont des assistants d’éducation, recrutés spécifiquement pour mener des missions de « prévention des violences ». Ils « sont impliqués dans l'action éducative avec les autres personnels (conseillers principaux d'éducation, personnels sociaux et de santé, conseillers d'orientation-psychologues, etc.), et interviennent en soutien au traitement des situations en cas de crise grave compromettant la sécurité des personnes et des biens ». Les APS, jusqu’à présents, étaient recrutés au niveau d’un seul établissement.
EMS-N
La circulaire du 4 avril annonce d’abord « l’extension du périmètre géographique » de ces dispositifs.
Pour ce qui concerne les APS, ils vont autorisés désormais à intervenir à l’échelle « départementale » et non plus sur un seul établissement, « à titre exceptionnel » : les recteurs d’académie sont appelés à proposer dans les plus brefs délais un « avenant » au contrat des APS pour y intégrer ces nouvelles modalités, et tous les recrutements à venir devront se faire sur cette base : les APS doivent pouvoir être amenés à intervenir dans un autre établissement que celui auquel ils sont rattachés, en cas de crise.
Quant aux EMS, elles doivent avoir « la possibilité d’intervenir plus massivement et plus longtemps sur des zones sensibles, en particulier dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ou dans les quartiers de reconquête républicaine. (…) Si certaines équipes sont départementalisées, elles doivent rester sous l’autorité du recteur d’académie afin notamment de permettre leur mobilisation interdépartementale, notamment en cas de situation de crise. »
Le directeur général de l’enseignement scolaire demande également aux recteurs « d’anticiper » les possibilités de mutualisation des moyens EMS entre académies. Des conventions devront être signées entre les académies pour définir les conditions de cette mutualisation, et les « interventions mutualisées » pourront se faire ou à la demande des recteurs concernés ou « sur proposition du haut fonctionnaire de défense et de sécurité », Thierry Le Goff.
Enfin, une équipe nationale des EMS (EMS-N) va être créée « dans les plus brefs délais », permettant de « répondre à des situations locales de crise aiguë, lorsque les moyens académiques ne sont plus suffisants ».
Cette équipe d’une vingtaine de personnes sera composée « de personnels disposant d’une expérience en académie et reconnus pour leurs compétences ». Elle fera l’objet de recrutements nouveaux. Cette EMS-N sera implantée en Île-de-France, avec pour vocation de pouvoir être « projetée sur tout le territoire métropolitain en 24 à 48 h ».
Lors de ses interventions, l’EMS-N sera placée sous l’autorité du recteur de l’académie d’accueil. « Avec un regard extérieur complétant l’expertise locale, cette réserve nationale contribuera au diagnostic de la situation où elle sera déployée, à la gestion des crises rencontrées et pourra contribuer à proposer des solutions durables d’apaisement du climat scolaire. »
« Bouclier autour de l’école »
Enfin, à l’issue d’une réunion interministérielle qui s’est également tenue le 4 avril, un « plan pour la sécurité des élèves, des personnels et des établissements » a été établi, afin de « déployer un bouclier autour de l’école ». Ce plan ne semble pas, toutefois, comporter beaucoup de mesures nouvelles, mais consiste davantage en un rappel des mesures existantes.
Au-delà des mesures de « prévention » et de formation, notamment autour de la question de la détection du harcèlement, le plan prévoit un renforcement des « partenariats opérationnels avec les forces de sécurité ». Le gouvernement rappelle qu’au niveau communal, « les chefs d’établissement participent aux comités locaux et intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance », et que ce partenariat est renforcé « par l’extension des conventions départementales entre les parquets et les DSDEN et la désignation des policiers et gendarmes référents de l’éducation nationale ».
Le gouvernement rappelle également que « 100 % des établissements » disposent aujourd’hui d’un PPMS (plan particulier de mise en sûreté), plans qui « organisent la réponse face aux risques majeurs (naturels ou industriels) ou aux menaces (intrusion, attentats ou toute forme d’attaque, violences au sein ou aux abords de l’école ou de l’établissement) ». Chaque année, les établissements réalisent « au moins deux exercices » dans le cadre des PPMS. Pour mémoire, une circulaire du 8 juin 2023 prévoit la fusion des volets « risques majeurs » et « attentats – intrusion » des PPMS au plus tard durant l’année scolaire 2027/2028.
Il est rappelé que l’État a dépensé environ 1,5 milliard d’euros sur les cinq dernières années pour sécuriser le bâti scolaire que 53 millions d’euros ont été mobilisés via le FIPD (fonds interministériel de prévention de la délinquance), à destination des collectivités, pour sécuriser les établissements.
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