Maire-info
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Édition du vendredi 26 mars 2021
Santé publique

Vers une « diminution de la densité médicale en France » ?

La Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) est l'auteure d'un dossier sur « la démographie récente et à venir » des professions médicales et pharmaceutiques en France. « La densité médicale standardisée retrouverait son niveau actuel seulement au milieu des années 2030 ».

La crise sanitaire confirme peut-être plus que jamais le besoin de proximité des services publics de santé. C’est dans ce contexte et à l’occasion de la première édition de la conférence nationale de la santé que la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) a publié une réflexion autour de la « démographie récente et à venir »  des professions médicales et pharmaceutiques, « enjeu central »  s’il en est « des politiques d’organisation de l’offre de soins ».
La Drees cherche ainsi des réponses à des questions concrètes : « Combien de professionnels sont disponibles pour apporter des soins à la population ? »  ; « Combien le seront dans les années à venir ? »  ; « Cette évolution répondra-t-elle à l’augmentation de la population et aux évolutions des besoins ? »  Deux leviers sur deux temps différents pourraient ainsi être activés pour adapter l’offre aux besoins. « À court terme, l’organisation des soins doit tenir compte de la démographie présente des professions : leur nombre, leur âge, leur mode d’exercice par exemple. À plus long terme, les capacités de formation sont un levier majeur des politiques d’offre de soins. »  En sachant néanmoins que les premiers effets de cette décision seront perceptibles seulement à l’issue de la durée de formation des professionnels, « cinq à dix ans »  plus tard donc pour le cas des sages-femmes et des médecins.

215 000 médecins en activité depuis 2012

L’étude établit, dans un premier temps, « un état des lieux des données actuellement disponibles sur la démographie présente et à venir des quatre professions concernées : médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et pharmaciens ». « Depuis 2012, écrit la Drees, les effectifs de médecins en activité de moins de 70 ans sont globalement stables aux environ de 215 000, la baisse du nombre de généralistes étant compensée par la hausse du nombre de spécialistes, notamment grâce à l’arrivée importante de médecins à diplôme étranger. Plutôt âgée, cette profession tend à se féminiser avec les jeunes générations. » 
Pour les décennies qui viennent, « une stagnation des effectifs »  est prévue jusqu’en 2030, « avant une hausse assez importante des effectifs de médecins jusqu’en 2050 (+ 1,5 % de croissance annuelle moyenne des effectifs entre 2030 et 2050) ». L’augmentation de l’exercice salarié en serait l’une des causes. « En revanche, compte tenu de l’augmentation de la population, le modèle montre une diminution de la densité médicale en France », prévient la Drees. 
« Cette baisse est plus forte si l’on considère la densité médicale standardisée, qui tient compte de la hausse des besoins de soins induite par le vieillissement de la population. La densité médicale standardisée retrouverait son niveau actuel seulement au milieu des années 2030 puis repartirait à la hausse pour être supérieure de 23 % à la densité actuelle en 2050. » 

Du numerus clausus au numerus apertus

Depuis les années 1970 (*), c’est le numerus clausus qui définissait annuellement « les capacités de formation pour les professions médicales et pharmaceutiques »  (décret ministériel). Face à la recrudescence des déserts médicaux, notamment en milieu rural, un nouveau dispositif entrera en vigueur à la rentrée 2021 avec la loi Organisation et transformation du système de santé de 2019 : le numerus apertus. Fixé dans le cadre d’une conférence nationale, « qui élabore des objectifs quinquennaux de formation sur le fondement de propositions émanant des acteurs locaux »,  il « a pour ambition de proposer des flux d’entrée aux études de santé de façon plus flexible et plus concertée, avec un objectif de réponse aux besoins de santé des territoires ».

Les autres variations à retenir

S’agissant des autres professions médicales et pharmaceutiques, on apprend qu’au 1er janvier 2021, on compte 42 000 chirurgiens-dentistes de moins de 70 ans en activité, dont la population s’est depuis 2012 rajeunie et féminisée, et que l’on ne devrait pas en manquer d’ici 2050. « Le modèle de projection des effectifs de chirurgiens-dentistes montre une croissance soutenue des effectifs jusqu’en 2050 (+ 46 % par rapport à 2021), qui se décline en une hausse des effectifs de libéraux comme de salariés, écrit la Drees. Cette croissance des effectifs est fortement portée par l’arrivée de chirurgiens-dentistes diplômés à l’étranger : elle ne serait que de 5 %, pour les effectifs, en l’absence de ce flux ».
Le nombre de sages-femmes, quant à lui, est « stabilisé »  après « une augmentation constante »  depuis 2012 autour de 23 400 en 2021. « Le modèle de projection des effectifs de sages-femmes montre une croissance à un rythme modéré des effectifs jusqu’au milieu des années 2040, avant d’amorcer un léger recul », analyse la Drees. Une baisse légère des effectifs des pharmaciens est, enfin, à prévoir jusqu’en 2027 (- 2 % de pharmaciens inscrits à l’Ordre par rapport à 2021), puis une hausse, aboutissant à des effectifs en hausse de 12 % par rapport à 2021 à l’horizon 2050.

Ludovic Galtier

* Introduit dès la rentrée 1972 pour la médecine et l’odontologie, il est instauré à partir de la rentrée 1977 pour la maïeutique et à partir de la rentrée 1980 pour la pharmacie.

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